Dissolution d'associations par le gouvernement : de quoi parle-t-on ?
Gérald Darmanin souhaite dissoudre plusieurs associations, dont le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) et l'ONG Barakacity.
"51 structures associatives verront des visites des services de l’État" dans les jours à venir et "plusieurs d’entre elles seront dissoutes au conseil des ministres", a annoncé Gérald Darmanin au micro d’Europe 1 ce lundi 19 octobre. Après l'assassinat de Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie, le ministre de l’Intérieur a déjà annoncé sa volonté de dissoudre le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) et l’ONG BarakaCity. Mais est-ce aussi simple de dissoudre une association en France ?
La dissolution administrative à l'initiative de l'exécutif
Il y a différentes raisons pour lesquelles une association peut être dissoute. Celle évoquée par Gérald Darmanin est la dissolution administrative, via un décret pris en conseil des ministres, lorsque le gouvernement estime que l’association porte atteinte à l’ordre public. L’association peut former un recours administratif.
Il y a aussi d’autres types de dissolutions : la dissolution volontaire, quand les membres de l’association décident d’y mettre un terme, la dissolution automatique quand l’association a prévu une échéance précise à son activité et enfin la dissolution judiciaire quand l’activité de l’association est jugée illicite par le tribunal de grande instance.
Des critères précis à respecter qui datent pour certains de… 1936
Une procédure de dissolution doit répondre aux critères listés dans le code de la sécurité intérieure. Le texte fondateur de ce code est la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et milices privées. Il avait pour objectif, notamment, de dissoudre les ligues d'extrême droite de l’entre-deux guerres. Cette loi a été abrogée et reprise par l’article L 121-1 du code de la sécurité intérieure le 12 mars 2012 avec des critères bien précis.
Ainsi une association, par décret en conseil des ministres, peut être dissoute, par exemple, si elle provoque des manifestations armées dans la rue, si elle présente le caractère de groupes de combat ou de milices privées, si elle incite à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes du fait de leur origine, de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion ou encore si elle se livre sur le territoire français à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l’étranger.
Des dizaines de dissolutions de mouvements ou groupuscules déjà prononcées
Depuis 1936, la dissolution d'associations a tour à tour concerné des groupuscules d'extrême droite, d'extrême gauche mais aussi des mouvements indépendantistes.
En 2013, après la mort du jeune militant antifasciste Clément Méric, des groupuscules d’extrême droite avaient par exemple été dissous : Troisième Voie et Les jeunesses nationalistes révolutionnaires. Leur fondateur avait saisi le Conseil d'État pour "abus de pouvoir". La plus haute juridiction administrative avait jugé légale la dissolution de ces deux groupements mais avait annulé la dissolution d'une troisième association, Envie de rêver.
Plus récemment, quatre associations chiites ont été dissoutes. Selon le décret du 20 mars 2019 qui précisait les motifs de la dissolution du Centre Zahra, l'association entre autres, légitimait "de façon régulière le djihad armé" aussi bien "par les prêches dispensés au sein du lieu de culte qu'il abrite que par les écrits mis à la disposition des fidèles et des internautes". Quatre hommes avaient en septembre dernier été placés en garde à vue, soupçonnés d'avoir maintenu l'activité du centre culturel malgré sa dissolution.
Le fait de maintenir ou reconstituer un groupement dissous est passible de trois ans de prison et de 45 000 euros d'amende.
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