: Vidéo L'article 24 du projet de loi sur la "sécurité globale" est "en contradiction avec la liberté d'informer", alerte le réalisateur David Dufresne
Le journaliste a jugé qu'une partie du projet de loi examiné à partir de ce mardi est contraire à la Déclaration des droits de l'Homme.
David Dufresne, réalisateur du film un pays qui se tient sage sur les violences policières sorti en septembre dernier, a estimé mardi 17 novembre sur franceinfo que l’article 24 du projet de loi sur la "sécurité globale" est "en contradiction avec la liberté d'informer et surtout avec la Déclaration des droits de l'Homme de 1789". Cet article, examiné ce mardi à l’Assemblée nationale, vise à protéger les forces de l’ordre. Il prévoit un an de prison et 45 000 euros d'amende contre toute personne qui diffuserait le visage ou tout autre élément d'identification d'un policier en opération.
franceinfo : Qu’est-ce qui ne va pas dans cet article, selon vous ?
David Dufresne : Ce qui ne va pas, fondamentalement, c'est évidemment l'atteinte à la liberté d'informer, la liberté d'informer pour les journalistes, mais aussi pour les citoyens. C'est-à-dire que l'idée que les policiers devraient ne plus être observables, ne plus être critiquables, être sous le regard public, donc se soustraire de ça, c’est en contradiction avec la liberté d'informer et surtout avec la Déclaration des droits de l'homme de 1789, tout simplement. L'article 12 de la Déclaration des droits de L'homme, qui est un des textes constitutionnels de la France, donc c'est très sérieux, dit bien "instauration d'une force publique pour l'intérêt de tous et non de ceux qui l'emploient". Force publique, cela veut donc dire au vu et au su de tous, c'est-à-dire que les policiers agissent en votre nom, en mon nom, au nom de tout le monde.
Les députés, porteurs de cette loi, disent qu’il ne s'agit pas d'interdire la diffusion de photos ou de vidéos de policiers ou gendarmes, mais uniquement leur caractère malveillant. Est-ce que ça vous rassure un peu ?
Non, cela ne me rassure pas. Le grand embarras autour de cet article, c'est qu'en fait, c'est extrêmement flou. C'est-à-dire que jour après jour, le discours des porteurs de la loi a évolué. Qu'est-ce que la malveillance ? La malveillance, c'est de filmer en direct ? Pendant un tournage, un policier va dire : "Là, vous êtes en train d'atteindre psychiquement, physiquement à ma personne". C’est extrêmement flou et c'est évidemment fait exprès. Ce flou, en fait, c'est quoi ? C'est envoyer un message, celui de Gérald Darmanin, qui dit : il faut tarir la source d'images.
Selon vous, cet article est liberticide ?
Le Haut commissariat des droits de l'homme de l'ONU a rendu un rapport de sept pages cinglant contre cette loi, notamment sur cet article. Ce n'est pas rien. Ce ne sont pas des antiflics, ce ne sont pas des haineux. L’ONU dit il y a un vrai problème d’atteinte à la liberté d’opinion, d’atteinte à la liberté d’expression. "Protéger ceux qui nous protègent". La formule fait mouche. Elle est juste. Mais la protection des policiers, c’est à partir du moment où on aura un véritable débat sur les pratiques policières. À partir du moment où l’IGPN fera vraiment son travail, où il y aura une véritable prise de conscience de la part des policiers et des syndicats de police sur le malaise qu'il y a entre la population et la police. Pas en disant à la population : "Arrêtez de filmer".
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