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Disparition du petit Mathis : les quatre témoignages qui accablent son père Sylvain Jouanneau

L'enfant, a disparu en septembre 2011, quand son père a refusé de le ramener à sa mère au terme de son week-end de garde. Sylvain Jouanneau a été arrêté trois mois plus tard, mais le garçon reste introuvable.

Article rédigé par Louis Boy
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Sylvain Jouanneau, le père du petit Mathis, avant l'ouverture de son procès, à Caen (Calvados), le 1er juin 2015. (CHARLY TRIBALLEAU / AFP)

Où est le petit Mathis Jouanneau ? La famille de l'enfant attend la réponse depuis le 4 septembre 2011, quand son père ne l'a pas rendu à sa mère au terme d'un week-end de garde. Sylvain Jouanneau a été arrêté trois mois plus tard, seul. Son procès pour enlèvement et séquestration s'est ouvert, lundi 1er juin, devant les assises du Calvados. Mais la cour se heurte au silence de l'accusé sur le sort de son fils, qu'il assure avoir confié à "des personnes de confiance"

La mère parle d'un homme manipulateur

Divorcé de la mère de Mathis depuis 2007, Sylvain Jouanneau entretenait avec elle une relation très conflictuelle : il avait expliqué à son fils que sa mère et son compagnon étaient morts dans un accident. Cette dernière, qui s'est portée partie civile, a témoigné mardi. Elle a brossé le portrait d'un homme manipulateur, obsédé par l'idée de ne pas payer de pension alimentaire au point de lui faire signer un contrat, rapporte une journaliste de France Inter.

Sylvain Jouanneau était adepte des punitions sévères, et la souffrance de son fils "a commencé bien avant l'enlèvement", a expliqué sa mère : "Il revenait avec du malheur dans ses yeux." Tout le long de sa déposition, elle a parlé de son fils au présent, convaincue qu'il est toujours vivant. Mardi, elle s'est tournée une fois vers son ex-mari, les larmes aux yeux, pour lui demander : "Qu'as-tu fait de notre fils ? Avec qui il est ?"

Des témoins décrivent un homme "étrange" pendant sa cavale

La fuite de Sylvain Jouanneau était "minutieusement préparée", analyse France 3 Basse Normandie après les explications de ce dernier, lundi. Après une première nuit à Caen (Calvados), le père et son fils seraient partis vers Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), le 3 septembre 2011, où deux autres individus les auraient rejoints pour la suite du voyage, selon les explications du père.

Pourtant, les témoins interrogés par la cour mardi ont tous raconté avoir croisé un homme seul. Le premier affirme avoir vu Sylvain Jouanneau le 4 septembre, le jour où il aurait dû ramener son fils chez sa mère. Il jetait des objets sur un terrain vague, sans aucune trace de Mathis. Le lendemain, le témoin affirme avoir vu de nouveau sa voiture, vide, restée une semaine au même emplacement jusqu'à sa découverte par les policiers qui y ont retrouvé des emballages de jouets ou encore un siège réhausseur.

Un autre témoin, une marcheuse qui se trouvait sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle, le décrit comme un randonneur étrangement chargé, mais qui voyageait seul.

Sylvain Jouanneau a été arrêté le 9 décembre 2011 près d'Avignon (Avignon), seul et "sale comme quelqu'un qui vit dans des conditions précaires", expliquait alors le parquet de Caen.

Son ex-compagne évoque des menaces de mort

En janvier 2011, Sylvain Jouanneau tente une première fois d'enlever son fils. Mardi, sa compagne de l'époque a expliqué que c'est elle qui l'a alors convaincu de faire demi tour : "Il m'a fallu deux heures et demie pour le convaincre de rentrer. Il était hystérique." Elle l'a quitté un mois avant sa fuite, expliquant qu'elle ne "comprenait pas ses réactions." 

Pendant sa cavale, Sylvain Jouanneau lui a envoyé une lettre de menaces de quatre pages, lue devant la cour, et qui en dit long sur son état mental : "Tu te soumettras à toutes les exigences. Tu rentreras tous les soirs à 17 heures", lui ordonne-t-il, menaçant de s'en prendre à ses neveux et nièces. En larmes, elle a confié à la cour avoir encore peur de son ex-compagnon et de ses éventuels complices.

L'enfant est probablement mort, selon un expert psychiatrique

C'est le témoignage le plus glaçant de ces deux jours de procès. Mardi, le psychiatre Daniel Zagury, qui a expertisé Sylvain Jouanneau, a expliqué que l'hypothèse "hélas la plus probable" était la mort de l'enfantL'expert a évoqué le syndrome de Médée qui est avancé quand un parent tue l'enfant pour punir l'autre parent.

Pour l'expert, Jouanneau n'est pas atteint de maladie mentale, mais souffre de forts troubles de la personnalité, qui ont pu altérer son discernement. "Aucune inquiétude ne transpire de son discours vis-à-vis de son fils", a assuré le psychiatre. Ce qui ne veut pas forcément dire que Sylvain Jouanneau ment : il pourrait avoir "gommé" son acte "de sa propre mémoire" pour "retarder le moment de la confrontation avec son geste". 

Et l'expert de conclure qu'il est "possible, voire probable" que le père de Mathis reste muré dans son silence "pour le restant de ses jours".

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