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"Toutes les pires conditions sont réunies" : comment va se dérouler le sauvetage des enfants piégés dans une grotte en Thaïlande

Franceinfo a interrogé Renaud Carassou-Maillan, de l'association Spéléo secours français, pour comprendre les conditions d'évacuation du groupe en détresse. 

Article rédigé par franceinfo - Propos recueillis par Hugo Cailloux
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Un policier se tient devant l'entrée de la grotte de Tham Luang (Thaïlande), où sont piégés douze adolescents accompagnés de leur entraîneur, le 8 juillet 2018.  (SOE ZEYA TUN / Reuters)

L'opération s'annonce "risquée" et devrait prendre plusieurs jours. L'évacuation des douze adolescents et de leur entraîneur, piégés dans la grotte inondée de Tham Luang, dans le nord de la Thaïlande, a commencé, dimanche 8 juillet. Une équipe de 13 plongeurs étrangers et cinq membres des commandos d'élite de la marine thaïlandaise va aider le groupe sur le chemin du retour à l'air libre. Une opération périlleuse. 

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Pour se rendre compte de ce qui attend les enfants et leur entraîneur, franceinfo a interrogé Renaud Carassou-Maillan, conseiller technique national à l'association Spéléo secours français.

Franceinfo : Quel est le niveau de difficulté de ce parcours d'évacuation ?

Renaud Carassou-Maillan : Le parcours est relativement complexe, avec une galerie noyée. Toutes les pires conditions sont réunies. La visibilité dans l'eau est nulle : l'eau est boueuse et turbide (trouble). Un plongeur ne verrait pas ses mains à 10 centimètres. Ensuite, la progression dans la galerie est lente : il faut 6 heures à un plongeur expérimenté pour parcourir 4 kilomètres. Et pour ajouter à tout ça, il y a un fort courant.

Sur le parcours, les enfants et les sauveteurs devront également emprunter un passage de 60 à 80 centimètres de large. C'est un point-clé. Pour franchir cet entonnoir, il faudra sans doute qu'ils passent leurs bouteilles sur le côté plutôt que sur le dos, une technique très spécifique en spéléologie. 

En résumé, cette opération n'est pas à la portée de n'importe qui et il faut des plongeurs spécialisés en spéléologie. Quand vous plongez en mer, vous pouvez remonter à la surface comme un bouchon et avoir accès rapidement à des secours. Sous terre, il y a un plafond au-dessus de vous. Si vous avez le moindre problème, vous ne pouvez pas remonter...

Quelles sont les précautions liées à l'âge et à l'inexpérience des enfants piégés avec leur entraîneur ?

Le fait qu'ils soient jeunes fait qu'ils ont une condition physique un peu plus légère qu'un adulte de 30 ans, mais ils ont l'air plutôt en forme. La difficulté réside surtout dans l'adaptation du matériel de plongée à leur âge : il faut avoir des masques de taille enfant, par exemple. Et dans tous les cas, les sauveteurs vont partir avec leur matériel en double, pour parer à toute difficulté. En cas de problème, les enfants auront toujours deux moyens de respirer.

Leur apprendre à nager n'est pas le plus important. Un fil est disposé tout le long, il n'y a qu'à tirer dessus. Les plongeurs d'accompagnement vont les prendre par l'épaule pendant tout le long.

Renaud Carassou-Maillan

à franceinfo

Ce dont les sauveteurs vont surtout devoir s'assurer, c'est de bien préparer les douze adolescents psychologiquement. Ces derniers devront être à l'aise avec le milieu pour ne pas paniquer. Sous l'eau, les sauveteurs vont sans doute mettre en place un code pour pouvoir communiquer entre eux, comme le fait de leur serrer le bras pour dire que tout va bien. Les jeunes vont se laisser faire, donc c'est plus aux deux plongeurs-accompagnateurs de garder leur calme. Pour rassurer les enfants et les motiver, les sauveteurs pourraient montrer une vidéo du premier rescapé sorti de la grotte aux autres.

Pourquoi évacuer les enfants maintenant, malgré la dangerosité de cette opération ?

C'est une tentative qui comporte des risques, mais vu la météo il n'y a pas d'alternative. Il faut qu'ils sortent avant l'arrivée d'un épisode de mousson, parce que sinon l'eau va monter, le dispositif d'assistance va devoir se replier et cela deviendra très compliqué. 

Dans ces conditions, les sauveteurs feront en sorte que les enfants soient bien préparés. Il y a aussi des risques de sur-accident. Il y a déjà eu un mort, et une personne électrocutée. Il y a 2 000 personnes sur place, mais il est important qu'il y ait un minimum de sauveteurs engagés. L'être humain est capable de choses incroyables quand il s'agit de sa propre survie. Là, il va falloir qu'ils se dépassent.

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