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Autonomie de la Corse : "Nous prenons acte des propos du ministre, il est difficile de juger sans recul", indique un député corse

"En tout cas, la tonalité de Gérald Darmanin laisse pour l'instant augurer une évolution positive, c'est tout ce qu'on peut dire à cette heure-ci", commente Michel Castellani, député Libertés et Territoires de la 1ère circonscription de Haute Corse.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Michel Castellani, député Libertés et Territoires de la 1ère circonscription de Haute Corse, le 21 juillet 2020. (THOMAS PADILLA / MAXPPP)

"Nous prenons acte des propos du ministre, il est difficile de juger sans recul", indique Michel Castellani, député Libertés et Territoires de la 1ère circonscription de Haute Corse. Dans une interview publiée sur Corse Matin, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin déclare que le gouvernement français se dit prêt à envisager une forme d'autonomie pour la Corse. C'est la première fois qu'un représentant du gouvernement français entrouvre la porte à cette revendication de longue date des nationalistes corses.

Cette déclaration a lieu dans le contexte des violences sur l'île depuis deux semaines, après l'agression d'Yvan Colonna dans la prison d'Arles. Gérald Darmanin se rend en Corse pour deux jours afin de rencontrer les élus locaux et les forces de l'ordre. Le ministre a reconnu une part de responsabilité de l'Etat dans l'agression d'Yvan Colonna en mars dernier, et il promet de faire toute la lumière sur les faits : "C'est ce que nous demandons, et c'est tout à fait logique. Nous verrons ce que dira à l'Assemblée nationale le directeur de la pénitentiaire en France", a ajouté le député corse Michel Castellani.

franceinfo : Quelle a été votre première réaction face à cette longue interview de Gérald Darmanin chez nos confrères de Corse Matin ?

Michel Castellani : Nous prenons acte des propos du ministre, il est difficile de juger sans recul. On verra bien après ce qu'il se passera lors de ces discussions. C'est une vieille revendication que nous avions de pouvoir discuter avec le gouvernement, et regrettable qu'il ait fallu attendre le drame de la prison d'Arles pour en arriver là. Enfin, maintenant il faut aller de l'avant et de répondre du mieux possible aux problèmes, qui sont réels, de la Corse. Des problèmes économiques, sociaux, culturels. Ce n'est jamais simple de traiter ce genre de questions. Quand on parle d'autonomie, c'est le devoir d'adaptation, c'est-à-dire adapter le mieux possible les lois et les règlements à des réalités locales. C'est la gestion des compétences, hormis celles régaliennes. Et nous allons essayer tous ensemble - du moins j'espère, car tout cela est conditionné par la réélection d'Emmanuel Macron si j'ai bien compris - de voir un peu les problèmes en face, de mettre tout sur la table et de voir comment on peut avancer.

Gérald Darmanin indique que le préalable à toute discussion, c'est le retour au calme en Corse : est-ce que vous approuvez ces propos ?

Il est dans son rôle, je verrais mal un ministre de l'Intérieur dire autre chose. Il y a des choses qui sont profondément dégradées en Corse, j'espère que tout le monde comprend que ces discussions sont devenues une priorité. Maintenant, la discussion est ouverte - toujours si j'ai bien compris - à l'ensemble des forces de la Corse, donc il n'y a pas lieu d'une escalade supplémentaire. A priori ces discussions pourraient être de nature à faire baisser les tensions, c'est tout ce que je peux dire. Maintenant ce n'est pas moi qui commande les manifestants évidemment. C'était une revendication centrale, celle d'ouvrir les négociations ou du moins la discussion, maintenant on verra bien ce qu'il y a derrière. En tout cas, la tonalité du ministre laisse pour l'instant augurer une évolution positive, c'est tout ce qu'on peut dire à cette heure-ci.

Quelle forme devrait prendre selon vous cette autonomie de la Corse ?

C'est une question complexe, qu'il est difficile de traiter ex abrupto. Ce n'est pas dans la tradition française, qui est dans une structure d'Etat-Nation, c'est par contre beaucoup plus fréquent dans les îles méditerranéennes. Il faudra adapter les choses, avancer. D'abord, ce sera assez difficile à obtenir dans la mesure où il faudra une réforme constitutionnelle, ce qui n'est jamais facile à obtenir. Donc tout ça est conditionné par des discussions assez longues qui auront lieu, nous l'espérons, après les présidentielles et les législatives.

Est-ce que ces propos du ministre vous ont surpris ? À 26 jours du premier tour de l'élection présidentielle, certains candidats dénoncent une mesure électoraliste : qu'en pensez-vous ?

Oui et non. Ce n'est pas le langage qu'ils ont eu jusqu'à présent à l'Assemblée nationale, puisqu'on les avait sollicités depuis des années, aussi bien en contact privé que dans l'hémicycle. Maintenant, il faut tenir compte du fait que la cocotte-minute a explosé gravement en Corse et ça, le gouvernement doit en tenir compte. On ne peut pas ignorer ce qu'il s'est passé à Bastia, l'autre soir. Quand vous êtes en période électorale, que vous alliez dans un sens ou dans l'autre, vous serez attaqués parce que ce sont les règles du jeu. C'est peut-être une faiblesse du jeu démocratique, c'est regrettable mais c'est ainsi. Si le gouvernement n'avait pas bronché, on le lui aurait reproché. S'il bouge, on le lui reproche aussi.

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