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Opération "ciblée" d'Israël sur l'hôpital al-Chifa : "Une façon de dire que l'armée israélienne respecte les lois de la guerre", selon le général Dominique Trinquand

L'armée israélienne a lancé une opération complexe pour déloger le Hamas du plus important hôpital de Gaza sous lequel il se terre. Elle a laissé une porte de sortie pour les réfugiés mais ces derniers sont empêchés par le Hamas qui s'en sert comme "boucliers humains", selon l'ancien chef de mission à l'ONU.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le général Dominique Trinquand, ancien chef de la mission militaire française auprès de l'ONU à New York, le 19 avril 2023 sur franceinfo. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

L'armée israélienne a annoncé mercredi 15 novembre mener une opération "ciblée" contre des membres du Hamas au sein de l'hôpital al-Chifa dans la Bande de Gaza. Annoncer à l'avance l'attaque, "c'est une façon de dire" qu'Israël "respecte les lois de la guerre", a expliqué sur franceinfo le général Dominique Trinquand, ancien chef de la mission militaire française auprès de l’ONU. Pour l'ancien militaire, "cet hôpital est utilisé par le Hamas pour protéger son PC", ce qui "est totalement interdit dans le droit de la guerre", affirme-t-il. Des milliers de Gazaouis se sont réfugiés au sein de cet hôpital, le plus important de Gaza. Les deux camps mènent également une guerre de communication. Le Hamas utilise la présence des réfugiés comme "boucliers humains", mais aussi "pour montrer qu'Israël cible les civils", a-t-il expliqué.

franceinfo : Pourquoi cet hôpital se retrouve-t-il ainsi au cœur du conflit ?

Dominique Trinquand : Parce que cet hôpital est utilisé par le Hamas pour protéger son PC. Je ne dis pas qu'il est dans l'hôpital, mais probablement en dessous. Ce sont des informations qu'on a depuis très longtemps. En 2014, déjà, on avait entendu cette dénonciation.

"Le Hamas utilise les hôpitaux pour se protéger ce qui est totalement interdit dans le droit de la guerre, mais ce qui lui permet de s'abriter derrière les populations civiles et derrière un hôpital, le plus important de la région et qui est protégé normalement par les conventions de Genève."

Général Dominique Trinquand, ancien chef de mission à l'ONU

à franceinfo

Ce sont des renseignements américains et israéliens qui sont partagés depuis plusieurs années et partagés par les Gazaouis. Tout le monde le sait.

Israël parle d'un site militaire stratégique. Cela veut dire qu'il y a des armes, des commandements ?

Il y a probablement des commandements. Israël a publié des images en trois dimensions de ce que cela pourrait être. Je suis beaucoup plus prudent sur ce qui a été produit, mais on est certain qu'il y a un PC à l'intérieur en dessous de l'hôpital avec des ramifications dans les tunnels qui vont autour.

Il y a des milliers de personnes qui se sont réfugiés dans cet hôpital. Sur le plan opérationnel, c'est une mission délicate pour Israël ?

Effectivement, c'est très complexe parce qu'Israël veut essayer de faire le moins de dégâts possibles dans la population. Israël a entouré l'hôpital en laissant une porte de sortie. Elle a demandé aux gens de partir, en particulier à tous les réfugiés qui étaient dans l'hôpital. Ils ont essayé de sortir avec des drapeaux blancs et puis probablement le Hamas leur a tiré dessus. Ils ne sont pas sortis et continuent à jouer leur rôle de boucliers humains. Le deuxième point, l'hôpital n'a pas été bombardé. Il y a eu des bombardements qui ont eu lieu autour, mais pas dans l'hôpital parce qu'il faut préserver les vies à l'intérieur de l'hôpital. Le troisième point, c'est qu'il va falloir dissocier les équipes qui vont aller chercher probablement sous l'hôpital, les infrastructures du Hamas et des équipes qui vont aller dans l'hôpital pour à la fois s'occuper des malades, mais vérifier qu'il n'y a pas de terroristes du Hamas qui sont à l'intérieur de l'hôpital.

Israël a prévenu de ses intentions de prendre d'assaut l'hôpital. Ce sont les codes de cette guerre ?

Oui. Israël prévient qu'elle va attaquer. C'est une façon pour elle de dire qu'elle respecte les lois de la guerre et qu'elle prévient les populations civiles pour qu'elles ne soient pas sous les coups de Tsahal. Ça se fait depuis le début. Dans ce cas précis, évidemment, c'est contre-intuitif parce qu'il n'y a pas d'effet de surprise pour l'attaque.

Le monde entier regarde ce conflit. L'enjeu informationnel est très important, ainsi que la manière dont l'opération est relatée dans les médias. Les deux parties font très attention à ce qu'elles disent ?

Bien évidemment, mais d'une certaine façon, le Hamas est dans l'offensive. Il sait qu'il y a des populations civiles. Il l'utilise dans sa communication pour montrer qu'Israël cible les civils. Alors qu'il faut bien se souvenir que si l'hôpital est attaqué, c'est parce que c'est le Hamas qui l'a utilisé comme PC. Du côté israélien, on fait très très attention pour montrer à la population mondiale toutes les précautions qu'ils prennent dans l'assaut de cette structure du Hamas.

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