Ancien mannequin, femme d'affaires et conseillère de l'ombre : qui est Ivanka Trump, la "Première fille" des Etats-Unis ?
La fille "préférée" de Donald Trump va devenir employée fédérale non rémunérée du président. Une nomination, annoncée mercredi, censée lever le flou sur son rôle de conseillère non officielle à la Maison Blanche.
On connaissait l'influence des Premières dames américaines. Sous Donald Trump, il va falloir compter avec la "Première fille". Ivanka Trump a annoncé, mercredi 29 mars, qu'elle allait devenir employée fédérale non rémunérée à la Maison Blanche. C'est la première fois qu'une fille de président occupe ce poste. Mais la nouvelle est loin d'être une surprise : la femme d'affaires de 35 ans est la conseillère officieuse de Donald Trump depuis des mois. Une présence stratégique et médiatique d'autant plus importante que la Première dame, Melania Trump, reste à New York, le temps que le dernier de la fratrie, Barron, finisse son année scolaire. Franceinfo dresse le portrait du membre du clan Trump le plus influent auprès du chef d'Etat américain.
"La petite fille à son papa"
Donald Trump n'en fait aucun mystère : Ivanka est sa "favorite". Deuxième d'une fratrie de cinq, elle est issue du premier mariage du milliardaire avec le mannequin tchèque Ivana Trump. "C'est la petite fille à son papa !", confiait-il au New York Magazine*, en 2004. Cette admiration flirte parfois avec l'indécence. Lors d'une apparition dans l'émission "The View", le milliardaire n'avait pas hésité à louer (une fois de plus) le physique d'Ivanka Trump. "Si ce n'était pas ma fille, je sortirais avec elle", avait-il souri, provoquant un malaise évident chez les quatre présentatrices.
Mais la fille du 45e président des Etats-Unis a bien d'autres qualités. Après avoir été mannequin pour Versace ou Thierry Mugler durant son adolescence Ivanka Trump intègre la prestigieuse université de Georgetown, puis l'école de commerce de Wharton, en Pennsylvanie. Elle rejoint ensuite le groupe familial : la Trump Organization. Comme ses frères Donald Jr et Eric, elle est nommée à la vice-présidence de l'entreprise paternelle. Femme d'affaires, elle crée également ses propres lignes de vêtements et de bijoux.
Au fil des années, Ivanka Trump s'est également présentée comme étant une "féministe". Elle milite ainsi depuis des années pour rendre l'entrepreneuriat plus accessible aux femmes. "Il y a des questions qui la passionnent et qu'elle défend depuis très longtemps, bien avant que son père ne soit candidat à la présidence", explique un de ses proches à NBC News.
Un atout dans la campagne
Cette image progressiste a été un atout pour son père durant la campagne présidentielle. Le républicain, turbulent, enchaîne les sorties polémiques. Sa fille aînée se montre, elle, mesurée et raisonnable. Donald Trump choque à plusieurs reprises avec ses propos sexistes. A chaque fois, Ivanka Trump est chargée de recoller les pots cassés. "Mon père est très direct, explique-t-elle à CNN pendant les primaires. Ses critiques ne sont pas fondées sur le genre des personnes [dont il parle]." Elle n'hésite pas à affirmer, dans Time, que son "père est féministe".
Ivanka Trump a également été considérée comme un marqueur centriste du candidat, chargée de convaincre les indécis. La famille de son mari, Jared Kushner, a longtemps financé le camp démocrate, y compris Hillary Clinton, dans les années 2000. Ivanka Trump est d'ailleurs une proche amie de la fille du couple Clinton, Chelsea, rappelle le New Yorker. "Beaucoup de gens de ma génération ne se définissent pas comme clairement républicains ou démocrates, mais votent pour ce qui leur semble juste pour leur famille et leur pays", a-t-elle affirmé pendant la campagne.
Difficile de savoir à quel point Ivanka Trump a été décisive dans l'élection de son père. La fille aînée du clan Trump n'a, en tout cas, pas attendu d'être officiellement nommée à la Maison Blanche pour y asseoir son influence. Peu après le 8 novembre, la démocrate Nancy Pelosi s'est entretenue avec Donald Trump par téléphone. Mais lorsque la chef de file de l'opposition à la Chambre des représentants a souhaité aborder la question des droits des femmes, le nouveau chef de l'Etat a tendu le combiné à sa fille aînée, rapporte le New York Times.
