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Reportage Guerre en Ukraine : malgré les files de camions et les jours d'attente, les ports du Danube sont devenus les issues de secours pour exporter les céréales

Pour éviter le blocus des ports de la mer Noire, les transporteurs se tournent vers trois ports encore ouverts le long du Danube pour pouvoir exporter notamment leurs céréales. Mais l'attente est longue pour décharger sa marchandise. Illustration à Réni. 

Article rédigé par franceinfo - Valentin Dunate et Fabien Gosset
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
À Réni, des milliers de camions attendent parfois plusieurs semaines pour décharger leurs marchandises, 10 juillet 2022. (VALENTIN DUNATE / RADIO FRANCE)

"Le jeu de la Russie, c'est d'affamer le monde." Le chef du ministère ukrainien des Affaires étrangères condamne - une nouvelle fois - au G20 le blocus naval de ses ports. L'Ukraine a, malgré tout, réussi à augmenter ses exportations de céréales de 25% au mois de juin 2022 et ce, principalement grâce à des ports situés le long du Danube. Car le fleuve est aujourd'hui l'issue de secours. Ses trois ports : Réni, Izmaïl et Kiliia (Oust-Dounaitsk) représentent désormais plus de la moitié des exportations de céréales.

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À Réni, il y a des milliers de camions et autant de chauffeurs qui attendent plusieurs jours, voire plusieurs semaines pour décharger leurs marchandises. Le camion de Yuri est rempli de 24 tonnes de soja. Cet homme de 45 ans vient de la région de Soumy, une ville du nord du pays située à plus de 15 heures de route. Il ne sait pas du tout combien de temps il va devoir patienter et nous explique que ça dépend du type de grain. En l'occurrence pour le soja, les autres chauffeurs lui ont glissé qu'il allait sûrement devoir patienter un mois pour décharger son camion.

À quelques mètres de là, un autre Youri, lui, vient de la ville de Tchernomorsk près d'Odessa. Dans sa remorque : du maïs. "Ça fait cinq jours que je suis là et je pense que je vais devoir attendre encore deux ou trois jours minimum, explique Youri. Alors oui, ça n'est pas vraiment confortable, mais on n'a pas le choix, on doit aider notre pays à exporter ce grain pour l'Ukraine, mais aussi pour éviter la famine à d'autres pays."

Un chemin insuffisant pour compenser la fermeture des ports de la mer Noire

Les Ukrainiens redoublent d'effort pour trouver des solutions avec "des soldats de la logistique", comme le dit Dmitro Barinov, responsable du réseau des ports ukrainiens, mais tout cela a un prix : "Avant, par exemple, pour transporter des grains de Soumi à Réni, cela coûtait par exemple 1 000 dollars et maintenant c'est 1 500 ! Parce qu'il faut couvrir ce temps d'attente et ça explique en partie l'inflation constante des prix des céréales." Dmitro Barinov explique que ces ports du Danube exportent désormais trois fois plus de céréales qu'au mois de février, mais ça ne suffit pas à compenser la fermeture des ports de la mer Noire.

"C'est une situation très dangereuse : pas uniquement pour l'Ukraine, mais pour le monde. De nombreux pays dépendent de nos exportations. La Russie le sait parfaitement et elle continue ce chantage."

Dmitro Barinov, responsable du réseau des ports ukrainiens

à franceinfo

Une fois que les camions ont déchargé leurs marchandises, Il y a alors deux façons d'exporter. Tout d'abord, par les navires de mer qui vont dans la mer Noire via le canal de Sulina. Mais ces bateaux sont petits à cause de la profondeur de 7 m du canal. Deuxième option : par les péniches fluviales qui chargent les céréales dans ces trois ports, et qui vont ensuite du Danube à Constanza en Roumanie, où d'énormes paquebots chargent alors jusqu'à 50 000 tonnes de céréales.

Depuis plusieurs semaines, avec la guerre en Ukraine, ce port du Danube ne désemplit pas. (VALENTIN DUNATE / RADIO FRANCE)

Moscou affirme qu’elle autorisera les navires ukrainiens chargés de produits alimentaires à appareiller si l'armée ukrainienne démine ses ports, ce que Kiev, qui craint pour la sécurité de ses côtes, refuse d’envisager. Avant la guerre, l'Ukraine exportait 20 millions de tonnes de blé et 27,5 millions de tonnes de maïs par an, selon un rapport du ministère américain de l'Agriculture.

Le Danube devenu l'issue de secours pour les céréales ukrainiennes - Le reportage de Valentin Dunate

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