Au second jour de l'université, militants et élus PS affichent leur détermination en vue de la prochaine présidentielle
Si les mines sont plus détendues que l'an passé, les sourires sont encore timides.
Les socialistes sont convaincus du rejet croissant des Français vis-à-vis de la politique de Nicolas Sarkozy mais doutent encore de la capacité du PS à l'emporter. Surtout, ils veulent une victoire large et une vraie adhésion et une fois au pouvoir, ne plus décevoir.
Conséquence, les socialistes planchent. En clair, ils élaborent leur programme.
Le PS, au boulot
"Tout le monde a conscience qu'il faut travailler et tout le monde s'y est mis", résume Faty, militante active depuis de longues années, qui participe depuis au moins dix ans à l'université d'été des socialistes. Un diagnostic largement partagé par le député de Paris Jean-Marie Le Guen. "Les chantiers sont nombreux pour le PS. Il y a du travail, de la réflexion, un dialogue à mener avec les Français et leurs représentants. Tout ce travail doit être fait", souligne l'ancien vice-président de l'Assemblée Nationale qui précise aussitôt: "il est grande partie déjà engagé, il doit être poursuivi et mené à son terme."
"Avant il y avait un manque d'idées mais actuellement c'est une révolution idéologique", résume à sa façon Jean-Claude, retraité qui vient d'éplucher la presse. Pour ce Rochelais, lui aussi militant de base, il y a une "nouvelle société à construire mais sans faire de révolution". "Le problème", explique-t-il, "c'est l'adhésion des masses, convaincre les gens qu'il faut en finir avec la société de consommation."
D'un atelier à l'autre, les propositions abondent, les idées fusent. Les critiques à l'encontre du pouvoir en place aussi d'ailleurs. Reste à trancher les points de dissension, à déterminer les grandes orientations, définir les deux trois grandes priorités et à caler le discours. Car si le fond importe, la forme compte tout autant.
Un discours sans tabou
Il n'y a pas de naïveté chez les socialistes, explique Patrick Mennucci, secrétaire national adjoint du PS, chargé de l'animation et du développement des fédérations. Les socialistes agissent, notamment les maires, mais ils ont sans doute un petit peu de pudeur à avoir un langage martial", explique-t-il. "Il faut dire les choses clairement, appeler un voyou, un voyou."
"En plus de la police de proximité, il faudra reposer la question de l'encadrement militaire", poursuit Patrick Mennucci qui, revenant aux fondamentaux de la gauche, souligne le problème de l'absence de repères d'une partie de la jeunesse.
"Aujourd'hui, le fait que près de 200.000 jeunes soient sans formation, sans beaucoup d'éducation et n'aient plus la chance de se retrouver pendant un an dans le service national pour essayer de réintégrer un certain nombre de valeurs à la fois civique, républicaine et citoyenne, cela pose problème", souligne-t-il "sans oublier pour les plus jeunes, la disparition des colonies de vacances et des centres sociaux. A Marseille, il y avait 50.000 jeunes qui partaient en colonie maintenant, il n'y en a plus que 10.000." Ce sont aussi des sujets sur lesquels nous devons travailler, conclut-il.
Une approche décomplexée de la sécurité
L'iconoclaste Manuel Valls est l'un des plus en pointe au PS sur ce sujet. Le député-maire d'Evry, approché un temps par Nicolas Sarkozy en vue d'un éventuel poste au gouvernement, ne mâche pas ses mots à l'encontre du chef de l'Etat.
"Les gesticulations stériles de Nicolas Sarkozy (...) ne trompent plus personne. (...) Sa méthode fondée uniquement sous l'angle de la communication sur la gestion à chaud des dossiers a entraîné une inflation législative sans précédent: 17 lois ont été votées en moins de huit ans (...) et pour quels résultats ? interroge Manuel Valls. "Depuis 2002, les agressions contre les forces de l'ordre ont augmenté et jamais les violences contre les personnes n'ont été aussi importantes."
