Témoignage Guerre en Ukraine : "Mes bras et mes jambes étaient brûlés, mon visage était déchiqueté", raconte un démineur grièvement blessé par les mines russes

Plus de 240 Ukrainiens, civils et militaires, ont été tués par des mines depuis le début de l’invasion russe. Il y en a 500 qui ont été blessés, souvent grièvement, comme Vladyslav Yeshenko, que nous avons rencontré à Kiev. Il a perdu la vue lors d’une intervention.
Article rédigé par Boris Loumagne
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Un membre d'une unité de déminage ukrainienne recherche des explosifs près d'Izyum, dans l'est de l'Ukraine, le 1er octobre 2022. Photo d'illustration. (JUAN BARRETO / AFP)

C'était en plein mois d'août, il y a un an. Il faisait chaud ce jour-là près de Bakhmout, à l'est de l'Ukraine. Et pourtant, "la dernière chose que j'ai dite avant de m'évanouir, c'est : 'J'ai très froid'," raconte Vladyslav Yeshenko. Il est en état de choc à ce moment.

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Quelques instants plus tôt, le jeune homme de 25 ans déminait un champ de blé : "J'étais en train de m'occuper des dernières mines et l'une d'entre elles s'est déclenchée. Et puis, les 84 mines du terrain ont explosé. Je n'entendais plus personne, je ne voyais plus rien. L'explosion m'a projeté en arrière." Il explique alors : "Mes bras et mes jambes étaient brûlés, mon visage était déchiqueté."

"Elles sont semées comme des graines"

Vladyslav s'en sort miraculeusement, mais il perd la vue, la faute à ces mines anti-personnel fréquemment utilisées par les Russes : "Dans une roquette, il peut y avoir plus de 300 mines. Une fois en vol, une partie de la roquette s'ouvre et les mines tombent par terre. Elles sont semées comme des graines. Et après la première pluie, elles s'enfoncent dans la terre ou elles tombent dans les feuilles et deviennent invisibles." 

Vladyslav Yeshenko, démineur ukrainien, a été grièvement blessé lors d'une intervention près de Bakhmout. À Kiev, septembre 2023. (BORIS LOUMAGNE / RADIOFRANCE)

Près d'un demi-million de mines trouvées dans les zones libérées

En Ukraine, la contre-offensive continue de progresser, mètre après mètre, sur le front du sud essentiellement. Mais les forces de Kiev sont ralenties par les fortifications mises en place par la Russie, et par les mines. On estime qu'aujourd'hui, près de 30% de la surface du pays sont minés.

Déminer toutes ces zones est un travail titanesque et qui prend beaucoup de temps. "En arrivant sur les territoires libérés, il y a une diversité de menaces : des mines anti-personnel, anti-char, des munitions qui n'ont pas explosé, des mines surprises, des mines pièges", indique Vladyslav Yeshenko.

"Chaque fois que nos gars avancent, ils se heurtent à des mines posées de manière vicieuse, comme des mines cachées sous les cadavres. Et ça ralentit énormément notre avancée. "

Vladyslav Yeshenko, démineur ukrainien

à franceinfo

Ces derniers mois, les démineurs ukrainiens ont trouvé près d'un demi-million de mines dans les zones libérées. Et ce n'est que le début. "Il faudra plus d'un siècle pour nettoyer complètement l'Ukraine, affirme Vladyslav Yeshenko. La plupart des mines, celles sur les cartes militaires, c'est plus facile à trouver. Mais il y a des menaces plus difficiles à repérer. Par exemple, des mines qui ressemblent à des aérosols. Un civil ne verra pas ça comme un danger et pourra se blesser ou y laisser la vie."

Vladyslav Yeshenko vient de créer une association qui récolte des fonds pour soigner au mieux les personnes blessées, comme lui, par ces engins explosifs.

Vladyslav, démineur ukrainien, a été grièvement blessé lors d'une intervention - Boris Loumagne et Yashar Fazylov

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