Egypte : la "diffusion de fausses nouvelles", un alibi pour intimider la presse
Quatre journalistes d'un site indépendant ont été convoquées après la plainte d'un parti proche du pouvoir.
La rédactrice en chef et trois journalistes du média indépendant égyptien Mada Masr ont été interrogées le 7 septembre 2022 par la justice sous l'accusation notamment de "diffusion de fausses informations". Lina Attalah, Rana Mamdouh, Sara Seif Eddin et Beesan Kassab ont été convoquées suite à des dizaines de plaintes déposées par plusieurs membres du parti "Mostakbal Watan" (Futur de la nation, pro-régime). Ces derniers n’ont pas du tout apprécié un article les accusant d'"infractions financières graves". Pour eux, ce sont "de fausses informations visant à déstabiliser le pays".
“Nous regrettons que le parti politique majoritaire en Egypte, connu pour être proche du pouvoir, utilise de telles tactiques pour intimider un organe de presse qui agit au nom de l'intérêt public.”
Mada Masr, journal égyptien en ligne
Un site bloqué depuis des années
Ce n’est pas la première fois que Mada Masr ou sa directrice Lina Attallah sont accusés de "diffamation" de "diffusion de fausses informations visant à déstabiliser le pays". Le journal en ligne, qui publie des enquêtes sur les questions de sécurité ou de corruption, en arabe et en anglais, est l’un des rares médias à aborder des sujets qui dérangent. Comme des centaines d’autres sites, il est bloqué depuis des années dans le cadre de la lutte contre les fausses informations. Son accès n'est possible en Egypte que grâce à un VPN (réseau privé virtuel).
Arrestations et détentions provisoires
La Constitution de 2014 garantit normalement la liberté de la presse en Egypte. En même temps, une loi adoptée en 2018, permet de poursuivre en justice les journalistes qui publient des "fausses nouvelles". Un concept très flou qui vise notamment à faire taire les voix dissidentes. A ce stade, les quatre journalistes de Mada Masr s’en sortent relativement bien puisqu’elles ont été relâchées sous caution.
Une vingtaine d’autres sont actuellement privés de liberté : la moitié est en détention provisoire, accusée notamment d’avoir diffusé de fausses nouvelles, indique Reporters sans frontières (RSF). Le Caire occupe la 168e position (sur 180) dans le classement de la liberté de la presse 2022 de RSF.
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