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Pesticides : "La France doit continuer à s'opposer au glyphosate", réagit Delphine Batho, cobaye d'une nouvelle étude

Pour l'ex-ministre de l'Ecologie Delphine Batho, la responsabilité du retrait du glyphosate, cancérigène probable, revient aux multinationales et à la Commission européenne.

Article rédigé par franceinfo - Hugo Cailloux
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
La députée de la deuxième circonscription des Deux-Sèvres Delphine Batho, le 3 février 2015 à l'Assemblée nationale, à Paris. (CITIZENSIDE/JALLAL SEDDIKI / CITIZENSIDE)

Tous atteints par le glyphosate ? Une étude de l'association Générations Futures réalisée sur 30 personnes, dont plusieurs personnalités publiques, a révélé jeudi 6 avril la présence chez tous les participants de glyphosate. Cette substance, classée "cancérogène probable" par une agence de l'ONU, entre dans la composition d'herbicides comme le Roundup de Monsanto, le plus vendu au monde.

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Pour l'ex-ministre de l'Ecologie Delphine Batho, participante à cette étude de Génération Futures, il est urgent d'interdire la commercialisation de ce désherbant, qu'elle estime dangereux pour les agriculteurs. Franceinfo a recueilli la réaction de la députée après la publication des résultats.

Franceinfo : Selon les conclusions de cette étude, vous figurez parmi les personnalités présentant le plus fort taux de glyphosate dans les urines. Ce résultat vous a-t-il surprise ?

Delphine Batho : Hélas, non. Les résultats de mes analyses donnent 2,4 ng/ml d'urine. Je suis plutôt dans une fourchette haute. Il est difficile de savoir pourquoi, et de quels aliments provient ce glyphosate. Une partie substantielle de mon alimentation est bio. Pourtant, je n'ai pas échappé à la contamination, peut-être parce que je ne mange pas toujours chez moi.

De toute façon, il est difficile d'y échapper : le glyphosate est la substance numéro un dans les cours d'eau en France.

Delphine Batho

à franceinfo

C'est l'herbicide le plus vendu dans le monde. Je crois que si l'on faisait ces tests avec n'importe quel citoyen, on obtiendrait le même résultat.

Est-ce que cela vous inquiète ?

Ce qui me préoccupe, c'est la santé des agriculteurs. Des études montrent un lien entre le glyphosate et le lymphome non hodgkinien [un type de cancer qui concerne environ 10 000 personnes par an en France, ndlr]. Depuis 2015, ces lymphomes sont reconnus comme une maladie professionnelle par le régime social agricole. Sa dangerosité est également reconnue par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), qui avait classé en 2015 la substance comme "cancérogène probable" pour l'espèce humaine.

Or protéger la santé publique est un impératif. Les responsables du maintien du glyphosate sur le marché sont les multinationales, qui le fabriquent, et les pouvoirs publics européens, qui l'autorisent. La Commission européenne a attendu la décision d'un comité d'experts pour prendre une décision sur une éventuelle interdiction. Mais le comité est noyauté par les groupes d'intérêt pro-glyphosate.  [L'agence européenne des produits chimiques a classé le glyphosate comme non cancérogène le 15 mars dernier, ndlr]

En démocratie, les Etats ne doivent pas être inféodés à des lobbies et à des multinationales.

Delphine Batho

à franceinfo

Il faut se rappeler des "Monsanto Papers", qui ont révélé que depuis 1999, la firme américaine Monsanto a conscience des conséquences sur la santé du glyphosate, qu'elle commercialise sous le nom de Roundup.

N'avez-vous pas l'impression que l'opinion publique se désintéresse de ces questions ?

Je crois qu'au contraire, il y a de plus en plus d'initiatives pour l'interdiction de cette substance. Une pétition a recueilli plus de 600 000 signatures en Europe, dont plus de 50 000 en France. D'autres s'impliquent depuis longtemps dans le dossier. Par exemple, l'association Phyto-Victimes, qui défend les agriculteurs, se bat contre les pesticides depuis 2011.  

De son côté, le gouvernement français a pris position au niveau européen pour que l'autorisation de ce produit ne soit pas reconduite. Il faut que la France continue à s'y opposer. La position de Benoît Hamon, qui souhaite retirer les autorisations de tous les pesticides dangereux, va dans le bon sens.

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