COP28 : "Le réchauffement climatique s'établira en 2023 à 1,4°C au-dessus du niveau préindustriel", rapporte un responsable de l'Organisation météorologique mondiale
En 2015, les pays signataires de l'accord de Paris s'engageaient à limiter la hausse des températures. L'objectif affiché ? Tout faire pour que d'ici 2100, le mercure n'excède pas 1,5°C au-dessus de ce que connaissait la planète à l'ère préindustrielle. Or, les vagues de chaleur observées en 2023 partout dans le monde, sur la terre ferme comme sur les océans, envoient un inquiétant message.
A l'occasion de la COP28 organisée à Dubaï, aux Emirats arabes unis, l'Organisation météorologique mondiale (OMM) est revenue sur les événements marquants de cette année hors norme, attendue comme la plus chaude jamais enregistrée. Le directeur de la branche climat de cette organisation des Nations unies, Chris Hewitt, nous aide à y voir plus clair, entre seuil symbolique et chiffres alarmants.
Franceinfo : Le 17 novembre, la Terre a dépassé les +2°C de réchauffement pendant une journée. En juillet déjà, les températures moyennes mondiales affichaient 1,5°C au-dessus de leur niveau moyen de l'ère préindustrielle. Avons-nous déjà dépassé, en 2023, des seuils envisagés pour la fin du siècle ?
Chris Hewitt : C'est un peu plus compliqué que cela, car il s'agissait de jours ou de semaines isolés. L'accord de Paris parle d'un réchauffement sur des décennies, sur une période d'au moins vingt ans. En 2023, nous avons assisté à un réchauffement exceptionnel et, pour le moment, nous prévoyons que cette année s'établira à 1,4°C au-dessus du niveau de référence préindustriel. Même si nous franchissons le seuil de +1,5°C, cela ne concernerait, pour l'instant, qu'une seule année. Cela ne suffit pas pour dire que la limite décrite dans l'accord de Paris a été franchie.
Lors des vagues de chaleur observées sur le globe, qu'est-ce qui peut être attribué au phénomène El Niño et qu'est-ce qui peut l'être au changement climatique ?
Le réchauffement auquel nous assistons est l'œuvre d'un changement climatique à long terme, causé par l'augmentation de la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère, liée aux activités humaines. Mais à celui-ci s'ajoute une variabilité naturelle au sein du système climatique, par exemple la variabilité El Niño/La Niña, qui est l'une des plus fortes.
Selon que se manifeste l'un ou l'autre des phénomènes, la température mondiale est influencée dans un sens ou dans l'autre. Au cours des trois dernières années, nous avons connu des conditions La Niña inhabituellement longues. Or, la Niña a tendance à faire baisser légèrement les températures moyennes mondiales. Maintenant que La Niña est terminée, nous sommes passés aux conditions d'El Niño. Cela se traduit par des eaux plus chaudes dans le Pacifique équatorial, lesquelles ont tendance à faire augmenter la température globale.
Ainsi, le réchauffement à long terme rencontre ces conditions plus chaudes et cette superposition est l'une des principales raisons pour lesquelles nous avons connu une année record en termes de chaleur.
Quels sont les risques à dépasser ces seuils ?
On a l'impression que ces seuils correspondent à un changement radical du système climatique, mais ce n'est pas le cas. Chaque fraction de degré de cette température moyenne mondiale donne lieu à des situations différentes. Limiter le réchauffement à 1,5°C ou à 2°C, ce n'est pas comme prendre des mesures soudaines qui entraînent immédiatement de grands changements. En revanche, à mesure que la terre se réchauffe, nous sommes aussi de plus en plus susceptibles de connaître des vagues de chaleur. Naturellement, nous en avons vu beaucoup cette année. Elles entraînent des sécheresses, des inondations et de nombreux changements sur le plan météo et sur le plan du climat.
Prenons l'exemple de la fonte de la cryosphère, la surface gelée de la Terre : il est évident que lorsque vous réchauffez l'atmosphère, vous avez tendance à faire fondre les glaciers et les calottes glaciaires. Malheureusement, nous assistons à une réduction assez spectaculaire de la quantité de glace sur la planète et cela est directement lié à ce réchauffement. Franchir le seuil des +1,5°C ne provoquera aucun changement soudain, mais les conditions ne font qu'empirer à mesure que la planète se réchauffe.
Avec l'Organisation météorologique mondiale, vous avez présenté au premier jour de la COP28 votre rapport sur l'état actuel du climat. Les décideurs rassemblés à Dubaï pour la conférence prennent-ils en compte ces données ?
Cela dépasse mes connaissances ! Nous avons présenté notre état provisoire du climat le premier jour afin que les décideurs politiques disposent des données factuelles dont ils ont besoin pour prendre leurs décisions et mener leurs discussions. Ce qu'ils en feront est hors de notre contrôle.
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