Coronavirus : de la "protection divine" à l'ennemi public n°1, le Burundi change son fusil d'épaule
Le nouveau président du Burundi, Evariste Ndayishimiye, en a fait une de ses priorités. Il lance la mobilisation générale contre la pandémie de Covid-19, longtemps ignorée par son prédécesseur.
Face à la pandémie de coronavirus, le Burundi se voulait être une exception : "Une nation épargnée par la grâce divine." C'était la conviction de son ancien président, Pierre Nkurunziza, décédé brutalement le 8 juin 2020, officiellement d'un arrêt cardiaque, possiblement du Covid-19, selon certaines sources. Face à l'épidémie, son successeur a décidé de changer totalement de stratégie.
Revirement spectaculaire
En marge de la cérémonie de prestation de serment de son gouvernement, le 30 juin à Bujumbura, le président Evariste Ndayishimiye a lancé un appel à la mobilisation générale. Plus question de confier le sort de son peuple à la seule protection divine, le Covid-19 est désormais considéré comme l'ennemi public n°1.
Je déclare la pandémie de Covid-19 comme le plus grand ennemi du peuple. Elle est devenue notre préoccupation principale à tous. Nous nous engageons à combattre cet ennemi
Evariste Ndayishimiye, nouveau président du BurundiDiscours au Parlement le 30 juin 2020
Le revirement est spectaculaire dans un pays où les autorités sanitaires avaient largement dédaigné l'épidémie. Contrairement à ses voisins, le gouvernement précédent n'avait pas imposé de confinement à ses 11 millions d'habitants, qui ont continué à vaquer normalement à leurs occupations. Les autorités ont même maintenu les élections générales du 20 mai, sans imposer de mesures de distanciation sociale.
Certes, le gouvernement avait édicté quelques mesures de protection et d'hygiène préventives, notamment le lavage des mains. Mais de nombreux Burundais ne cachaient pas leur inquiétude face au laxisme affiché dans le pays vis-à-vis de la pandémie.
"De la bouteille de bière au goulot que l'on s'échange allègrement, de cette cigarette roulée qui passe amicalement d'une bouche à l'autre, le gouvernement devrait renforcer les mesures dans le cadre de la prévention", plaidait le site burundais d'information IWACU au mois de mars.
Une série de mesures pour "combattre l'ennemi"
Le nouveau pouvoir burundais a donc décidé de prendre le taureau par les cornes. Le président a annoncé une série de mesures pour aider la population à "combattre résolument cet ennemi". Le gouvernement subventionnera, à hauteur de 50%, le prix du savon pour le lavage des mains, le prix du m³ d'eau sera revu à la baisse jusqu'à ce que la pandémie soit endiguée. Des équipes de dépistage du Covid-19 vont sillonner le pays, particulièrement dans les régions où des cas seront signalés. Désormais, la population doit se conformer strictement au respect des mesures barrières qui vont être affichées partout. Et gare aux récalcitrants !
Si, à l'avenir, quelqu'un présentant des symptômes de Covid-19 refuse d'aller se faire tester, cela signifiera qu'il veut contaminer les autres volontairement. Il sera alors considéré comme un sorcier et traité aussi sévèrement que lui
Evariste Ndayishimiye, nouveau président du BurundiDiscours au parlement le 30 juin 2020
Officiellement, le Burundi n'a recensé que 170 cas de Covid-19 pour un seul décès. Ce bilan laisse toutefois sceptiques bien des médecins, selon lesquels de nombreux cas et morts de personnes présentant les symptômes du virus ont été exclus de ces chiffres. Les Burundais se demandent aujourd'hui si leur défunt président, Pierre Nkurunziza, n'a pas lui-même succombé au coronavirus. Selon une source médicale contactée par l'AFP, il était en "détresse respiratoire" avant son décès, annoncé le 8 juin 2020 à l'âge de 55 ans.
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