Soudan : ce que l'on sait de l'attaque d'un village qui a fait plus de cent morts

Ces nouvelles violences, attribuées aux paramilitaires des Forces de soutien rapide, illustrent le conflit sanglant qui déchire depuis plus d'un an le pays menacé par la famine.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des membres du bataillon des forces de mission spéciales de l'armée soudanaise organisent un défilé à Karima (Soudan), le 19 mai 2024. (AFP)

Une énième illustration de l'impact du conflit entre les deux généraux rivaux sur la population soudanaise. Des militants prodémocratie au Soudan ont fait état jeudi 6 juin d'une centaine de morts dans le village de Wad al-Noura, situé dans le centre du pays.

Les Forces de soutien rapide (FSR), des paramilitaires en guerre contre l'armée soudanaise depuis avril 2023, ont attaqué mercredi le village "à deux reprises" avec de l'artillerie lourde, a affirmé le comité de résistance de Madani, un réseau d'entraide entre habitants, dans un communiqué mercredi. Dans la foulée, les rebelles ont déclaré sur le réseau social X avoir attaqué trois camps de l'armée dans la région de Wad al-Noura et s'être heurtés à leurs rivaux "à l'extérieur" de la zone habitée. Voici ce que l'on sait de cette attaque sanglante.

Un bilan humain extrêmement lourd 

Rapportant "plus de 104 morts" ainsi que "des centaines de blessés", le comité de résistance de Madani assure jeudi avoir établi ce bilan sur la base d'une "communication préliminaire avec les habitants du village" situé dans l'Etat d'Al-Jazira. "Je suis horrifiée par les informations selon lesquelles au moins 35 enfants ont été tués et plus de 20 autres blessés lors de l'attaque contre le village", a réagi de son côté la directrice générale de l'Unicef, Catherine Russell, dans un communiqué. Sur son compte Facebook, Mini Arko Minawi, le gouverneur de la province du Darfour, fait état de son côté de plus de 150 victimes, parmi lesquelles "des enfants, des femmes et des personnes handicapées"

Evoquant un "charnier", les militants du comité de résistance de Madani ont diffusé des photos sur les réseaux sociaux qui montrent une rangée de linceuls blancs disposés sur un terrain. Ils racontent que les paramilitaires ont "envahi le village", entraînant la fuite de nombreux habitants. "Les images qui nous parviennent de Wad al-Noura brisent le cœur", a déploré Clémentine Nkweta-Salami, la coordinatrice humanitaire de l'ONU dans le pays. "La tragédie humaine est devenue une caractéristique de la vie au Soudan", a-t-elle regretté sur X.

Le chef de l'armée promet de "répliquer durement" 

Jeudi, le chef de l'armée, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est rendu au chevet des blessés, comme en témoigne cette vidéo. Le gouvernement de transition soudanais a condamné l'attaque et a appelé la communauté internationale à demander des comptes aux forces de sécurité soudanaises, dans un communiqué publié sur Facebook. Le commandant en chef de l'armée a promis de "répliquer durement" face aux "crimes" des Forces de soutien rapide (FSR).

A travers le pays, les combats se poursuivent quotidiennement depuis plus d'un an entre l'armée dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane et les paramilitaires des FSR, sous la houlette du général Mohamed Hamdane Daglo. Les deux camps sont régulièrement accusés de crimes de guerre, en visant notamment les civils, en bombardant de manière indiscriminée des zones résidentielles, en se livrant à des pillages ou en bloquant l'aide humanitaire vitale.

Les paramilitaires accusés de "crime de guerre" 

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, "condamne fermement" l'attaque menée par un groupe paramilitaire contre un village au Soudan qui aurait fait "plus de 100 morts", a fait savoir son porte-parole dans un communiqué, appelant les parties au conflit à s'abstenir de toute attaque contre les civils.

Emergency Lawyers, groupe d'avocats soudanais qui documente les atrocités commises depuis le début de la guerre, a vu dans l'attaque de Wad al-Noura "un exemple douloureux des violations flagrantes des droits humains". L'organisation a dénoncé un "crime de guerre" sur X.

Le gouverneur de l'Etat d'Al-Jazira, Al-Tahir Ibrahim Al-Khair, a affirmé à l'agence de presse officielle du Soudan que les "violations brutales" commises par les Forces de soutien rapide à Wad Al-Noura et dans ses environs constituaient un "crime de guerre complet", rapporte la plateforme d'information TRT Afrika.

"Les attaques sur les civils et sur les infrastructures civiles sont inacceptables", a de son côté réagi la directrice exécutive de l'Unicef, Catherine Russell. "Au cours de l'année écoulée, des milliers d'enfants ont été tués et blessés", a-t-elle rappelé dans une déclaration disponible sur le site du Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha).

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