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Quatre choses à garder à l'esprit quand on écoute "La Marseillaise"

Quelques contresens circulent sur l'hymne national français, qu'on peut éviter en l'écoutant jusqu'au bout, et en connaissant un brin son histoire.

Article rédigé par Anne Brigaudeau
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Une semaine après les attentats de Paris, 700 personnes chantent "La Marseillaise" à l'église Saint-Sulpice de Paris, le 20 novembre 2015. (CITIZENSIDE/SIAVOSH HOSSEINI / AFP)
Combien de Marseillaise entendues, depuis les attaques du 13 novembre à Paris ? Bien trop pour Alexis, 26 ans, rescapé du Bataclan. "La Marseillaise à toutes les sauces, je n'en peux plus !", a confié à francetv info ce survivant. 
Un hymne national qui a résonné, une fois de plus, lors de la cérémonie d'hommages aux 130 morts des attentats, vendredi 27 novembre. Mais le chant officiel de la France souffre d'une mauvaise réputation : guerrier, raciste et xénophobe, selon certains, il est souvent critiqué. Quelques rappels s'imposent pourtant pour mieux comprendre cet hymne national. Et éviter les contresens.

Ce n'est pas un chant raciste

 "Aux armes, citoyens / Formez vos bataillons / Marchons, marchons / Q'un sang impur / Abreuve nos sillons !" Martial et sanglant, ce refrain a fait couler beaucoup d'encre, et suscité de nombreuses interprétations erronées. Le 14 mai 2014, l'acteur Lambert Wilson s'étonnait ainsi qu'on continue à chanter ces "paroles épouvantables, sanguinaires, d'un autre temps, racistes et xénophobes".

Il s'est attiré une volée de bois vert, dans Le Figaro, de l'historien Patrice Guéniffey. "Le 'sang impur' fait référence au sang des rois et des aristocrates, pas des peuples étrangers. La société d'Ancien régime était une société d'ordres fondée sur l'inégalité des droits, elle-même justifiée par la hiérarchie du sang", expliquait ce spécialiste de l'Empire.

En proclamant l'égalité des citoyens, les révolutionnaires ont retourné contre la classe dominante, qui pensait avoir un sang "plus pur", sa propre rhétorique. Dans "le vocabulaire des révolutionnaires, le 'sang' est moral et politique : celui des républicains est 'pur', c'est-à-dire vertueux, celui des monarchistes 'impur', c'est à dire vicieux", développe le philosophe Roger-Pol Droit dans Les Echos.

C'est un hymne à la liberté

Si elle est, incontestablement, un chant guerrier, La Marseillaise est aussi, et surtout, un hymne à la liberté. Avez-vous réellement lu les six couplets ? Tous invitent à briser les "chaînes" de la tyrannie, entendez la monarchie, ses lettres de cachets et ses décisions arbitraires.

Cette fiche du ministère de l'Education incite d'ailleurs les élèves à "trouver dix mots évoquant la privation de liberté". Joug, mains enchaînées, ignobles entraves, vils despotes... Livrez-vous à l'exercice, vous serez surpris de découvrir une Marseillaise plus émancipatrice qu'on ne le croit.

Elle contient des appels à la justice

Le chant fait des soldats (ennemis) les jouets d'une puissance ou d'une tyrannie qui les dépasse, adversaires qu'il convient d'épargner.
"A côté des appels au combat, il contient des rappels à la justice", écrit encore Roger-Pol Droit dans Les Echos. Il a raison. Voyez le cinquième couplet : "Français, en guerriers magnanimes / Portons ou retenons nos coups ! / Epargnons ces tristes victimes / A regret, s'armant contre nous". Ce sont les despotes qu'il faut abattre, et non les soldats, obligés, eux, de sacrifier leur vie.   

"La Marseillaise" s'est transformée en hymne par hasard

En 1792, la patrie et la révolution sont en danger, et l'armée autrichienne aux frontières de l’Est. A Strasbourg, rappelle Culturebox, les soldats de la Révolution se regroupent pour refouler l'ennemi. Le maire demande alors à un officier du génie de composer un chant de guerre destiné à entraîner aux combats ces armées. Claude Joseph Rouget de Lisle, 32 ans, rédige Le chant de marche des armées du Rhin.
Ce chant aurait pu sombrer dans l’oubli s’il n’était arrivé jusque dans la région de Montpellier. Là, un médecin, le docteur François Mireur, qui coordonnait le départ des Volontaires du Midi vers Strasbourg, l'entonne lors d’un banquet. Ce chant enthousiasme ses troupes au point qu'elles le chanteront à tue-tête tout au long de leur marche vers l’Alsace. 
En 1795, la Convention en fait un hymne national, désormais connu sous le nom de La Marseillaise. Abandonné comme tel en 1804, sous l'Empire, il est rétabli sous la IIIe République, en 1879, et est depuis lié à l'histoire de la République française.

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