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Crack, alcool et cure de désintox : le maire de Toronto brigue un nouveau mandat

Rob Ford, récemment admis en cure pour se défaire de ses addictions, tente de se racheter une conduite à quatre mois des élections municipales. Portrait.

Article rédigé par Marie-Violette Bernard
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Rob Ford lors de la conférence de presse marquant son retour de cure de désintoxication, le 30 juin 2014, à Toronto (Canada). (DARREN CALABRESE / AP/ SIPA)

C'est un Rob Ford amaigri et contrit qui s'est présenté devant les caméras, lundi 30 juin, pour sa première conférence de presse depuis sa cure de désintoxication pour addiction à l'alcool et aux drogues. "Comme beaucoup de gens aux prises avec la toxicomanie, j'étais dans le déni complet", a-t-il admis devant un parterre de journalistes soigneusement sélectionnés, comme le rapporte le Huffington Post Canada (en anglais)

Le maire de Toronto (Canada), candidat à sa propre succession pour les élections du 27 octobre, tente tant bien que mal de faire oublier sa récente descente aux enfers grâce à ce nouvel acte de contrition. Une tactique qui pourrait fonctionner, vu la capacité de cet Obélix canadien à se sortir des mauvaises passes. Retour sur le parcours d'un homme politique abonné aux scandales et aux phrases choc.

Années 2000 : il se forge une image d'homme du peuple

Fils d'un député de l'Ontario ayant fait fortune dans les autocollants, Rob Ford se lance dans la politique locale après avoir abandonné ses études en sciences politiques au bout d'un an, raconte Le Monde. Il est élu conseiller municipal de la banlieue ouest de Toronto, Etobicoke, en 2000, après une campagne électorale faite de bouts de chandelles. Rob Ford se forge alors une image d'homme proche du peuple à force de rencontres avec les électeurs. Il obtient ainsi le soutien indéfectible d'un noyau dur de fans, la "Ford nation".

Mais le Torontois au physique imposant s'illustre aussi en multipliant les sorties douteuses. En 2006, il provoque un tollé dans la communauté homosexuelle en déclarant que le sida est une maladie "largement évitable, tant qu'on n'utilise pas des aiguilles ou qu'on n'est pas homo". Puis il doit s'expliquer en 2010 sur une conduite en état d'ivresse en Floride (Etats-Unis), qu'il nie en bloc malgré des preuves brandies dans la presse, rappelle Libération. Rob Ford, en pleine campagne pour la mairie de Toronto, finit par reconnaître les faits, qu'il prétend avoir "oublié" dans un premier temps. Une excuse plus tard, le voilà largement élu à la tête de la plus grande ville canadienne, en octobre 2010. C'est la naissance de l'indéboulonnable "maire en téflon".

2013 : il fume du crack (avec les membres d'un gang)

Mais une nouvelle vague de frasques, début 2013, entache gravement son image. Après avoir été accusé d'attouchements sur une de ses collaboratrices, l'édile se retrouve au milieu d'un scandale de drogue. Dans un article paru le 24 mai 2013, deux journalistes du Toronto Star (en anglais) affirment avoir visionné une vidéo de Rob Ford fumant du crack, un puissant dérivé de la cocaïne. Pour preuve, le quotidien libéral publie une photo de lui les yeux rougis, posant aux côtés de trois membres d'un gang. Le maire de Toronto nie en bloc. Puis s'excuse quelques mois plus tard, une fois les faits confirmés par la police, qui a mis la main sur la vidéo. "Ces erreurs ne se reproduiront jamais", promet alors un Rob Ford repentant.

De nouvelles images compromettantes font pourtant leur apparition en novembre : on y découvre cette fois le maire, ivre, menaçant une personne inconnue. "Je vais tuer ce putain de mec ! Je te le dis, c'est un meurtre avec préméditation !" éructe Rob Ford dans la vidéo. Sa technique de défense ? Y aller au culot. "[Cette vidéo] est extrêmement embarrassante. Le monde entier va la voir. Vous savez quoi ? Cela ne me pose pas de problème. (...) Clairement, j'étais extrêmement, extrêmement ivre", lâche-t-il lors d'une nouvelle conférence de presse, rapportée par Les Inrocks.

C'en est trop pour la municipalité de Toronto, qui lui retire la plupart de ses responsabilités de maire (en anglais) au profit de son premier adjoint, Norm Kelly, lors d'une motion votée le 13 novembre 2013. Sa cote de popularité ne semble pourtant pas souffrir de ce nouvel éclat, la plupart des Torontois estimant que ses problèmes de drogue relèvent de sa vie privée.

2014 : après la cure, la campagne électorale

Mais Rob Ford pourrait avoir du mal à se remettre de ses dernières frasques. Après une nouvelle vidéo révélée par le Globe and Mail (en anglais) le 30 avril, le maire a dû reconnaître son "problème d'alcool" et entamer une cure de désintoxication dans la clinique GreenStone. Devancé par ses adversaires dans  les intentions de vote, selon CTV News (en anglais), il tente deux mois plus tard de relancer sa campagne électorale en présentant ses excuses aux Torontois.

Les électeurs lui pardonneront-ils une nouvelle fois ses écarts ? Les derniers sondages sont pessimistes. La cote de popularité de Rob Ford, devenu la honte du pays pour de nombreux Canadiens, a largement souffert de son séjour en cure de désintoxication. Un sondage, paru le 9 juin, indique ainsi qu'il ne récolte plus que 28% des opinions favorables des Torontois, son plus bas taux depuis son élection en 2010. Mais il en faudrait plus pour faire douter Rob Ford qui, égal à lui-même, a promis lundi 30 juin de "servir [Toronto] pendant encore de nombreuses, nombreuses années". Il lui reste moins de quatre mois pour convaincre.

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