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Confinement en Afrique du Sud : police et armée accusées d'abus de pouvoir

Comment parvenir à confiner tout un pays, quand une grande partie de la population vit dans la misère ? Police et armée ont choisi la force. Revue de presse des journaux sud-africains sur les premiers jours chaotiques du confinement.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le 27 mars 2020, l'armée et la police surveillent des habitants d'Alexandra, un township de Johannesburg, venus se ravitailler dans un magasin. (SIPHIWE SIBEKO / X90069)

Les images sont saisissantes. L’armée a été déployée pour contrôler le confinement dans le quartier sensible d'Alexandra à Johannesburg. Mais les réseaux sociaux ont aussi largement publié des images montrant des membres des forces de l'ordre molestant des habitants, à Alexandra et dans d'autres townships du pays, pour faire respecter le confinement.

(Je vis dans une seule pièce avec cinq autres personnes. Comment puis je rester ici toute la journée ? ls n'ont qu'à venir et nous arrêter)

L'armée et la police sont accusées d'abus de pouvoir, et notamment d'humiliation quand elle impose des exercices physiques aux contrevenants arrêtés. La presse évoque de nombreux dérapages. Emploi d'un canon à eau sur des clients faisant la queue devant un magasin, intrusion sans motif dans des domiciles, tirs de balles en caoutchouc de façon disproportionnée.

Un policier tire des balles en caoutchouc pour forcer des habitants à rester chez eux, le 31 mars 2020 dans le township d'Alexandra à Johannesburg. (MICHELE SPATARI / AFP)

Le ministère de la Défense a reconnu et condamné ces usages excessifs de la force à l'égard des habitants.

Abus de pouvoir

Pire, le 29 mars à Gauteng, un homme a été abattu dans son jardin par une patrouille composée d'un policier et d'un agent de sécurité privé. Ces derniers poursuivaient un groupe surpris à consommer de l'alcool durant le confinement. Pour l'heure, seul l'agent de sécurité est emprisonné.

(La police et l'armée vont tuer notre peuple plus vite que le corona virus)

Des actes qui échauffent une population noire et pauvre. Selon certains politiques, ils rappellent les heures sombres de l'apartheid. Des actes qui, selon le journal Mail & Guardian, "semblent en contradiction avec les propos du président Ramaphosa". Lequel attendait que police et armée agissent avec "le plus de compréhension et de respect possible".

Le calme des campagnes

Une image bien différente vient des campagnes où l'activité se poursuit comme à l'accoutumée. Un résident de Haarlem, dans la province du Cap-Occidental, rapporte au journal Cape Times que les arboriculteurs continuent de cueillir leurs fruits. Des groupes d'ouvriers montent à bord des camions pour rejoindre les vergers. "Il n'y a pas de vérification, pas de police visible. La situation est hors de contrôle", conclut-il. Visiblement, le confinement tarde à se concrétiser ici.

Et comme partout dans le monde, les profiteurs ne manquent pas en ces temps difficiles. Ainsi, certains entrepreneurs n'hésitent pas à imposer à leurs salariés des conditions de travail scandaleuses pour augmenter la production. Un sommet ayant été atteint par un fabricant de masques de Durban. Il a enfermé toute une semaine 14 salariés dans son atelier afin de produire d'avantage de masques qui font, ici aussi, défaut.

Les prix flambent

Le commerce est également pointé du doigt. Les autorités ont annoncé enquêter sur 300 plaintes concernant des hausses excessives de prix de produits de première nécessité. Gels hydroalcooliques, masques, mais aussi papier toilette sont les plus concernés. Certains établissements se justifient, selon les autorités, par le retour à un prix normal suite à des promotions en janvier-février.

En revanche, d'autres distributeurs, plus civiques, ont annoncé un gel des prix pour la période du confinement. La commission de contrôle des prix a également noté une escalade des prix des produits agricoles : maïs, blé, oignons, carottes, etc.

Le paquebot "Queen Mary 2" accoste au port de Durban le 31 mars 2020. Les membres sud-africains de l'équipage sont autorisés à débarquer. (ROGAN WARD / REUTERS)

Pendant ce temps le paquebot Queen Mary 2 accoste à Durban pour laisser débarquer six membres sud-africains de l'équipage. Le millier de passagers va reprendre sa route, retour vers l'Australie sans avoir vu l'Afrique du Sud...

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