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Gaza. A quoi le conflit entre Israël et le Hamas a-t-il servi ?

L'accord passé entre les deux protagonistes a mis un terme à une semaine d'hostilités meurtrières. Quelles sont les avancées obtenues par les deux camps ?

Article rédigé par Violaine Jaussent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Des soldats réservistes israéliens quittent la frontière entre Israël et la bande de Gaza, le 22 novembre 2012, après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu. (MENAHEM KAHANA / AFP)

GAZA - Après une semaine d'hostilités meurtrières entre Israël et le Hamas, une trêve a été conclue dans la bande de Gaza. Le cessez-le-feu est entré en vigueur mercredi 21 novembre à 21 heures (20 heures à Paris), mettant fin aux raids israéliens et aux tirs de roquettes palestiniens, qui ont causé la mort de 163 Palestiniens et 6 Israéliens. Quel est le résultat de cette confrontation ? Voici les avancées obtenues par les deux camps et les artisans de la trêve. 

Côté israélien, plus de "fermeté" en vue des législatives

Sept jours après avoir déclenché l'opération "Pilier de défense", le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a finalement abandonné l'idée d'une opération terrestre de grande envergure dans la bande de Gaza. "L'armée israélienne a rempli les objectifs qu'elle s'était fixés (...) et a infligé des dégâts considérables au Hamas et à ses capacités militaires", a indiqué l'armée israélienne, peu après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu.

"Avec cette opération, le gouvernement israélien a montré au Hamas quelles sont les lignes rouges à ne pas franchir", analyse pour francetv info Pierre Razoux, directeur de recherche à l'Institut de recherche stratégique de l'Ecole militaire (Irsem) et auteur de Tsahal, nouvelle histoire de l'armée israélienne (éditions Perrin, 2008). Selon lui, "Benyamin Netanyahu fait aussi preuve de fermeté" en prévision des élections législatives du 22 janvier. D'autant plus que le calendrier électoral s'accélère dès dimanche avec les primaires pour désigner les candidats à la députation du Likoud, le parti de droite du Premier ministre. A partir de lundi, ce sera au tour du Parti travailliste (centre-gauche) de choisir ses candidats.

Mais le cessez-le-feu laisse un goût amer à l'opposition. "La sécurité des habitants du sud d'Israël n'a pas été rétablie, ni notre force de dissuasion", a déploré le chef du parti centriste Kadima. De son côté, une dirigeante travailliste a fait part de ses doutes, déclarant ne pas être certaine du succès de "Pilier de défense". "Le véritable effet de l'opération sera testé aux élections. Si le calme revient (...) Netanyahu et Lieberman [le ministre des Affaires étrangères] seront les grands vainqueurs", résume le commentateur Mazal Mualem, dans le quotidien Maariv, traduit par l'AFP.

Pour le Hamas, une crédibilité renforcée

Pour sa part, le Hamas, qui contrôle la bande de Gaza depuis 2007, considère cette trêve comme une "victoire". Le chef du gouvernement du mouvement islamiste, Ismaïl Haniyeh, s'est dit "satisfait". Il a décrété jeudi jour férié et a "invité tous les citoyens à fêter cet événement et à rendre visite aux familles des martyrs et aux blessés". Ce que les habitants de la ville de Gaza ont fait dès mercredi soir.

Des Palestiniens célèbrent le cessez-le-feu dans la ville de Gaza, le 21 novembre 2012. (MAHMUD HAMS / AFP)
 

"Les autorités du Hamas ont l'impression d'être plus fortes que lors de l'opération Plomb durci à l'hiver 2008-2009 [au cours de laquelle Israël avait lancé une attaque terrestre dans la bande de Gaza]. Après avoir négocié pour la première fois avec le Hamas pour la libération du soldat israélien Gilad Shalit, Israël a accepté de recommencer mercredi pour parvenir à un accord de cessez-le-feu, explique Pierre Razoux. Le mouvement islamiste devient donc un interlocuteur direct pour le gouvernement israélien, ce qui renforce le poids du Hamas côté palestinien."

De fait, le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a reconnu cette légitimité en félicitant jeudi depuis le siège de l'Autorité palestinienne à Ramallah (Cisjordanie), le chef du gouvernement du Hamas à Gaza pour sa "victoire" après la conclusion du cessez-le-feu. De leur côté, Ismaïl Haniyeh et deux autres dirigeants du Hamas ont apporté leur "soutien à l'initiative nationale pour demander le statut d'Etat observateur à l'ONU le 29 novembre", un projet officialisé par Mahmoud Abbas le 27 septembre à la tribune des Nations unies.

Pourtant, les deux organisations se livrent depuis plusieurs années une bataille de leadership pour représenter les Palestiniens. Lutte qui pose aussi problème au gouvernement israélien. "Pour Israël, la question principale, qui est de savoir avec quelle direction palestinienne négocier, n'est pas résolu, souligne Pierre Razoux. Israël se retrouve coincé entre l'Autorité palestinienne et le Hamas."

Un président égyptien conforté dans son rôle de médiateur

Le président islamiste égyptien, Mohamed Morsi, sort lui aussi renforcé de ses efforts cruciaux pour obtenir un cessez-le-feu à Gaza. Ils ont été salués par la communauté internationale. "C'était le premier grand test pour Mohamed Morsi, et il s'en tire bien. Il a mené la négociation de manière équilibrée", a expliqué El-Sayyed Amine Shalabi, qui dirige le Conseil égyptien des Affaires étrangères, un centre d'études.

Mais l'équation reste difficile. L'opinion égyptienne est massivement en sympathie avec la cause palestinienne. Mohamed Morsi doit donc se démarquer de son prédécesseur Hosni Moubarak, très critiqué dans l'opinion égyptienne pour sa politique jugée trop conciliante avec Israël. Tout en maintenant le crédit de médiateur que l'Egypte a hérité de ses accords de paix conclus en 1979 avec l'Etat hébreu.

"Dans la médiation pour la trêve, l'Egypte a quand même réussi à jouer son rôle d'acteur régional et les Etats-Unis celui de grande puissance, deux facteurs majeurs pour obtenir un cessez-le-feu solide", estime Pierre Razoux. Les jours qui suivent son entrée en vigueur seront décisifs pour savoir si la trêve tiendra. Mais Israël et le Hamas ont déjà en tête l'étape suivante. Comme l'explique le commentateur militaire Yoav Limor dans le quotidien Maariv, ils ont compris "que le compte à rebours pour la prochaine épreuve de force a déjà commencé". 

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