"J'ai été psychologiquement anéantie" : l'infirmière violemment interpellée en juin 2020 se confie avant son procès
L'infirmière quinquagénaire avait été interpellée, avec du sang sur le visage, lors de la manifestation des soignants sur l'esplanade des Invalides à Paris, en juin 2020.
Les images avaient fait couler beaucoup d'encre : l'arrestation musclée d'une infirmière à Paris, sur l'esplanade des Invalides, le 16 juin 2020, lors d'une manifestation de soignants. Son procès s'ouvre lundi 22 février. Elle risque trois ans de prison et 45 000 euros d'amende, pour "outrage", "rébellion" et "violence sur personne dépositaire de l'autorité publique".
Sur la vidéo, on voit Farida, en blouse blanche, plaquée au sol par plusieurs policiers, tirée par les cheveux. Mais sur d'autres images, elle lance des pierres et fait des doigts d'honneur aux forces de l'ordre. "Quand je me suis levée, le 16 juin, pour aller manifester, c'était pour manifester, pas pour jeter du bitume, je ne suis allée agresser personne. Je suis quelqu'un qui soigne, ça fait 20 ans que je soigne."
"Bien sûr que j'aurais voulu ne pas faire ce geste, mais maintenant c'est fait et puis c'est tout."
Faridaà franceinfo
Epuisée par des mois à lutter contre le Covid-19 en gériatrie, sans moyens, ce jour-là en colère, sous les bombes lacrymogènes, Farida reconnaît avoir craqué : "Pour moi, mon geste était plus symbolique qu'autre chose, mais mon doigt d'honneur s'adressait surtout aux réformes de l'État. Moi j'ai craqué, tout le monde m'a vue craquer. Il y a aussi des gens qui craquent dans les services, ça c'est la réalité des soignants aujourd'hui."
Mais pour elle, la violence de l'interpellation était disproportionnée. Elle a porté plainte contre les policiers : "Cet événement est resté dans ma tête pendant plusieurs mois, ça tournait en boucle dans ma tête. J'ai vu deux ou trois fois un psychologue pour donner un sens à tout ça, j'ai été psychologiquement anéantie", confie aujourd'hui Farida.
"J'ai eu des blessures à la tête, j'ai eu des coupures derrière l'oreille, deux côtes fêlées."
Faridaà franceinfo
À l'approche du procès, dit-elle, "c'est un peu les montagnes russes" : "Quand je suis gagnée par le stress, j'ai des méthodes pour faire baisser la pression, en relativisant, en se disant qu'il y a des choses beaucoup plus graves dans la vie que ça. Notre but, c'est de faire notre travail dans des conditions humaines. On veut que les gens continuent à venir se soigner convenablement." Et si cette affaire doit permettre de parler des conditions de travail des soignants, Farida l'accepte volontiers. C'est, selon elle, le prix à payer.
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