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Angola : une rente pétrolière mal exploitée

Il s'agit d'un pays riche, riche d'un pétrole qui ne profite qu'à une faible part de la population. Les réformes en cours sont destinées à améliorer la rentabilité de ce secteur dont dépend totalement l'économie du pays. 

Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Vue du Kaombo Norte, un navire exploité par la multinationale pétrolière française Total, le 8 novembre 2018, à environ 250 km des côtes angolaises, dans l'océan Atlantique (RODGER BOSCH / AFP)

Un rapport de l’Agence internationale de l’Energie (AIE) montre l'importance du pétrole dans l'économie de l'Angola, deuxième producteur en Afrique. L’Agence décrit un pays dépendant de son pétrole (95% de ses exportations), et donc "vulnérable aux variations de prix du pétrole brut", souligne l'EIA (Energy Information Administration) américaine.

La Banque Africaine de Développement précise que le secteur des hydrocarbures pèse environ 30% du PIB national. Tandis que le FMI estime que la reprise de la croissance économique du pays (2,25% en 2018) est due à la hausse des cours du brut.

C'est dans ce contexte de dépendance à l'or noir qu'il faut comprendre les réformes entreprises par Joao Lourenço, à la tête de l'Angola depuis 2017.

Le président Joao Lourenço a limogé Isabel dos Santos

L'Agence internationale de l'Energie note sobrement que le président "cherche à renforcer son contrôle politique et limiter l'influence de l'ancien président dos Santos et de ses alliés. En novembre 2017, le président Lourenço a remplacé Isabel dos Santos, la fille de son prédécesseur, par Carlos Saturnino, qui avait été limogé par Isabel dos Santos du conseil d’administration de Sonangol", l'entreprise pétrolière du pays. Il faut dire qu'Isabel dos Santos, la femme la plus riche d'Afrique, est soupçonnée de malversations

Les relations entre la famille dos Santos et le président sont exécrables depuis que José Eduardo dos Santos a passé le relais à Joao Lourenço en 2017, après 38 ans de règne. Depuis son arrivée au pouvoir, le nouveau chef de l'Etat, issu lui aussi du MPLA (le parti au pouvoir) qu'il dirige désormais, a lancé une purge de grande ampleur dans l'administration et les entreprises publiques. Purge qui a visé notamment des proches de l'ancien chef de l'Etat.

Production et consommation de pétrole en Angola (en millions de barils/jour) (7 juin 2019). (US Energy Information Administration)

Le besoin de réforme était urgent. La rentabilité du secteur pétrolier n'était plus ce qu'elle était (baisse des cours) et tendait même à reculer (et la production baisser) avec d'importantes conséquences sur l'économie du pays. Résultat : les recettes fiscales ont diminué de plus de 50% entre 2014 et 2017, selon la BAD qui ajoute que "la dette publique, en grande partie extérieure, est passée de 40,7% du PIB en 2014 à environ 80,5% en 2018". 

Les investisseurs satisfaits

C'est pourquoi "le gouvernement angolais a annoncé qu'il compte lancer cette année un programme triennal de privatisations de plusieurs entreprises publiques. Il s'agit notamment des entreprises des secteurs minier, bancaire, pétrolier et des télécoms. Ces privatisations, qui s'inscrivent dans le cadre des mesures qu'envisage le gouvernement pour assainir et relancer l'économie, ont été convenues avec le FMI afin notamment de réduire les déficits et surtout atténuer la baisse des réserves de change", rapporte La Tribune Afrique.

Les réformes lancées par le président semblent plaire aux investisseurs. "On entre dans une nouvelle ère" en Angola, s'est réjoui Guido Brusco, vice-président du géant italien ENI pour l'Afrique subsaharienne. "Il y a un environnement des affaires qui pourrait nous conduire à signer bientôt plusieurs accords", ajoute un porte-parole du groupe français Total qui précise : "On ouvre clairement une nouvelle page dans l'histoire pétrolière en Angola."  

Le pays est certes assis sur une mine d'or (de pétrole plutôt) : "L'Angola (détenait) des réserves prouvées de pétrole brut de 9,5 milliards de barils au début de 2018, selon les dernières estimations du Oil & Gas Journal", note l'AIE. Luanda compte aussi d’importantes ressources en gaz naturel. Mais la production n'augmente pas et les revenus du pays dépendent donc du cours du baril qui a beaucoup chuté ces dernières années.

Cette économie de rente ne profite guère à la population puisque cet Etat richement pétrolier ne peut fournir de l'électricité qu'à 35% des Angolais "ce qui laisse 17 millions de personnes sans accès, principalement dans les zones rurales", note l'agence.

Manque de produits raffinés

Autre paradoxe, ce pays pétrolier souffre d'un manque de produits... pétroliers raffinés. Ses projets de développement de raffineries sont en panne. Bilan, le pays importe du diesel... pour alimenter ses centrales thermiques... "Le fuel est importé alors que l'Angola est le second plus gros producteur de pétrole en Afrique après le Nigeria", déplore la Commission économique pour l'Afrique des Nations unies.

Mais non content d'être une éponge à pétrole et à gaz, l'Angola est aussi doté de possibilités hydroélectriques. En 2017, le président Dos Santos avait inauguré l'un des plus grands barrages d'Afrique à Lauca. Récemment, une entreprise chinoise a concrétisé un important investissement destiné à accroître l'électrification du pays.

Il faut dire que la Chine est le principal importateur du brut angolais... Ce qui crée pour l'Angola une double dépendance: à son pétrole... et aux échanges avec la Chine.

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