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Infographies Extension, production, émissions... Plongée dans l'immense mine de charbon qui a rasé le hameau allemand de Lützerath

Des manifestants ont tenté de bloquer l'expansion de la mine de charbon de Garzweiler, située en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, l'un des plus gros sites miniers d'Europe.
Article rédigé par Camille Adaoust
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Les ruines du hameau de Lützerath (Allemagne) à côté de la mine de Garzweiler, le 18 janvier 2023. (FEDERICO GAMBARINI / DPA / AFP)

Des manifestants au bord d'immenses dunes de sable noir. Depuis plusieurs semaines, des activistes tentent de bloquer la démolition du village de Lützerath, en Allemagne. Menacé par l'extension de la mine d'extraction de charbon à ciel ouvert de Garzweiler, ce hameau a finalement vu ses dernières maisons finir rasées, mercredi 18 janvier. Les ruines, qui laisseront bientôt place aux excavatrices de lignite, paraissent bien petites à côté de la mine. Pas si surprenant, car le site est l'un des plus grands d'Europe. Voici trois infographies pour mesurer son ampleur, tant en superficie qu'en conséquences.

Un site qui s'est étendu au fil du temps

Du charbon sort du site de Garzweiler depuis plus de cent ans, d'après l'entreprise allemande propriétaire des lieux, RWE (lien en anglais). Situé entre Cologne et Düsseldorf, il fait actuellement "environ 35 km²", soit la superficie d'une ville comme Lille. Au fil des années, la mine à ciel ouvert s'est étendue et déplacée, engloutissant sur son passage plusieurs villages, comme le montre cette vue aérienne accélérée réalisée avec Google Earth, débutant en 1984 et finissant en 2020. "Dans le bassin rhénan, plus de 100 villages ont été démolis depuis la Seconde Guerre mondiale. On parle d'environ 40 000 personnes expulsées de leurs maisons", retrace pour franceinfo Dorothee Häussermann, activiste membre du collectif "Alle Dörfer bleiben" ("Tous les villages restent"), citant les chiffres de l'ONG de défense de l'environnement Bund (lien en allemand).

Le parcours de ce fossé géant devrait donc bientôt s'étendre plus à l'ouest, en direction de Lützerath, ou de ce qu'il en reste. La destruction de ce hameau pour agrandir la mine était "nécessaire pour exploiter la réserve de lignite à haute capacité pendant la crise énergétique", se justifie l'entreprise dans un communiqué (lien en anglais).

L'une des plus importantes mines d'Europe

Avant sa dernière extension, la mine de Garzweiler se classait déjà parmi les plus productives d'Europe. D'après un rapport (lien en anglais) publié en 2021 par le Centre commun de recherche de la Commission européenne, qui mesure les quantités produites par les différentes régions minières, 33,2 millions de tonnes de lignite sont sorties de la mine en 2018. Garzweiler se classe ainsi derrière les mines voisines de Hambach et Inden, et celle de Belchatow, en Pologne. Deux bassins miniers situés en Silésie (Pologne) et dans le Severozápad (République tchèque) arrivent également devant. Mais contrairement à Garzweiler, ils sont composés de plusieurs mines.

Une potentielle "bombe à carbone" pour le changement climatique

"Si RWE exploite les tonnes de charbon sous Lützerath, l'Allemagne violera forcément l'accord de Paris à cause des émissions de carbone de la mine. Le village n'est donc pas qu'un symbole, c'est un point critique dans la lutte contre le réchauffement", s'inquiétait auprès de l'AFP Alma, une militante opposée au projet d'extension présente lors des blocages de novembre dernier.

La mine de Garzweiler figure en effet sur la liste des 425 "bombes à carbone" potentielles recensées dans une étude publiée en 2022 dans la revue Energy Policy (lien en anglais). Les émissions de CO2 de ces 425 sites d'extraction de charbon, de pétrole et de gaz situés tout autour du monde sont telles qu'elles pourraient faire voler en éclats l'objectif de l'accord de Paris de limiter le réchauffement climatique à +1,5°C. Ainsi, d'après les chercheurs, la mine de Garzweiler pourrait à elle seule émettre 1,3 milliard de tonnes de CO2 pendant la durée de son exploitation. "Fermer les deux bombes à carbone en Allemagne, [avec celle de Hambach qui devrait émettre 1,7 milliard de tonnes de CO2] devrait être une priorité pour limiter le changement climatique", peut-on lire dans l'étude.

Propriétaire des deux sites, RWE a annoncé arrêter d'ici à 2030 la production d'électricité au charbon, dont la combustion est l'une des principales causes des émissions de gaz à effet de serre responsables du changement climatique. "La quantité de charbon pouvant être extraite de Garzweiler sera réduite de moitié environ", assure le groupe (lien en anglais). En attendant d'atteindre cet objectif, RWE est "depuis 2002, le premier énergéticien européen émetteur de CO2, avec 79 millions de tonnes de CO2 pour l'année 2021", note une étude du cabinet PwC publiée en novembre dernier.

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