Côté solution, le député socialiste prône notamment la création "d'une police citoyenne (...) au contact quotidien de la population effectuant un travail de fond" pas "forcément identique au concept de politique de proximité imaginée il y a 10 ans (...) mais "des unités spécialisées liées géographiquement et durablement à ces territoires (ndlr, les quartiers où la loi s'applique difficilement). "Il faut ainsi territorialiser les forces de police, les concentrer sur les secteurs sensibles et les fidéliser à leur terrains ainsi qu'aux acteurs locaux, avec le souci d'une meilleure connaissance de leur environnement urbain et social de travail."
Gérard Collomb: "Pas de politique d'immigration sans un minimum d'expulsion"
Autre grand thème sur lequel les socialistes doivent clarifier leurs positions, l'immigration. Evoquant la situation des Roms, le maire socialiste de Lyon Gérard Collomb le reconnaît: "C'est un problème très difficile. Les conditions et les modes de vie sont à des années lumières de nos situations en Europe de l'ouest. Il y en a une partie que l'on pourrait fixer, ce qui sous-entend de s'en donner les moyens absolus, les autres, c'est clair, ils n'ont pas vocation à être là."
Pour le président du Grand Lyon, "il n'y a pas de politique d'immigration sans un minimum d'expulsion", mais en même temps, "il faut qu'il y ait une discussion au niveau européen parce que la Roumanie ne pourra pas faire face à elle seule (...) On fait des tas de politique de coopération décentralisée en Afrique, on peut en faire un peu en Roumaine aussi", propose Gérard Collomb.
Des propositions concrètes, sans langue de bois, voilà ce que Lisette est venue chercher. Ni adhérente, ni militante, cette Rochelaise est venue "en curieuse pour écouter des idées et faire connaissance avec des gens". "Je me suis intéressée aux Verts au moment des européennes et là, j'ai voulu voir à quoi ressemblait une Université du PS."
Les primaires: "l'arbitre de paix" des socialistes
La formule est de Patrick Mennucci et pour la mise en oeuvre des primaires, c'est Arnaud Montebourg qui est à la manoeuvre. Pour le secrétaire national à la rénovation du PS, qui ne manque ni de talent, ni d'énergie pour convaincre les récalcitrants, "L'élection présidentielle, c'est notre affaire à tous, l'affaire de nos voisins, de nos amis et non une affaire d'états majors, de sondage qui ne passent et ne se passent qu'à la télévision".
"Les primaires sont l'occasion d'aller chercher des citoyens pour les ramener à nous", plaide encore l'avocat de formation.
Adoptées il y a près d'un, les primaires sont aujourd'hui actées dans leurs grands principes: ouvertes à toute la gauche, à toute personnalité politique soutenue par au moins 5% du conseil national du PS ou 5% d'un collège électoral d'élus locaux ou 5% de parlementaires. Quant au calendrier retenu à ce jour, il fixe à juin 2004 le dépôt des candidatures, à septembre le début de la campagne officielle et à fin octobre le vote de tout citoyen inscrit sur les listes électorales, moyennant un engagement écrit et un euro.
Les militants travaillent désormais à la mise en oeuvre de la procédure et pour Arnaud Montebourg, "le maillage du territoire et la souplesse du dispositif sont des éléments essentiels (...) Il faut, au minimum, un bureau de vote pour 5000 électeurs qui seront organisés dans les lieux habituels de vote sauf les écoles."
"Trouver des lieux de vote demande de l'anticipation", poursuit l'élu car "il faut d'abord avoir les accords de principes sur la mise à disposition des salles par les communes", mais nous installerons "des tentes à primaires dans les villes où il y aura problème", prévient le secrétaire national.
Enfin sur l'articulation du programme et des primaires, Arnaud Montebourg est clair. Le projet devra être "entériné avant le démarrage de la campagne des primaires. Le projet, ce n'est pas un 'enfermoir', c'est un socle, un point de départ". Mais le député de Saône et Loire prévient: "Il faudra assumer l'enrichissement du projet, sa mobilité, son évolution."
Du point de départ au point final, il reste désormais un peu moins de deux ans aux socialistes pour éviter d'encaisser un quatrième échec successif à la présidentielle.
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