Cet article date de plus de trois ans.

Elections municipales en Afrique du Sud, l’ANC le parti de Mandela dans la tourmente

Pour la première fois depuis les premières élections au suffrage universel en 1994, l'ANC pourrait perdre la majorité en voix, lors des élections municipales du 1er novembre. Le signe d'un profond désaveu sur fond de corruption et de crise économique.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Rassemblement des militants de l'ANC à Prétoria lors du lancement de la campagne pour les élections municipales en Afrique du Sud, le 27 septembre 2021. (PHILL MAGAKOE / AFP)

La corruption, l'épidémie de coronavirus (près de 90 000 décès à ce jour), le chômage endémique, les coupures d'électricité à répétition, rien ne va plus dans le pays Arc en ciel, et l'ANC (African National Congress), le parti du président Cyril Ramaphosa est dans l'œil du cyclone.

Depuis 1994, et la fin de l’apartheid, le parti de Nelson Mandela n’a jamais frémi lors des élections, locales ou nationales. Mais à chaque rendez-vous électoral, sa domination sans partage s’effrite davantage. Les dernières frasques de l’ancien président Zuma, emprisonné et en cours de jugement pour corruption risque d’affaiblir un peu plus le poids du parti.

En 2016, l’ANC avait remporté 54% des suffrages, mais perdu des grandes villes comme Johannesburg (reprise lors d'un changement d'alliance) ou Pretoria. Or selon des sondages, le Parti pourrait cette fois perdre la majorité en termes de voix.

Le président Cyril Ramaphosa durant une campagne de porte à porte dans un township au nord de Prétoria, le 15 octobre 2021. (PHILL MAGAKOE / AFP)

Cyril Ramaphosa lui-même est descendu dans l’arène pour convaincre les électeurs que l’ANC reste un bon choix. "Cette fois, nous voulons des municipalités qui travaillent pour nos communautés", a-t-il lancé à la foule venue l'écouter lors d'un passage dans la région de Mangaung (centre). "Et nous ne voulons pas de voleurs", a-t-il ajouté. Une déclaration en forme d’aveux quand l’ANC gère l’essentiel des 278 villes d’Afrique du Sud.

Dans un pays qui par essence vote peu. 26 millions d’inscrits sur les listes électorales, pour près de 57 millions d’habitants (55% de femmes), révèlent qu'un tiers des habitants en âge de voter ne sont pas inscrits, et l’abstention risque de coûter cher à l’ANC. "On vote depuis longtemps déjà, on attend du changement, et il ne se passe rien", lance un habitant à l’AFP.

"On attend du changement"

Des commentaires qu’on entend en boucle au sein des classes défavorisées. "L’ANC a échoué lamentablement", accuse un chômeur sur le site Le Journal Info. "Après 1994, ils nous ont promis le paradis sur terre. On attend toujours. Ils nous font des promesses vides. Regardez, j’ai 60 ans et je ne me souviens même plus de la dernière fois où j’ai eu un emploi."

Mais la désaffection pour l’ANC ne signifie pas pour autant un raz de marée de l’opposition. Celle-ci est divisée en plusieurs partis qui doivent passer par des coalitions pour parvenir à s’emparer des villes. Le principal parti l’Alliance Démocratique (DA), est perçu comme un parti de Blancs, ce qui nuit à sa progression. A cela s’ajoute un grand nombre de candidats indépendants (1700 sur 60 000) en rupture de ban de leurs partis pour cause de désillusion. Autant de candidats qui provoqueront un éparpillement des voix avantageux pour l’ANC.

10 000 soldats vont être déployés jusqu’au mercredi 3 novembre à travers le pays, pour garantir la sécurité lors des élections municipales et assurer le bon déroulement des opérations de vote. 300 zones ont été classées à haut risque, dans des provinces comme le Gauteng (Pretoria, Johannesburg), le Kwazulu-Natal (Durban), le Cap Est et Ouest.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.