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Légitime défense et refus d'obtempérer : trois questions sur la législation qui encadre l'usage des armes par les policiers

La mort d'une passagère lors d'un contrôle routier samedi à Paris relance le débat sur les circonstances dans lesquelles les fonctionnaires sont autorisés à ouvrir le feu. Que dit la loi ? Franceinfo fait le point sur le cadre juridique en vigueur.

Article rédigé par David Di Giacomo, Antoine Krempf
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Photo d'illustration. (MARTIN ROCHE / OUEST-FRANCE / MAXPPP)

Les trois policiers placés en garde à vue après avoir tiré sur une voiture lors d'un contrôle samedi dans le 18e arrondissement de Paris sont ressortis libres, mardi 7 juin. Ces fonctionnaires – deux hommes et une femme – étaient interrogés par l'inspection générale de la police depuis dimanche. Deux d'entre eux ont tiré à neuf reprises sur le véhicule, dont ils affirment que le conducteur a tenté de leur foncer dessus. La passagère, gravement touchée à la tête par les tirs des policiers, est morte dimanche soir. Le conducteur a, lui, été gravement blessé. Deux enquêtes sont ouvertes : l'une pour tentative d'homicide sur les policiers, confiée à la police judiciaire et l'autre menée par l'IGPN. 

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La police des police a été saisie en raison de la gravité des conséquences de leurs tirs, précise le parquet de Paris. L'IGPN cherche à savoir si les policiers étaient en état de légitime défense. Le conducteur du véhicule soupçonné d'avoir foncé sur la patrouille de policiers à VTT, âgé de 38 ans, n'a pas de permis de conduire. Les deux passagers arrière ont expliqué qu'il avait justement refusé de s'arrêter en raison de ce défaut de permis. Les policiers, eux, assurent qu'il a voulu leur foncer dessus. L'un des fonctionnaires a d'ailleurs été légèrement blessé.

Dans quels cas les policiers peuvent-ils tirer ?

Cette affaire intervient un mois et demi après celle du Pont-Neuf, où un policier a été mis en examen pour homicide volontaire. Il avait tiré sur un véhicule et tué le conducteur ainsi que le passager avant, là encore dans le cadre d'un refus d'obtempérer. Des faits qui interroge une nouvelle fois les méthodes de la police. Ce type de délit routier justifie-t-il l'usage par les fonctionnaires de leur arme ? Dans quelles circonstances sont-ils autorisés à ouvrir le feu ?

Depuis 2017, comme pour les gendarmes, les policiers peuvent tirer sur un véhicule quand un conducteur n'obtempère pas et quand il est susceptible de porter atteinte à leur vie ou à celle d'autrui. Un nouveau cadre défini dans l'article 435-1 du Code de la sécurité intérieure, créé après la publication de la loi sur la sécurité publique du 28 février 2017. Pour l'affaire du Pont-Neuf, à ce stade de l'instruction, la légitime défense n'a pas été retenue, le policier étant mis en examen pour homicide volontaire. Pour l'affaire du 18e arrondissement, il faudra attendre la fin des gardes à vue pour savoir si des charges seront retenues contre les policiers.

La loi a-t-elle changé ?

Selon Fabien Jobard, directeur de recherche au CNRS, interrogé ce mardi sur franceinfo, cette nouvelle loi de 2017 est "venue mettre de la confusion dans des textes très clairs" sur la légitime défense. Historiquement, rappelle le chercheur, l'usage de l'arme devait être "absolument nécessaire, strictement nécessaire et absolument proportionnelle aux dangers encourus". Depuis l'application de cette loi, ajoute-t-il, les tirs des policiers et gendarmes ont augmenté de 50%, comme l'a révélé une note interne de l'IGPN.

Les refus d'obtempérer représentent le principal motif pour lequel les policiers utilisent leurs armes de service. En 2020, cela représentait par exemple 60 % de leurs tirs, selon l'IGPN. L'an dernier, les policiers et gendarmes ont tiré à 201 reprises sur des véhicules, selon le recensement du ministère de l'Intérieur.

Les syndicats de police assurent de leur côté que les fonctionnaires sur le terrain font face à un refus d'obtempérer "toutes les 20 minutes", soit 26320 refus d'obtempérer comptabilisés par le ministère de l'Intérieur. D'après un rapport du Sénat, le nombre de refus d'obtempérer est en hausse de 28% sur cinq ans, entre 2015 et 2020. 

Qu'en disent les responsables politiques ?

L'intervention des trois fonctionnaires samedi à Paris entraînant la mort d'une passagère a pris un tournant politique, illustrée par une passe d'armes entre Jean-Luc Mélenchon et Gérald Darmanin. "La police tue ! Et le groupe factieux Alliance, le syndicat de police, justifie les tirs et la mort du conducteur pour 'refus d'obtempérer'. La honte c'est quand ?", a interrogé sur Twitter, samedi 4 juin, le leader de La France insoumise. Des propos qu'il a dit ne pas regretter, mardi sur France Inter

Gérald Darmanin a, quant à lui, répondu que les policiers et les gendarmes méritaient le respect et que les insulter déshonorent ceux qui veulent gouverner. "Laissons les enquêtes se faire sans les utiliser comme des otages d'une campagne électorale", a ajouté le ministre de l'Intérieur.

Invitée elle aussi à réagir aux propos du leader de La France insoumise sur franceinfo mardi, Marine Le Pen a fustigé une "idéologie systématiquement anti-police" de Jean-Luc Mélenchon. "Il est toujours du côté des voyous, des criminels, jamais au côté des forces de l’ordre", a lancé l'ex-candidate à la présidentielle du Rassemblement national, qui a rappelé sa proposition d'une "présomption de légitime défense" pour les policiers.

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