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Accord post-Brexit : "les deux parties sont gagnantes", analyse une chercheuse de l'institut Jacques Delors

En fixant un cadre à leurs relations futures, l'Union européenne et le Royaume-Uni évitent "le scénario noir du 'no deal'", explique Elvire Fabry, chercheuse en charge de la politique commerciale et du Brexit à l'institut Jacques Delors.

Article rédigé par franceinfo - propos recueillis par Florence Morel
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Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, lors d'une rencontre à Bruxelles, le 9 décembre 2020. (COMMISSION EUROPEENNE / AFP)

"Nous pouvons finalement laisser le Brexit derrière nous." Les dirigeants européens et britanniques ont affiché leur soulagement, jeudi 24 décembre. Londres et Bruxelles ont finalement trouvé un accord sur leurs futures relations commerciales, a annoncé Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne. Une issue qui évite le redouté "no deal" à l'issue de la période de transition qui s'achèvera au soir du 31 décembre, un an après la sortie officielle du Royaume-Uni de l'Union européenne.

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Elvire Fabry, chercheuse en charge de la politique commerciale et du Brexit à l'institut Jacques Delors, décrypte cet accord pour franceinfo.  

Franceinfo : Comment est-on parvenu à un accord après dix mois de négociations ?

Elvire Fabry : La négociation qui a été engagée concerne beaucoup plus d'enjeux que le simple fait d'éviter un retour de tarifs douaniers et de quotas. C'est une prouesse d'avoir réussi à négocier cet accord en aussi peu de temps, alors que les accords commerciaux, en règle générale, peuvent prendre plusieurs années. Il va falloir attendre de voir concrètement ce qu'il y a dans cet accord, puisqu'il est long de presque 2 000 pages.

Il semble qu'un certain nombre de chapitres aient avancé au cours de ces derniers jours – suffisamment pour constituer une base solide pour les négociations. Les contentieux les plus importants ont été gardés pour la fin, notamment ceux qui concernaient les conditions d'une concurrence équitable, la mise en place d'un mécanisme de règlement des différends et la question de la pêche.

Les négociateurs sont apparus très heureux à l'issue de ces négociations. Qu'en est-il vraiment ? Existe-t-il un gagnant et un perdant avec cet accord ?

Comme les deux parties étaient perdantes, à travers cet accord, les deux parties sont désormais gagnantes. En cas de "no deal", on partait sur des frictions et un manque de visibilité maximum sur tous les dossiers. On précipitait tous les acteurs économiques et tous les citoyens qui ont un lien avec le Royaume-Uni dans l'inconnu total. Dans un premier temps, cet accord donne un cadre pour une coopération future, ce qui est très important, et permet d'éviter le scénario noir du "no deal".

On s'est occupé du plus urgent. On a beaucoup parlé du fait d’éviter le retour des tarifs et des quotas, etc. Mais il y avait beaucoup de questions en suspens comme celle du transfert de données. Ont-ils réussi à faire quelque chose en matière de services ? De lutte contre le terrorisme ? En tout cas, cet accord va créer un esprit de coopération plus fort que si nous étions restés sur un scénario de "no deal", qui aurait détérioré encore plus le peu qu'il restait de confiance mutuelle.

Quelles sont les prochaines étapes dans les jours à venir ?

D'abord, les 27 Etats membres doivent voter l'accord, mais il n'y aura pas de réunion exceptionnelle des chefs d'Etats et de gouvernement dans les quatre jours à venir, donc cela se fera par courrier juridique. Cette validation de l'accord par le Conseil doit être obtenue avant le 31 décembre. Mais le toilettage juridique d’un accord est un processus qui prend beaucoup de temps normalement. Il existe donc une zone grise sur le texte qui sera validé par les 27.

La question se pose également du côté britannique, puisque Boris Johnson avait retiré la compétence de discussion des négociations à ses parlementaires. Pourtant, ces derniers doivent quand même valider le texte. Alors, quelle visibilité auront-ils ? Le texte est très long et, encore une fois, la relecture juridique ne sera pas achevée…

Côté britannique, il faut donc que la Chambre des communes et la Chambre des Lords votent ce texte, puis que la Reine le valide. Si c'est le cas, le texte entrera en application provisoire à partir du 1er janvier 2021. Ensuite, ce sera au tour des parlementaires européens de l'approuver, début 2021.

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