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"Les pires mises en scène sont à redouter"

Abdel Asiem El Difraoui, chercheur expert sur la propagande des actions islamistes, auteur de "Al-Qaïda par l'image", analyse la prise d'otages en Algérie.

Article rédigé par Hervé Brusini - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des combattants d'Aqmi avec un otage, Daniel Larribe, dans une vidéo diffusée le 10 août 2012. (SAHARA MEDIA / AFP)

Abdel Asiem El Difraoui est journaliste et chercheur spécialiste des mouvements islamistes radicaux. En particulier d'Al-Qaïda, à propos duquel il sort prochainement, aux éditions PUF, Al-Qaïda par l'image. L'ouvrage s'intéresse aux stratégies de communication de ces groupes terroristes.

Francetv info lui a demandé comment il analysait la prise d'otages qui se déroule mercredi 16 janvier dans le sud algérien.

Francetv info : Cette prise d'otages est en soi une action spectaculaire. Quel regard portez-vous sur ce qui se passe en ce moment ?
Abdel Asiem El Difraoui : Au centre de l'opération, il semble y avoir un personnage, Mokhtar Belmokhtar, connu  pour son appartenance au GIA algérien puis au GSPC [Groupe salafiste pour la prédication et le combat], et enfin à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Il est passé par l'Afghanistan, puis le Sahara, pour devenir un chef d'Aqmi. Cette trajectoire peut également se lire en termes de "savoir faire la propagande"  de l'action que l'on conduit. Lorsque le GSPC a voulu adopter le label Al-Qaïda, il a dû adhérer à une forme de communication très particulière. D'abord, le principe de cette labellisation a été négocié âprement, mais surtout, une fois la chose acquise, il a fallu que les Algériens se plient à une charte d'action et de communication très précise.

Quelle est cette charte de propagande de l'action islamiste ?
Quand on voit les vidéos d'otages, les éléments qui constituent ce qu'on donne à voir sont repérables : drapeau islamique, tenue vestimentaire bien définie, armes particulières... Encore une fois, on peut parler d'un code de la mise en scène de l'otage qu'on détient. La figure du chef est fondamental dans l'édifice de cette propagande. C'est le personnage mythique. Ce sont autant d'émirs qui revendiquent les pouvoirs, spirituel et temporel. Mokhtar Belmokhtar fait partie de cette lignée. Il peut décider qui devient martyr. C'est même la récompense ultime pour le combattant.

Comment, dans ces conditions, peut se dérouler l'épisode algérien, selon vous ?
D'abord, force est de constater que c'est un coup d'éclat. Mais pour y avoir coup d'éclat, il faut que les médias s'en emparent. Et c'est bien ce qui se passe. La question du couple médias-terrorisme est hélas bien connue. Les preneurs d'otages vont donc très certainement chercher à communiquer avec l'extérieur, faire que des otages supplient leur gouvernement. Les pires mises en scène sont à redouter, avec  des procès, et plus encore.

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