Comment le camp de François Hollande s’adresse aux électeurs de Marine Le Pen
Face au succès de Marine Le Pen au premier tour, le Parti socialiste et le camp Hollande ont défini les éléments de langage à adopter envers l'électorat frontiste. Entre dénonciation de la politique de Nicolas Sarkozy et compréhension.
Si Marine Le Pen n'a pas réédité l'exploit de son père Jean-Marie d'accéder au second tour de l'élection présidentielle et ainsi, d'éliminer comme en 2002 le candidat socialiste, la présidente du Front national a porté le score du Front national à un niveau historique. Soit 17,9 % des suffrages exprimés et près de 6,5 millions de voix. "Un score impressionnant", dixit l'ex Premier ministre Laurent Fabius
"Jamais le Front national n'avait atteint un tel niveau dans une élection présidentielle. Même en 2002 où il avait été qualifié pour le second tour, il n'avait pas mobilisé autant de suffrages", a rappelé François Hollande, lors de son allocution depuis Tulle. Cet enseignement du premier tour n'a donc pas échappé au camp du candidat socialiste, qui dès dimanche soir, a développé une panoplie d'éléments de langage destinés à parler à cet électorat frontiste.
Explication
Premier élément de langage utilisé par le camp Hollande : la culpabilité de Nicolas Sarkozy dans cette nette progression du Front national.
Le prétendant socialiste à l'Elysée, dès son allocution à Tulle, a jugé ces résultats comme étant "un désaveu du candidat sortant dont le discours, tout au long de ces derniers mois, a fait le jeu de l'extrême-droite".
"J'avais dit qu'on sous-évalue toujours l'extrême droite, donc elle est là et c'est quand même l'échec de Nicolas Sarkozy", a-t-il ensuite ajouté devant des journalistes.
Compréhension
Plutôt que de fustiger cet électorat favorable à Marine Le Pen, et puisqu'il n'y a pas eu d'élimination du candidat socialiste, François Hollande a joué, et va jouer, la carte de la compréhension.
Cet électorat exprime "une colère sociale incroyable" à laquelle il faut apporter des réponses, a déclaré lundi Pierre Moscovici, directeur de campagne de M. Hollande.
"C'est un nouveau signal qui appelle à mes yeux un sursaut dans la République et une compréhension non pas simplement des colères, mais de ce qui travaille notre pays dès lors qu'il n'est pas porté avec fierté sur ce qui doit l'élever, et qu'il est parfois abaissé, amoindri", avait expliqué François Hollande dimanche.
En résumé, Manuel Valls, directeur de la communication du présidentiable socialiste, confirme qu'il faut "entendre" cet électorat touché par "la violence de la crise économique, les délocalisations, la désindustrialisation, la peur de l'avenir".
Récupération
Mais comment François Hollande va-t-il pouvoir rassembler et fédérer ce vote FN, la France des oubliés, des déclassés, lui qui veut désormais "rassembler les Français, tous les Français" ? D'autant que sa proposition sur le vote des non communautaires aux élections locales pourrait à cet égard ne pas convenir à cette partie de l'électorat.
"Sur la question du pouvoir d'achat, de la réindustrialisation, on est là et on va parler à la France qui se lève tôt, à la France des pavillons, à la France rurale et péri-urbaine", répond Olivier Faure, proche de François Hollande, lundi.
Toute la difficulté de cette dernière étape stratégique relève du défi : parler des thématiques chères à cet électorat sans pour autant "embrayer sur les thèses du Front national", dixit Olivier Faure.
Alors il faut choyer ces électeurs, sans pour autant dériver des valeurs du PS. "Je fais attention à ces électeurs qui se sentent surtout bouleversés, touchés par la mondialisation, atteints par elle, et qui attendent des solutions industrielles aux problèmes industriels", a déclaré Pierre Moscovici. "On a besoin de plus de justice, de plus de République, de plus de laïcité, de plus de sécurité... a renchérit Manuel Valls. Et c'est à eux évidemment qu'il faut s'adresser".
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