Le Conseil d'État presse le gouvernement d'agir sur les émissions de gaz à effet de serre : "Un signal utile" pour la directrice de la Fondation européenne pour le climat qui souhaite que la France aille plus vite
Laurence Tubiana, directrice de la Fondation européenne pour le climat, estime sur france info jeudi 11 mai que la demande du Conseil d'Etat au gouvernement français pour qu'il prenne des mesures supplémentaires de réduction des émissions de gaz à effet de serre est "utile".
franceinfo : Cette décision, c'est une piqûre de rappel ou une claque comme le disent certaines associations écologistes ?
Laurence Tubiana : C'est un signal utile. Les actions entamées sont beaucoup trop lentes. Il y a aujourd'hui des infrastructures toujours construites et toujours pensées pour une réduction des émissions bien plus faible. Il y a donc un décalage entre les objectifs de la stratégie bas carbone du gouvernement et les actions qui sont entamées. Concernant la réduction des émissions de gaz à effet de serre, ça dépend des années. En moyenne, on est autour de 2,5% de réduction, il faudrait donc qu'on augmente. On doit aller vers une réduction plus importante. On a dépassé le budget carbone jusqu'en 2018, là, on se remet un peu dans les clous depuis 2019 (en cause : le Covid-19 et les prix de l'énergie). Le problème, c'est qu'on polarise le débat en France : on oppose le nucléaire au renouvelable, on dit que la société civile est trop excessive, on parle de terrorisme vert... Au lieu de se dire que c'est une action collective dans laquelle il faut amener tout le monde, on polarise le débat.
Est-ce que les cadeaux fiscaux, comme aux Etats-Unis sont plus efficaces que les interdictions ?
Il faut sans doute jouer de tous les instruments. Ça peut être utile, à condition que ces cadeaux fiscaux soient accompagnés de vraies réalisations, c'est-à-dire qu'on ne les donne que s'il y a un résultat ou une performance, notamment en matière d'industrie verte. C'est d'ailleurs moins un cadeau fiscal qu'il faut faire qu'un investissement. Il faut que l'investissement aille dans ces secteurs de la technologie verte, mais il faut qu'il y ait des résultats.
Les Émirats arabes unis ont demandé mercredi à ce qu'on accélère sur la question de la captation et du stockage du C02 à l'échelle mondiale, est-ce que ça vous paraît réaliste ?
On nous dit que le pétrole et le gaz sont là pour toujours et qu'il faut résoudre le problème. Les énergies fossiles, c'est 80% des émissions mondiales de carbone. Si on veut continuer le pétrole et le gaz pour toujours, il faut faire quelque chose avec ce carbone. D'où l'idée de le capter et de le réintroduire dans le sol. Cette solution est connue, très coûteuse, parce qu'on ne peut pas forcément stocker le carbone là où on l'émet donc il faut le transporter. C'est illogique : il faudrait se débarrasser des énergies fossiles, mais comme on ne veut pas vraiment, on invente une solution bizarre. Il faut surtout accélérer l'inverse : les énergies renouvelables.
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