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Pourquoi Barack Obama n'arrive pas à modifier la loi sur les armes à feu

Après la tuerie de l'université Umpqua, jeudi dans l'Oregon, le président des Etats-Unis a appelé une nouvelle fois le Congrès à légiférer.

Article rédigé par Elise Lambert
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Le président des Etats-Unis, Barack Obama, lors de son discours après la fusillade de l'université Umpqua dans l'Oregon, le 1er octobre 2015. (NEWSCOM/SIPA)

"C'est devenu une chose banale, a déploré Barack Obama, visiblement en colère, à la suite de la fusillade de l'université Umpqua dans l'Oregon, jeudi 1er octobre. Nous sommes devenus insensibles à cela. Il ne devrait pas être aussi facile que cela pour quelqu'un qui veut infliger du mal aux autres de mettre la main sur un fusil."

Une nouvelle fois, le président des Etats-Unis a appelé les Américains à demander des comptes à leurs élus sur ce sujet : "A chaque fois qu'un drame comme celui-ci se produira, je répéterai que nous pouvons y faire quelque chose, mais que nous devons changer la loi." Tout au long de sa présidence, Barack Obama a lutté pour un durcissement de la législation sur les armes, en vain. Car il possède peu de marges de manœuvre. Francetv info revient sur les différents blocages.

Le port d'armes est garanti par la Constitution

Les armes ont toujours fait partie du paysage américain, et leur libre détention fait même partie de la Constitution des Etats-Unis de 1787. Selon le deuxième amendement (sur 27) de ce texte, les Américains ont un droit constitutionnel à posséder un arsenal, rappelle Slate

Une milice bien organisée, étant nécessaire à la sécurité d'un Etat libre, le droit qu'a le peuple de détenir et de porter des armes ne sera pas transgressé.

Deuxième amendement (Constitution des Etats-Unis)

 

Depuis des dizaines d'années, l'interprétation de cet amendement est sujette à débat dans le pays, notamment par rapport à son contexte : "La Constitution dit de manière explicite que le droit au port d'armes est permis, mais dans le cadre d'une 'milice', rappelle l'historien spécialiste des Etats-Unis Romain Huet, au Figaro. Au moment de la guerre d'Indépendance, les colons ont créé des milices qui sont devenues l'armée des Etats-Unis. Elles sont restées en place aujourd'hui sous la forme de la garde nationale des Etats. (...) Chacun peut ainsi posséder une arme en se revendiquant de celle-ci."

Un jugement de la Cour suprême de 1939 interprétait pourtant ce deuxième amendement de manière restrictive, en jugeant que le port d'armes ne devrait être permis qu'au sein d'une milice ou d'une organisation militaire, explique le Huffington Post. Or, en 2008, l'institution s'est de nouveau penchée sur l'amendement, et a estimé que "les législateurs voulaient garantir le droit de tous les individus à porter des armes, et non simplement le droit des nations à entretenir une armée et qu'on ne peut limiter leur présence", note Le Monde,

Ainsi, toute nouvelle loi allant à l'encontre de cet amendement, risque d'être retoquée par la Cour suprême, qui la déclarerait non constitutionnelle. 

Il fait face à un Congrès à majorité républicaine

Depuis les élections de mi-mandat en novembre 2014, les Républicains sont majoritaires au Sénat et à la Chambre des Représentants. Ces deux chambres forment le Congrès, qui vote et adopte les lois. Or, nombre d'élus républicains sont de fervents partisans du port d'armes, influencés par les lobbies, évoque Courrier International, opposés à tout encadrement de ce droit.

Le 17 avril 2013, quatre mois après le massacre des écoliers de l'école Sandy Hook, à Newtown (Connecticut), les Républicains ont ainsi fait capoter la réforme la plus ambitieuse du mandat de Barack Obama sur l'encadrement du port d'armes aux Etats-Unis, malgré le soutien de l'opinion publique, détaille Le Monde. Un résultat qualifié de "jour de honte pour Washington" par le président américainCette réforme aurait rendu obligatoires et systématiques, les vérifications d'antécédents judiciaires et psychiatriques des acheteurs d'armes, sur internet et dans les foires spécialisées. 

ll est combattu par les puissants lobbies des armes

Autre frein à l'action présidentielle : les puissants lobbies pro-armes. Le plus connu est celui de la National Rifle Association (NRA), fondé en 1871, qui milite depuis de nombreuses années pour le port d'armes. A l'aide de ses 4 millions d'adhérents et ses 11 000 instructeurs, elle possède une influence considérable sur les hommes politiques, par le biais de financement et de lobby. 

Par exemple, en 2012, la NRA a dépensé 32 millions de dollars en lobby politique, indique le Washington Post (en anglais), dont 700 000 dollars en financement direct aux candidats, 88% étant des Républicains. L'association possède aussi une remarquable capacité d'intervention dans l'espace public : "Ils (les membres de la NRA) ne travaillent jamais seuls. Quand ils voient monter un homme politique qui est contre les armes, ils vont travailler avec d'autres groupes conservateurs sur les questions de l'avortement, du mariage homosexuel, etc., pour proposer un adversaire à cet homme ou femme politique", analyse Vincent Michelot, spécialiste des Etats-Unis au Monde.

En 2011, David Keene, ancien président de la NRA, aurait même affirmé que Barack Obama était "l'homme à abattre" pour la présidentielle de 2012.

 

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