La conseillère de l'ombre
Disposant d'un accès privilégié au Bureau ovale - et à des informations classifiées, selon Cosmopolitan -, Ivanka Trump milite aujourd'hui auprès de son père pour généraliser le congé maternité, rapporte CNN. Le Washington Post croit même déceler son influence dans le discours prononcé par le président face au Congrès, le 28 février. Plus mesuré que d'habitude, Donald Trump y mentionne les droits des femmes à plusieurs reprises.
Dans les semaines suivant l'élection de son père à la tête des Etats-Unis, la femme d'affaires a, en outre, participé à plusieurs rencontres officielles. Elle était présente lors d'un entretien, en novembre, entre le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, et Donald Trump, révèle le New York Times. Alors que la rencontre entre le chef de l'Etat et Angela Merkel, à la mi-mars, s'est déroulée dans une atmosphère glaciale (le président américain a refusé de serrer la main de son homologue), la chancelière allemande semblait presque complice avec Ivanka Trump, rapporte le Telegraph, lors d'une table ronde sur l'apprentissage.
Mais ces nombreuses apparitions - sans toutefois bénéficier de rôle officiel à la Maison Blanche - ont parfois agacé. Une photo postée sur les réseaux sociaux, lundi 13 février, lui a ainsi valu de violentes critiques. Ivanka Trump y apparaissait assise dans le fauteuil du président, encadrée par son père et le Premier ministre canadien, Justin Trudeau. "Une excellente discussion avec deux dirigeants mondiaux sur l'importance qu'il y a de donner une place aux femmes !", se félicitait-elle dans le message publié sur Twitter. De nombreux internautes lui ont reproché de s'être assise dans le fauteuil du président, lui rappellant qu'elle n'avait pas été élue à ce poste.
A great discussion with two world leaders about the importance of women having a seat at the table! pic.twitter.com/AtiSiOoho0
— Ivanka Trump (@IvankaTrump) 13 février 2017
Le couple qui murmurait à l'oreille du président
Ivanka Trump n'a peut-être pas été élue à la Maison Blanche, mais elle y dispose d'un bureau depuis janvier. Juste au-dessus de celui de son mari, Jared Kushner. Le gendre de Donald Trump a, lui aussi, les faveurs du président. Nommé haut conseiller en janvier, il a été placé, fin mars, à la tête d'une nouvelle agence chargée de réorganiser l'administration fédérale, rapporte le Huffington Post. Il est également impliqué dans les négociations sur la paix au Proche-Orient et devrait avoir accès au plus haut niveau de secret-défense. Le tout sans aucune expérience politique ou diplomatique.
Les opposants au président américain ont dénoncé, à plusieurs reprises, l'influence du couple Trump-Kushner. Certains criant même au népotisme. Sans succès. Le département de la Justice a estimé en janvier que la loi américaine qui interdit aux proches du président d'être employés par le gouvernement fédéral ne concernait que les agences gouvernementales. La Maison Blanche, elle, n'est pas concernée.
Dans une volonté d'apaisement, le couple s'est efforcé de limiter les risques de conflits d'intérêts. Ivanka Trump et Jared Kushner ont vendu pour près de 37 millions de dollars (environ 35 millions d'euros) de titres afin de respecter les règles fédérales sur l'éthique, indique Politico. Aucun d'entre eux ne touchera de rémunération pour ses fonctions à la Maison Blanche. La femme d'affaires a également quitté la présidence de sa compagnie. Elle reste propriétaire de la société, mais les bénéfices tirés seront placés dans un fonds géré par sa belle-sœur.
La nomination d'Ivanka Trump à un poste officiel, mercredi 29 mars, a quelque peu calmé ses détracteurs. La jeune femme doit désormais se plier aux mêmes règles d'éthique et de transparence que les autres collaborateurs de Donald Trump. Mais elle dispose d'une assise inédite. "Le pouvoir de l'enfant d'un président est unique, estime Doug Wead, auteur d'un livre sur le sujet, dans les colonnes du New York Times. C'est un pouvoir que [le conseiller en stratégie Steve] Bannon n'a pas, que [le chef de cabinet Reince] Priebus n'a pas." Plus qu'une "Première fille", Ivanka Trump semble actuellement être la femme la plus puissante de Washington.
*Tous les liens sont en anglais
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