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L’Arabie Saoudite tente d’unifier les rangs d’une opposition syrienne morcelée
Fragmentée sur le terrain et divisée à l’étranger, l’opposition syrienne se réunit en Arabie Saoudite pour tenter d’élaborer une plateforme commune de sortie de crise. Première rencontre du genre depuis le début du soulèvement contre le régime, elle se heurte déjà à deux écueils: la question cruciale de l’avenir du président Assad et le rejet par l’Iran d’une telle initiative.
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Sous les auspices du royaume saoudien, une centaine de représentants de l’opposition politique et militaire au régime de Bachar al-Assad vont se réunir au cours des deux ou trois jours qui viennent à Ryad.
Leur objectif, unifier leurs positions en vue des négociations avec Damas, prévues par le calendrier établi à Vienne à la mi-novembre par les diplomates de 17 pays.
Premier rassemblement du genre depuis 2011
En l’absence de Daech et du Front al-Nosra, la branche syrienne d’al-Qaïda, exclus pour cause de «terrorisme», et des groupes Kurdes, tout simplement non conviés, les organisations invitées dans la capitale saoudienne se présentent en ordre dispersé à ce rassemblement. Premier du genre depuis le début du soulèvement populaire contre le régime, en mars 2011, et dont la répression a fait plus de 250.000 morts et quelque 150.0000 disparus à ce jour.
La Coalition nationale syrienne (CNS), principal regroupement d’opposants à l’étranger basé en Turquie, a annoncé sa participation à hauteur de 20 délégués. Issue de groupes politiques et ethniques variés, cette formation a été reconnue à sa création par 120 pays comme «unique représentant du peuple syrien».
La Coalition nationale syrienne craint une demande de maintien de Bachar al-Assad
Même si un de ses membres, Samir Nashar, parle d’une «mission risquée et difficile», un autre, Hicham Marwa, se dit lui «optimiste en raison de la participation de personnalités militaires et politiques» aux discussions.
Le CNS souhaite en effet parvenir à «une position claire et commune concernant l’avenir de la Syrie, la transition et le sort du président Assad», mais craint que «certains participants proches de pays soutenant le régime ne réclame le maintien de Bachar durant la transition».
En effet, regroupée sous l’appellation Comité de coordination pour le changement national et démocratique, l’opposition basée en Syrie et tolérée, non sans quelques arrestations par le régime, a déjà fait prudemment savoir que le sort de Bachar devait être décidé par le peuple syrien.
Réunissant quelque 150 opposants de l’intérieur et de l’extérieur, la formation dite de «la Conférence du Caire», où elle est née en janvier 2015, se montre aussi timorée. Emmenée par un opposant de longue date, Haytham Manna, elle avait annoncé qu’elle enverrait 20 représentants à Ryad.
Elle a ensuite annoncé son retrait des discussions en raison de l’invitation adressée au puissant groupe Ahrar al-Sham, allié à une branche d’al-Qaïda. Haytham Manna s’est même dit «pessimiste», accusant l’Arabie Saoudite de chercher à marginaliser les factions modérées.
La participation des groupes armés demeure floue
Si Ahrar al-Sham a refusé de confirmer son invitation, la formation rebelle Jaïch al-Islam a annoncé qu’elle enverrait deux délégués à la conférence qui doit débuter le 9 décembre, en principe. Groupe armé très plus puissant dans la région de Damas et sa banlieue, la Ghouta orientale, Jaïch al-Islam entretient des liens étroits avec l’Arabie Saoudite.
Le Front du Sud, coalition de groupes modérés soutenue par les Occidentaux, est également convié à la réunion. Mais lui aussi s’est refusé à confirmer sa participation.
A tout ce monde vient s’ajouter une quinzaine de représentants de groupes armés dont l’identité demeure inconnue, ainsi que quelques hommes d’affaires et militants indépendants dont les noms n’ont pas été dévoilés.
Au flou qui entoure et menace déjà la rencontre, un autre facteur est venu renforcer les chances de son échec. La télévision d’Etat iranienne a fait savoir début décembre que la République Islamique était hostile à la réunion des groupes d’opposition syriens que veut organiser l’Arabie Saoudite.
Bachar al-Assad une ligne rouge pour Téhéran
La principale explication à ce blocage se trouve sans doute dans les déclarations du conseiller en politique étrangère du guide suprême, Ali Khamenei, avant de nouvelles négociations sous l’égide de l’ONU.
«Bachar al-Assad est la ligne rouge pour la République islamique d’Iran parce qu’il a été élu par le peuple syrien», a prévenu Ali Akbar Velayati. «Le peuple syrien doit décider lui-même de son avenir et personne en dehors des frontières de la Syrie ne peut choisir à sa place», a-t-il ajouté sans préciser toutefois quand ni comment.
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