: Reportage "Moi, je ne vois pas de crise en Turquie" : avant les élections, la base électorale du président Recep Tayyip Erdogan défend son action
La place Bahçecik de Trabzon, c’est un peu la Sainte-Trinité d’Emin, fervent défenseur du président Erdogan. La mosquée, le bureau du chef de quartier tenu par l’AKP et le salon de thé, "tout est au même endroit, résume-t-il. Cette proximité nous permet de nous réunir après la prière, autour d’un thé, on discute de politique." Ces lieux sont réservés aux hommes par tradition. Et par réflexe, ils ne critiquent jamais Recep Tayyip Erdogan dans leurs échanges. Une partie de sa base électorale conservatrice se trouve ici, sur les bords de la mer Noire, dans le fief familial et lui avait permis de gagner la dernière élection, en 2018. Elle jouera un rôle dans les élections présidentielle et législatives dimanche 14 mai en Turquie.
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Emin ne voit pas pourquoi son président serait responsable d’une inflation qui dépasse les 100 %. "Il y a une crise mondiale, mais on s’en sort mieux que le reste du monde. On a même dépassé cette crise. Moi, je ne vois pas de crise en Turquie. Il y a tout, on peut tout acheter. Oui, il y a de l’inflation, mais dans le même temps, le gouvernement augmente nos salaires, donc on n’en ressent pas les effets."
Des mosquées et des routes supplémentaires
L’épouse d’Emin, Aisha, ne travaille pas. Elle le regrette, mais s’en accommode. Elle dit ne pas s’intéresser aux droits des femmes. Ce qu’elle retient de l’action de Recep Tayyip Erdogan tourne essentiellement autour de la religion. "Il a construit beaucoup de mosquées, il y en a partout, explique Aisha. Parfois, ça provoque la colère des gens. Ils disent qu’il ne construit que des mosquées et rien d’autre. Ils disent qu’il ne met pas assez de services publics en place. Je ne comprends pas cette attitude. Il en faut encore, c’est une bonne chose d’avoir des mosquées."
La réforme du système de santé et des routes toutes neuves sont des arguments qui tournent en boucle chez les partisans de Recep Tayyip Tayyip Erdogan, comme ils l’appellent par son deuxième prénom. Fatma ressasse aussi des peurs irrationnelles en cas de défaite de Recep Tayyip Erdogan. "Si Kilicdaroglu gagne, on ne va pas avancer. Il va fermer les hôpitaux, on va manquer de produits alimentaires, ce sera fini la prospérité. Peut-être aussi que nous aurons la guerre avec des terroristes en liberté."
"Le pays va s'effondrer"
Il y a de la fébrilité, certains militants encartés avouent qu’ils voteront Erdogan à la présidentielle, mais pas aux législatives. "Le pays va s'effondrer, craint Sezaie Özturk, le responsable AKP d’un quartier de Trabzon. On a peur de perdre tous les services qu'Erdogan a mis en place ici parce que c'est sa région de naissance." Comme si Recep Tayyip Erdogan était devenu plus fort que son parti. Avec cet inconvénient : le sentiment d’oubli que ressentent, jusque dans son propre fief, les partisans du président sortant.
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