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L'Autriche pourrait élire le premier chef d'Etat d'extrême droite européen
Les Autrichiens votent à nouveau pour élire leur président le 4 décembre 2016. Une première élection, le 22 mai, a été invalidée par la Cour constitutionnelle pour irrégularités dans le dépouillement. C'est ainsi que le vainqueur d'alors, l'écologiste Alexander Van der Bellen, 72 ans, se retrouve au coude-à-coude dans les sondages avec Norbert Hofer, 45 ans, issu du FPÖ, parti d'extrême droite.
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Pour arriver à ses fins et emporter la victoire à la présidentielle, M.Hofer, candidat du Parti de la liberté d'Autriche (FPÖ), eurosceptique et islamophobe, compte profiter de «l'effet Trump» et du post-Brexit. L'homme se présente comme un nationaliste proche du peuple, une sorte de «national-populiste», selon Patrick Moreau, auteur de L'Autriche des populistes.
Ni Marine Le Pen ni Donald Trump ne renieraient son programme xénophobe.
Le FPÖ, comme le futur président des Etats-Unis l'a fait durant sa campagne électorale ou le Front national en France le pratique depuis des années, profite des peurs d'une partie de la population au sujet du chômage et de l'immigration, ainsi que de la colère contre la classe politique dominante en général.
Une main de fer dans un gant de velours
Ses déclarations sur la menace représentée par l'arrivée de migrants musulmans ont fait les titres de la presse mais la progression du FPÖ est perceptible depuis des années et ne résulte pas seulement de la récente crise migratoire.
Cependant, rien de jamais agressif ou violent dans les propos de Norbert Hofer. Ce dernier a pris soin de lisser son image et d'éviter toute saillie raciste. Courtoisie et amabilité font partie intégrante de sa campagne.
Historiquement, le FPÖ, créé en 1956, trouve ses racines dans l'immédiat après-guerre. Son premier dirigeant fut Anton Reinthaller, ancien nazi et ministre de l'Agriculture après l'annexion de l'Autriche par Hitler en 1938.
Des origines que le candidat d'extrême droite autrichien se garde bien de rappeler aujourd'hui. Mais il y a eu la déclaration fracassante sur Facebook, à quelques jours du scrutin, de Gertrude, déportée à 16 ans avec toute sa famille dans le camp d'Auschwitz, et seule rescapée.
Pour la vieille dame, Norbert Hofer a pour objectif de «faire ressortir le pire chez les gens».
Disparition des partis traditionnels en Autriche
Les deux candidats, l'extrémiste de droite Norbert Hofer et l'écologiste Alexander Van der Bellen, se retrouvent seuls à briguer la présidence à la faveur d'un effondrement des deux partis traditionnels, sociaux-démocrates du SPÖ et conservateurs de l'ÖVP, qui dominaient la vie politique autrichienne depuis la fin de la Seconde guerre mondiale.
Un changement profond du paysage politique qui en appellerait d'autres si M.Hofer était élu. Ainsi, il pourrait décider de mettre en œuvre toutes les prérogatives mises à la disposition du chef de l'Etat autrichien qui, d'ordinaire, se contente d'un rôle protocolaire. Et pourquoi pas destituer le gouvernement en place (dernière survivance d'une coalition conservateurs et sociaux-démocrates) et le remplacer par un cabinet dirigé par l'actuel patron du FPÖ, Heinz-Christian Strache?
Une hypothèse qui semble avoir été préparée de longue date par les deux dirigeants du parti, Strache se réservant pour la chancellerie, Hofer défendant les couleurs du FPÖ à la présidentielle.
De plus, les sondages créditent le parti d'extrême droite de 35% des intentions de vote en cas de législatives avant 2018.
Alors qu'en Autriche, pays de près de 9 millions d'habitants, la situation économique est florissante, l'électorat se focalise ici comme ailleurs en Europe sur les questions de la perte d'emploi, du déclassement, de la sécurité et de la conviction que l'évolution sociale, à travers la mondialisation, s'accomplit au détriment des gens ordinaires.
Favorable à l'Europe, Alexander Van der Bellen est un écologiste typique qui attire l'électorat féminin, éduqué et celui des grandes villes, dont Vienne, la capitale. Les électeurs de Norbert Hofer sont plus souvent des hommes, souvent d'extraction modeste, avec un faible niveau d'éducation.
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