Haïti : ce que l'on sait du meurtre d'un couple de Français à Port-au-Prince
Les deux quadragénaires se trouvaient à Haïti dans le cadre d'une procédure d'adoption.
Originaire de l'Ardèche, le couple s'était rendu à Haïti dans le cadre d'une procédure d'adoption. Deux ressortissants français ont été abattus à Port-au-Prince, lundi 25 novembre, dans des circonstances qui restent à éclaircir. Le ministère français des Affaires étrangères a fait part, dans un communiqué, de "sa grande émotion" après la mort de ces "deux compatriotes en Haïti des suites d'une agression", assurant que l'ambassade de France était "en contact avec les autorités locales pour que toute la lumière soit faite sur ce drame".
Qui sont les victimes ?
Mélina et Alexandre R. étaient âgés de 41 et 44 ans et domiciliés dans le hameau de Sauze, à Saint-Martin-d'Ardèche, selon les informations de France 3 Auvergne-Rhône-Alpes. Un proche du couple, cité par Le Parisien, décrit Alexandre comme un homme "jovial et expansif", "passionné de motocross et de VTT de descente". Toujours selon cette source, il était commercial chez un grossiste en matériel électrique, tandis que Mélina avait récemment exercé le métier de vendeuse dans un magasin de matériaux et pratiquait la randonnée. Le quotidien évoque les "nombreux amis" d'Alexandre et Mélina et France 3 décrit un couple "très ancré dans la vie de la commune".
Mariés depuis douze ans, le couple avait engagé une procédure d'adoption et avait "obtenu son premier agrément en 2013, renouvelé en 2018. Leur voyage était organisé dans le but d'une visite de convivialité, ils ne seraient pas repartis avec un enfant", a précisé à l'AFP le conseil départemental de l'Ardèche. L'Agence française de l'adoption (AFA), organisme public qui accompagne les candidats à l'adoption, les suivait depuis trois ans (en 2018, 61 enfants ont été adoptés par des Français en Haïti, dont quatre via l'AFA).
Enfin, ils étaient investis dans la section ardéchoise de l'association Enfance et familles d'adoption, poursuit Le Parisien, qui cite un oncle d'Alexandre : "Avoir un enfant, ils n'avaient que ça en tête depuis des années." Si, dans une publication datée du 24 octobre 2019, la diplomatie française recommande sur son site internet "de reporter tout voyage [en Haïti] jusqu'à nouvel ordre", une professionnelle de l'adoption indique au quotidien qu'"on peut légitimement considérer que, pour ce couple, [se rendre à Haïti] était une raison impérative."
Que s'est-il passé ?
Les deux quadragénaires ont été tués par balles, à Port-au-Prince, la capitale, où ils venaient tout juste d'atterrir. Au fait des risques encourus dans ce pays frappé par de graves troubles sociaux, le couple avait pris des précautions, assure l'AFA.
Inscrits sur le site Ariane du Quai d'Orsay, qui permet aux ressortissants français d'enregistrer un voyage touristique, personnel ou professionnel, de moins de 6 mois dans un pays étranger, "ils ont fait tout ce qu'il fallait faire en termes de sécurité", précise l'agence. "On leur a dit qu'un taxi, avec lequel l'AFA travaille, viendrait les chercher, afin qu'ils soient le plus possible en sécurité. Il les a pris à l'aéroport pour les conduire là où ils devaient loger."
Les circonstances du meurtre, après leur arrivée à l'hôtel, n'ont pas été confirmées. Des sources citées par l'AFP et Le Parisien penchent pour l'hypothèse d'un crime crapuleux, comme une tentative de vol à main armée. "Leur véhicule pourrait avoir été suivi sur le trajet entre l'aéroport et l'hôtel", spécule un membre de la famille, contacté par le quotidien.
Quelle est la situation à Haïti ?
Haïti s'enfonce un peu plus chaque jour dans une grave crise sociale et politique. Les manifestations à répétition, souvent émaillées de violences, réclament depuis le mois d'août la démission du président Jovenel Moïse. Selon l'ONU, au moins 42 personnes sont mortes depuis mi-septembre, dans des manifestations organisées dans les principales villes du pays. Dans un entretien à l'AFP, en octobre 2019, Jovenel Moïse affirmait ne pas être "accroché à un mandat", mais n'annonçait aucune mesure immédiate face aux conséquences humanitaires, économiques et sociales de la crise politique.
La violence des gangs inquiète par ailleurs la société civile. "On assiste à une augmentation sans limite d'actes de criminalité par des groupes armés, avec le support d'officiels de l'Etat, par des bandes tolérées par le pouvoir politique en place", dénonçait, mi-novembre au micro de l'AFP Marie-Yolène Gilles, militante haïtienne pour la défense des droits humains.
"Les manifestations, accompagnées de barrages sur les principaux axes routiers et d'actes violents (jets de pierres, tirs...) sont très fréquentes. Des groupes violents sont actifs et entretiennent un climat d'insécurité", écrit ainsi la diplomatie française sur son site internet.
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