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Libye: les rumeurs sur la santé de Haftar lancent la course à sa succession

Les rumeurs les plus contradictoires circulent depuis plus de deux semaines sur l’état de santé de Khalifa Haftar, l’homme fort de l’Est-libyen. Donné même un moment pour mort, sa disparition de la scène publique a en tout cas déclenché la course à sa succession et ravivé les craintes de voir le pays basculer à nouveau dans des violences incontrôlées.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Les forces libyennes, fidèles à l'homme fort de l'Est, Khalifa Haftar, hospitalisé à Paris, près de la ville côtière de Derna, le 14 avril 2018, dans l'attente du début des opérations pour reprendre la ville aux combattants du groupe djihadiste. (Abdullah DOMA/AFP)

L’absence depuis deux semaines de la scène publique de l’homme fort de la Libye, le maréchal Khalifa Haftar, a plongé le pays, les Nations Unies et les chancelleries impliquées dans la recherche d’une sortie de crise dans l’incertitude.

«Haftar va mieux», selon Jean Yves Le Drian 
Hospitalisé à Paris depuis le 9 avril 2018, «pour des examens médicaux normaux» selon son porte-parole Ahmed al-Mesmari, pour attaque cérébrale ou cardiaque selon les rumeurs et les médias, les rumeurs sur son état de santé ont culminé le 13 avril avec l’annonce de sa mort.
 
Une information aussitôt démentie par son entourage et par l’émissaire spécial de l’ONU pour la Libye. Le jour même, la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (Manul), basée à Tunis, diffusait en effet un tweet révélant que Ghassan Salamé s’était entretenu au téléphone avec le dirigeant libyen hospitalisé.
 
Cinq jours plus tard, le chef de la diplomatie française, Jean Yves Le Drian, confirmait devant les membres de la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale l’hospitalisation du chef de l’Armée national libyenne (ANL) dans un hôpital militaire de la banlieue parisienne. «Le maréchal Haftar va mieux», a-t-il même précisé au cours de cette réunion à huis clos.
 
Dans l’incertitude sur la capacité à gouverner de celui qui, à 75 ans, s’était imposé avec l’ANL comme un des pôles du pouvoir en Libye face à Fayez al-Sarraj, l'homme fort de Tripoli, une bataille sourde pour sa succession s’est engagée.

Des dauphins potentiels à l'homme fort de Cyrénaïque 
Est-ce parce qu’il faisait figure de successeur naturel qu’il était visé? Le chef d’état-major du Maréchal, le général Abdelrazak al-Nadhouri a échappé le 18 avril à un attentat à la voiture piégée dans la région de Sidi Khalifa, à l’entrée Est de Benghazi.
 
«Cet acte terroriste lâche intervient après la défaite de ces groupes terroristes» à Benghazi, a confié le général miraculé en butte aux groupes djihadistes, à la Chaîne Libya al-Hadath, l’organe officiel d’information de l’ANL.
 
Un autre nom de dauphin potentiel circule toutefois avec insistance, celui de Abdessalam al-Hassi. «Un général discret, proche d’Abou Dhabi, qui a été actif sur le front contre les djihadistes», présenté par l’hebdomadaire Jeune Afrique, comme l’option la plus concrète.
 
Al-Hassi aurait même l’agrément du Caire comme candidat de compromis selon des sources libyennes citées par le site arabe de Sputnik, l’organe d’information proche du Kremlin. Alors que le choix des Emirats Arabes Unis se porterait plutôt sur la personnalité de Aoun al-Farjani. Un général originaire de Syrte, chef de la sécurité militaire et qui appartient à la même tribu que Khalifa Haftar.

Une guerre de succession qui pourrait ne pas être que de noms
Autre hypothèse de travail, «Haftar a préparé ses fils Khaled et Saddam à lui succéder, selon le chercheur Tarek Megersi de l’European Council on Foreign Relations cité par Le Monde. «Mais ils ne sont guère respectés des soldats, en raison de leur manque d’expérience du combat et des soupçons de népotisme», explique ce dernier.

Dans le secret qui entoure l’état de santé du maréchal et le flou absolu du jeu des alliances inter-tribales, deux autres personnalités pourraient être tentées de remplir le vide d’une disparition impromptue de Haftar.
 
Fayez al-Sarraj, chef du gouvernement d’union nationale basé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale, et Seif al-Islam Kadhafi qui depuis sa mystérieuse libération de la prison de Zentan explique qu’il est le seul légitime à réunifier le pays.
 
Une situation qui met le pays au bord d’une guerre de succession qui ne se contenterait pas d’être qu’une bataille de noms.

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