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Coronavirus : polémique autour de l'interdiction de la vente d'alcool en Afrique du Sud

Les professionnels du secteur réclament un assouplissement de la mesure en autorisant la vente à emporter, malgré le confinement.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un "shebeen", bar informel dans un township du Cap, en Afrique du Sud. (MIKE HUTCHINGS / REUTERS)

La mesure avant d'être sanitaire se veut d'abord sécuritaire. Dans un pays déjà au top 10 mondial de la consommation d'alcool, le confinement et le désœuvrement qui l'accompagnent, risquent de pousser à une consommation excessive. Violences familiales, bagarres, voire meurtres... les autorités d'Afrique du Sud veulent éviter le pire. Et ici l'alcool n'est pas reconnu comme "un achat de première nécessité". Mais la polémique est vive et tout naturellement ce sont les professionnels du secteur des vins et spiritueux qui réclament un allègement de l'interdiction de vente d'alcool. Au diable les risques d'une surconsommation d'alcool durant le confinement. L'industrie des spiritueux du pays a même élaboré un plan qu'elle entend présenter au gouvernement.

Autoriser la vente à emporter

Elle propose d'autoriser la vente d'alcool, y compris dans les débits de boisson, mais exclusivement dans le cadre de la vente à emporter. Les plages horaires doivent être suffisamment longues pour éviter les effets de foule, et les établissements doivent s'assurer de faire respecter les gestes de distanciation. La vente de 9h à 18h semble, aux yeux de l'industrie, une bonne plage horaire. Elle indique enfin qu'il ne peut y avoir d'offres promotionnelles du genre "deux achetées, la troisième gratuite".

Le Gauteng liquor forum, un syndicat professionnel de propriétaires d'établissements de la région du Gaunteng (la région qui abrite Pretoria et Johannesburg), réclame des mesures d'aide, faute de quoi il poursuivra l'Etat devant les tribunaux. Le syndicat souhaite, lui aussi, une ouverture des établissements pour quelques heures. Selon leur avocat, de très petits établissements sont au bord de la ruine et les propriétaires n'ont aucun autre moyen de subsistance.

En effet, le pays regorge de ces établissements appelés "shebeens". Au temps de l'apartheid, ils se sont multipliés dans les townships, apportant une alternative illégale aux pubs et aux bars réservés aux Blancs. Ils ont été légalisés par le nouveau régime offrant ainsi une activité économique à beaucoup.

"Les Sud-Africains boivent trop"

Mais le Premier ministre régional, David Makhura, a adressé une fin de non-recevoir aux professionnels du secteur. Si l'industrie des spiritueux contribue à l'emploi, la consommation d'alcool a aussi des effets sociaux négatifs, a-t-il déclaré en substance. "Les Sud-Africains boivent trop et cela provoque des accidents et des bagarres. Nos hôpitaux nous le disent. Sans arrêt ils accueillent des blessés victimes de coups de couteau, de tirs d'armes à feu et d'accidents de la route."

Et David Makhura de préciser que ce week-end pascal de confinement a été particulièrement calme sur les routes de la province du Gauteng. Deux décès contre 25 à 45 habituellement, prouvant ainsi à ses yeux, le bien-fondé de la mesure.

La viticulture poids lourd de l'économie

Parmi ceux qui réclament des mesures d'allègement du confinement, beaucoup font remarquer le poids économique que représente le secteur. 4,4% du PIB, avancent certains. Et des millions de rands en taxes.

Le secteur viticole à lui seul rapporte 26,2 milliards de rands (1,3 milliard d'euros). L'Afrique du Sud était le 9e producteur mondial de vin en 2018 avec 950 millions de litres, dont plus de la moitié exportée. Mais les producteurs de vin ou d'alcool sont pour le moment bien silencieux. Ils ont un atout majeur. Leur production se stocke et peut attendre des jours meilleurs.

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