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Algérie : la justice prive Rebrab de sa télévision KBC et du quotidien El Khabar

La justice algérienne, saisie par le ministère de la Communication, a décidé de geler le rachat du groupe de presse El-Khabar par l'industriel Issad Rebrab. La défense du milliardaire crie à une justice aux ordres, à un procès politique. Les relations entre le patron de Cevital et l'Etat algérien se sont dégradées ces derniers mois. L'après-Bouteflika a commencé.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
«On ne gagne pas une affaire de cette envergure face à l'Etat, nous sommes devant une justice inféodée au pouvoir exécutif», ne décolère pas l'avocat Khaled Bourayou. Le tribunal administratif de Bir Mourad Raïs (Alger) a décidé de geler les effets de l'acte dans l'affaire du rachat des actions du groupe média El Khabar par Ness-Prod, filiale du groupe Cevital. Le ministère de la Communication avait saisi la justice pour faire annuler la transaction  quelques jours après sa conclusion au mois d'avril. L’homme d’affaires algérien Issad Rebrab avait racheté lundi 14 mars 2016 plus de 80% des actions du groupe de presse El Khabar, le quotidien éponyme et la chaîne de télévision KBC.
 
La justice algérienne s’est appuyée sur l’article 25 du code de l’information qui stipule qu’ «une même personne morale de droit algérien ne peut posséder, contrôler ou diriger qu'une seule publication périodique d'information générale de même périodicité éditée en Algérie». Le président-directeur général du groupe Cevital, Issad Rebrab, est déjà propriétaire du quotidien Liberté.

 
Argument politique ? L’homme d’affaires et patron du Forum des chefs d’entreprises Ali Haddad, proche du pouvoir, possède, quant à lui, deux journaux (Le Temps d’Algérie et sa version arabophone Wakt eldjazair, ainsi qu’une chaîne de télévision (Dzair TV) sans que le ministre de la Communication n’y trouve à redire.
 
Le groupe de presse El Khabar, créé en 1990, est en grande difficulté financière du fait de la chute des recettes publicitaires et surtout du gouffre financier que représente sa chaîne de télévision (KBC), lancée en mars 2014, avec un déficit mensuel estimé à près de 200.000 euros. Le quotidien arabophone El Khabar, jusqu’ici propriété d’un groupe de journalistes, avait un tirage moyen de 500.000 exemplaires par jour, même s’il tendait à reculer ces derniers mois.

 
Le gouvernement algérien, empêtré dans un bras de fer avec le milliardaire Issad Rebrab après son rachat du groupe de presse El Khabar, veut «assainir dans les meilleurs délais» la situation du paysage audiovisuel. En cause les chaînes «Offshore», ces télés tolérées mais non agrées, qui ne disposent souvent que de bureaux à Alger, émettant depuis l’étranger. Ces chaînes existent depuis plus d’une décennie pour certaines. Jusque-là tolérées tant qu’elles évitent les sujets politiques ou qu’elles épousent le discours officiel, certaines ont subi les foudres du régime. Sur la soixantaine de chaînes de télévision menacées, seules cinq ont reçu une garantie à continuer d’émettre. 

La succession d’Abdelaziz Bouteflika est ouverte. Selon de nombreux observateurs, les stratégies se mettent en place. Pour les médias, le régime ne veut pas d’une voix (télévision) discordante qui viendrait à contester le choix de son candidat. Quel qu’il soit. 

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