Climat : ce qu'il faut savoir des débats organisés vendredi dans les lycées
Le ministre de l'Education nationale a annoncé, lundi, la tenue de réunions officielles, le même jour que la "grève pour le climat" organisée de longue date.
Pour sauver la planète, "il y a mieux à faire" que de sécher les cours. Le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, a annoncé, lundi 11 mars, sur LCI, "l'organisation de débats sur l'environnement" dans les lycées. Ces discussions auront lieu vendredi, soit le même jour que la "grève sur le climat" organisée dans tout le pays par le collectif Youth for Climate. Voici ce qu'il faut en savoir.
Deux heures de débat à la place des cours
Le ministère de l'Education nationale précise que les réunions auront lieu "entre 16 heures et 18 heures", "lors d'une séquence banalisée dans chaque établissement". Plutôt que d'aller en cours, les lycéens devront "débattre sur les enjeux climatiques et sur les propositions de réponses qui peuvent y être apportées". Objectif annoncé : "déboucher sur des propositions d'actions à mettre en œuvre au quotidien dans les établissements".
@jmblanquer de @EducationFrance sur les manifestations des lycéens pour le #climat :
— La Matinale LCI (@LaMatinaleLCI) 11 mars 2019
"Structurer une idée va beaucoup plus loin que d'aller dans la rue"
#LaMatinaleLCI @chrisjaku pic.twitter.com/jyV2vgtRg4
Tous les lycées seront-ils au rendez-vous ? Philippe Vincent en doute. Déplorant une annonce "extrêmement précipitée", le secrétaire général du Syndicat national des personnels de direction de l'Education nationale (SNDPEN) estime que le débat "ne pourra pas avoir lieu dans tous les établissements". "Il y a des réunions, des conseils de classe, explique à franceinfo ce proviseur marseillais. Et puis, pas sûr que les lycéens aient envie de rester le vendredi soir."
Des lycéens comme animateurs ?
Les débats seront organisés "avec le concours des Conseils de la vie lycéenne (CVL)". Ces instances, qui existent dans chaque établissement, sont composées pour moitié d'élèves désignés par leurs camarades. Les jeunes élus pourraient donc se retrouver dans le rôle d'animateur. "Je m'en sens capable, à condition de pouvoir me préparer, réagit pour franceinfo un membre du CVL du lycée Mézeray-Gabriel d'Argentan (Orne), Jérôme Jouin-Guérard. Là, le délai paraît assez intenable, je ne vois pas comment on pourrait y arriver avant la semaine prochaine."
"Si on veut faire cela sérieusement, cela se prépare, confirme le patron du SNDPEN. Il n'est pas question de mettre en difficulté des élus du CVL dans un débat mal maîtrisé." Faut-il pour autant confier les clés aux chefs d'établissement ? "Je ne crois pas que le but recherché soit d'avoir un proviseur qui fasse la leçon aux lycéens", répond Philippe Vincent.
>> Débats : le syndicat lycéen UNL dénonce une décision "à la va-vite"
Elève en terminale ES, Jérôme Jouin-Guérard dit déjà "commencer à réfléchir" au format, "pourquoi pas avec la diffusion du film Demain puis la partie discussion". A l'issue de chaque débat, les élus lycéens seront chargés d'un travail de remontée des principales propositions. Selon le ministère, "une synthèse sera proposée au ministre lors de la réunion du Conseil national de la vie lycéenne qui se réunira le 5 avril prochain".
Un timing critiqué
"Faut-il y voir une volonté de rapatrier les lycéens dans les lycées ?" s'interroge Justine Renard, enseignante stagiaire en sciences de la vie et de la Terre (SVT) à Grenoble (Isère). Contactée par franceinfo, cette membre du jeune collectif Enseignant.e.s pour la planète déplore la "précipitation" du ministère à organiser cet événement le même jour que la "grève internationale pour le climat". Plus de 150 rassemblements sont annoncés à travers la France par les lycéens et étudiants à l'origine du mouvement.
"Ils auraient pu organiser le débat dans les lycées le mercredi ou le jeudi, mais non, c'est vendredi", déplore l'initiateur du rassemblement à Nancy, Maël Gauduchon, en classe de terminale. Il dénonce une "récupération".
Il y a clairement une volonté de casser la mobilisation. C'est diviser pour mieux régner.
Maël Gauduchon, lycéenà franceinfo
Le jeune homme ne mettra pas les pieds au lycée vendredi, pas plus que Marin Bisson. "On maintient notre action", assure à franceinfo l'organisateur de la "grève pour le climat" à Lyon. Cet élève de seconde au lycée Saint-Exupéry dit vouloir faire "décaler à un autre moment" la réunion dans son établissement. "Ce serait plus intelligent de mener ce débat avec tout le monde, pas seulement avec ceux qui n'iront pas manifester." Véréna Jonquais, membre du CVL du lycée, confirme à franceinfo le soutien des élus lycéens de l'établissement à cette demande de report. Elle se dit "emballée" par l'initiative du gouvernement.
Une méthode contestée
"Organiser un débat est une bonne chose mais, avant cela, ce serait bien que tout le monde sache de quoi on parle, avance la prof de SVT Justine Renard. Les élèves et même les enseignants, y compris en SVT, ne sont pas au courant de la gravité de la situation." Elle s'étonne d'une "annonce paradoxale par rapport au contenu de la réforme du lycée", qui, selon elle, "diminue la place des questions environnementales".
S'il se félicite de la tenue de débats dans les lycées, Marin Bisson regrette le manque d'ambition du gouvernement. "Ils font semblant de répondre à nos réclamations, se désole ce membre de Youth for Climate. Des débats, nous, on en fait depuis un moment. Ce qu'on espère du gouvernement, ce sont des actions."
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