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À vrai dire. Le numérique est-il vraiment une menace pour la démocratie ?

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Article rédigé par TV5MONDE - Antoine Fonteneau
France Télévisions

La technologie fait peur. Le piratage, les fausses nouvelles, les réseaux sociaux, l'intelligence artificielle... Autant de nouveautés qui bousculent nos sociétés. Certains pointent des risques pour la démocratie. D'autres rappellent que le numérique offre aussi la possibilité à tout citoyen de faire entendre sa voix.

Si comme Saint Thomas, vous "ne croyez que ce que vous voyez", vous allez peut-être devoir réviser vos certitudes. La preuve par l'image risque de disparaître.

L'an dernier, le site Buzzfeed en avait fait une première démonstration frappante en publiant une soit-disant déclaration de Barack Obama. Devant un drapeau des Etats-Unis, l'ancien président américain semblait y déclarer notamment, de manière plutôt triviale, "le président Trump est une sombre merde."

En réalité, Barack Obama n'a jamais fait une telle déclaration. Cette vidéo est un trucage. La voix est celle d'un imitateur et l'image est fabriquée par une intelligence artificielle.

En France, l'émission de France 2 "Complément d'enquête" avait tenté la même illusion numérique (un peu moins réaliste) avec Emmanuel Macron.

Rien de grave dans le cas de ces deux trucages assumés et révélés. Mais imaginez le même type de fausse déclaration d'un homme politique diffusé quelques jours avant une importante élection, par exemple. 

La confiance est-elle un pilier de la démocratie ?

Le système des élections repose sur un principe : celui du choix libre et éclairé du citoyen. Eclairé, cela veut dire informé le plus justement et le plus objectivement possible.

En l'absence de confiance, de certitudes, de faits vérifiés et vérifiables par tous, c'est tout un pan de la démocratie qui s'évapore.

Pour l'avocat Jean-Baptiste Soufron, ancien secrétaire général du Conseil national du numérique français (CNN) , "on a des processus démocratiques qui sont perturbés par des mensonges évidents, des manipulations, de l'agressivité ou de la violence. Même si ces mensonges, ces manipulations, cette agressivité se déroulent en ligne, ils n'en ont pas moins des conséquences très réelles sur les résultats des élections ou sur la qualité du débat public."

Les réseaux sociaux sont-ils coupables ?

L'essor des Facebook, Snapchat et autre Twitter  a accéléré la diffusion de fausses informations. L'autre reproche qui leur est souvent fait, c'est la création d'une "bulle de filtre", qui décide de ce que vous allez lire et voir, en fonction de vos goûts. L'algorithme des réseaux sociaux empêcherait un internaute d'être confronté à des opinions contraires aux siennes, à des informations qui ne vont pas dans le sens de ses croyances ou de ses idées.

"Le risque est de développer de fausses croyances, s'inquiète Olivier Ezratty, analyste et consultant en nouvelles technologies. Il est de développer une espèce d'illettrisme numérique qui consiste à croire de plus en plus à des choses qui n'ont aucun fondement scientifique, économique ou même sociologique et à accepter de réduire le rôle de la démocratie." 

Cette bulle de filtre peut -en outre- être alimentée par des organisations ou des États malveillants qui cherchent à manipuler l'opinion.

A l'inverse, les réseaux sociaux ont aussi permis à des mouvements démocratiques de s'exprimer. On le voit en ce moment en France avec les manifestations des "gilets jaunes". On l'a surtout vu spectaculairement en 2011 avec les Printemps Arabes. Des révolutions douces ou violentes en Tunisie, en Egypte ou en Libye. Ces mouvements avait été amplifiés par des appels sur Facebook.

Le numérique peut-il améliorer la démocratie ?

La technologie peut donc parfois se mettre au service de la démocratie. 

N'importe quel citoyen désormais peut faire entendre sa voix sur Twitter mais aussi avec des pétitions en ligne. Celle sur le climat en France a reçu plus de 2 millions de signatures, par exemple ; un chiffre inédit. Nombre d'autres pétitions plus modestes ont eu des conséquences concrètes : des décisions politiques, par exemple.

Les gouvernants ont également compris l'intérêt d'utiliser le numérique. Le grand débat national en France passe en partie par internet. Au Canada, Justin Trudeau avait lancé de vastes consultations citoyennes également. Des villes comme Paris, Reykjavík ou Madrid consultent désormais leurs habitants sur la toile pour une partie de leur budget ou pour améliorer le fonctionnement des services municipaux.

Quand les gouvernants n'ont pas peur d'entendre leurs concitoyens, la technologie se révèle un atout.

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