Cet article date de plus d'un an.

Guerre en Ukraine : pourquoi ne sait-on toujours pas qui bombarde la centrale nucléaire de Zaporijjia ?

Les derniers réacteurs de la centrale de Zaporijjia en Ukraine ont été déconnectés du réseau électrique ukrainien suite à un incendie. Russes et Ukrainiens s'accusent mutuellement de viser le complexe depuis des semaines. Qu'en est-il ? 

Article rédigé par franceinfo - Eric Biegala
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
La centrale nucléaire de Zaporijjia, le 27 avril 2022 (ED JONES / AFP)

Depuis six mois et le déclenchement du conflit, c'est sans doute l'un des sites les plus scrutés d'Ukraine : la centrale nucléaire de Zaporijjia, la plus grande d'Europe. Depuis plusieurs semaines, signe de la fébrilité autour du site, la centrale ukrainienne, occupée par l'armée russe, est régulièrement déconnectée du réseau électrique "après de nouveaux bombardements dans la zone", selon l'Agence internationale de l'énergie atomique. Mais la centrale continue cependant à fonctionner "grâce à une ligne de secours". D'ailleurs, l'AIEA doit rendre mardi 6 septembre un rapport sur la situation de la centrale, et faire le point sur le risque radiologique depuis des mois.  

Reste pourtant une question-clé : pourquoi ne sait-on pas officiellement qui bombarde le site stratégique du sud de l'Ukraine ? Dans les faits, il est difficile de savoir d'où viennent exactement les bombardements. Les personnels ukrainiens, qui font tourner les réacteurs sous la férule des autorités russes, ont, à plusieurs reprises, accusé directement la Russie d'être responsable de ces tirs d'artillerie. Ces bombardements ont lourdement endommagé les conduits d'alimentation électriques. 

>> Guerre en Ukraine : suivez l'évolution de la situation en direct

Les Ukrainiens semblent également avoir visé quelques objectifs à proximité immédiate avec leurs drones, beaucoup plus précis. Il faut dire que la centrale elle-même, comme ses environs, sont truffés de matériels militaires russes qui bombardent entre autres la ville de Nikopol, de l'autre côté du Dniepr. Malgré tout, il est difficile de voir quel intérêt auraient les Ukrainiens à s'attaquer à une centrale qui continue à fournir de l'énergie au pays. Avant-guerre, la centrale de Zaporijjia produisait jusqu'à 20% de l'électricité consommée en Ukraine.

En revanche, il y a pour les Russes un intérêt immédiat à couper les lignes d'alimentation et de desserte de la centrale et à l'isoler du réseau ukrainien. C'est l'indispensable première phase pour pouvoir à terme reconnecter les 6 réacteurs au réseau russe et alimenter en électricité notamment la Crimée qu'ils occupent depuis 2014.

Un risque d'accident important

Ces bombardements font craindre dans le monde un accident majeur. Les réacteurs eux-mêmes sont protégés par une enceinte de confinement à l'épreuve des bombes. En la matière, ce n'est pas tant les bombardements en soi qui sont dangereux, mais bien plutôt les ruptures d'alimentation en électricité. Le fait d'isoler la centrale du réseau ukrainien empêche l'alimentation normale des circuits de refroidissement des réacteurs. Le réacteur n°6, encore en fonction, ne semble plus pouvoir compter que sur lui-même pour faire fonctionner les pompes des circuits de refroidissement.

Il y a également des générateurs d'urgence, fonctionnant au diesel, mais on ne connaît pas leur état, on ne sait même pas s'ils sont fonctionnels. Or, si le circuit de refroidissement d'un réacteur ne fonctionne plus, le risque est immédiat. Le cœur du réacteur se met à fondre en moins d'une heure et demi. Ce serait un accident du type de celui de Fukushima au Japon en 2011. Pour le moment, nul ne connaît le temps que mettront les Russes pour reconnecter la centrale à leur réseau et faire ainsi main basse sur la plus importante centrale nucléaire en Europe.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.