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"Choquant", "stupide"... A Béziers, le comptage des élèves musulmans par le maire hérisse l'opposition

Le procureur de Béziers a annoncé l'ouverture d'une enquête préliminaire sur le fichage des élèves selon leur religion par la mairie, dirigée par Robert Ménard. 

Article rédigé par Marie-Violette Bernard
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Robert Ménard pose devant l'hôtel de ville de Béziers (Hérault), le 28 janvier 2014. (PASCAL GUYOT / AFP)

La justice s'en mêle. Le procureur annonce, mardi 5 mai, l'ouverture d'une enquête préliminaire sur le fichage des élèves selon leur religion par la mairie de Béziers (Hérault). Robert Ménard, élu en mars 2014 avec le soutien du Front national, a affirmé, lundi, que 64,6% des enfants inscrits dans les écoles maternelles et élémentaires publiques biterroises étaient de confession musulmane. Le chiffre, qu'il tient de ses services municipaux, est présumé obtenu de manière illégale : la loi française interdit les statistiques basées sur l'appartenance religieuse.

La nouvelle provoque d'ailleurs l'indignation à Béziers. "Le maire prétend sanctionner ceux qui ne respectent pas la loi, mais lui-même, le premier magistrat de la ville, la bafoue ? C'est particulièrement choquant !" réagit Claude Aïqui-Reboul, président de la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE) de l'Hérault, contacté par francetv info. L'association départementale, classée à gauche, "n'exclut pas de porter plainte" une fois qu'elle aura contacté les instances nationales.

Un chiffre "totalement artificiel"

"On est face à une infraction caractérisée : il a admis sur un média de grande écoute que ce chiffre n'était pas une imprudence, mais qu'il avait sciemment calculé cette statistique", ajoute Jean-Michel Du Plaa, élu municipal d'opposition de Béziers. Pour ce socialiste, le pourcentage avancé par Robert Ménard est "totalement artificiel" et "relève du fantasme complet". "On ne peut pas déduire une religion d'un prénom, ça n'a aucun sens !" poursuit Jean-Michel Du Plaa.

Un avis partagé par la FCPE. "Dans le sud de la France, plusieurs enfants se prénomment Brian ou Loïc. Cela ne veut pas forcément dire qu'ils sont tous irlandais ou bretons", s'agace Claude Aïqui-Reboul. "On peut s'appeler Mohammed et être catholique ou athée", abonde la conseillère municipale d'opposition (UMP) Monique Valaize.

"La Cnil doit être saisie"

Si l'ancienne adjointe au maire de la ville condamne ces "statistiques illégales", elle partage toutefois les inquiétudes de Robert Ménard sur "l'intégration des enfants d'origine maghrébine". "J'aimerais qu'on fasse en sorte que ces enfants soient des Français à part entière et je rejoins le maire sur sa proposition de dispenser des cours de français à leurs mères, pour qu'on puisse les intégrer", explique Monique Valaize.

Le député Elie Aboud, conseiller municipal UMP de Béziers, estime quant à lui que ce fichier constitue un "détournement complet des listes d'inscriptions à des fins idéologiques". "La Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) doit être saisie, pour faire respecter la loi qui interdit ces chiffres et, au-delà, enquêter sur les motivations de Robert Ménard", estime le chef de file des conseillers UMP de la ville.

"Quel est le but recherché par Robert Ménard ?" La question est aussi posée par le président de la FCPE 34. "Est-ce pour discriminer ces enfants ? Ou juste pour l'agitation médiatique ?" s'interroge Claude Aïqui-Reboul, qui prévoit de "nombreuses réactions" de parents d'élèves biterrois à cette statistique. Et de conclure : "Je les comprends : en plus d'être illégal, ce fichage est complètement stupide."

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