: Enquête franceinfo Présidentielle 2022 : Bertrand, Barnier, Pécresse... On a demandé aux présidents des fédérations LR leur candidat préféré
Nous avons contacté les 101 présidents de fédération Les Républicains avec une question : "Avez-vous une préférence parmi les six candidats en lice au congrès du parti ?"
"Les candidats vont tourner dans les fédérations comme une abeille devant un pot de miel !" Cette métaphore choisie par un ténor des Républicains en dit long sur l'importance de la bataille qui se joue à droite, avant le congrès du 4 décembre prochain, lequel désignera le candidat soutenu par le parti pour la prochaine élection présidentielle. Un vote décisif, auquel participeront les seuls adhérents LR à jour de leur cotisation (ils étaient exactement 87 764 au dernier pointage, en forte hausse ces dernières semaines). Ils auront le choix entre six candidats : Valérie Pécresse, Michel Barnier, Eric Ciotti, Philippe Juvin, Denis Payre et Xavier Bertrand, qui a fini par accepter ce lundi d'y participer.
Pour avoir une idée des rapports de force actuels, nous avons contacté les 101 présidents de fédération LR, un pour chaque département français : en date du jeudi 14 octobre, 95 d'entre eux ont accepté de répondre, anonymement ou non, à la question "Avez-vous une préférence parmi les six candidats en lice au congrès du parti ?" Leur rôle et leur influence sur le vote au congrès sont importants, même s'il convient de préciser que les adhérents seront libres de leur choix, quel que soit celui de leur président de "fédé".
Michel Barnier en avance sur ses concurrents
Premier enseignement : l'ancien commissaire européen Michel Barnier arrive nettement en tête de ce recensement, avec 28 soutiens. "Il est resté fidèle au parti, il a l'expérience et la stature présidentielle, justifie un responsable LR du sud de la France. Sa tête, son cœur et ses tripes sont alignées, alors que les autres font trop de Commedia dell'Arte !" Pour un président breton, Michel Barnier est même "un roc dans la tempête."
Au sein de l'équipe de campagne de Michel Barnier, ces résultats sont accueillis avec "plein d'espoir pour la suite". "Cela correspond à ce que je ressens aujourd'hui chez les militants et les cadres du parti", se réjouit son conseiller politique Daniel Fasquelle, président de la fédération LR du Pas-de-Calais. "Il faut maintenant que Michel conforte cette avance et renforce sa notoriété auprès des Français. Cela va se faire naturellement." L'ancien ministre de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy a prévu en moyenne trois déplacements par semaine dans les fédérations, d'ici au 4 décembre, afin de rencontrer les militants. Il a aussi nommé un référent dans presque chaque département pour recueillir les parrainages nécessaires.
Pourtant, dans le parti, beaucoup doutent fort que le choix Barnier soit le bon pour 2022. "Son discours est brillant sur le fond mais ultra soporifique sur la forme", tacle un responsable de "fédé" qui a vu Michel Barnier à l'œuvre récemment. "Avoir une gueule de président, ça ne suffit pas ! s'alarme un autre. Je n'ai toujours pas compris quel serait son chemin politique pour gagner la présidentielle." Selon un sondage Harris Interactive pour Challenges, portant sur la semaine du 13 octobre, Michel Barnier ne recueillerait que 7% d'intentions de vote au premier tour s'il était le candidat de la droite, 4 points derrière Valérie Pécresse et 7 derrière Xavier Bertrand.
Valse-hésitation autour du cas Xavier Bertrand
Autre leçon importante de notre enquête : Xavier Bertrand (18 soutiens chez les présidents de fédération LR) et Valérie Pécresse (13), bien qu'en avance sur Michel Barnier dans les sondages, se classent à ce stade derrière l'ancien "Monsieur Brexit" chez les cadres locaux du parti.
Au sujet de Xavier Bertrand, les avis sont contrastés. "Il est le seul qui peut nous emmener à la victoire", estime une présidente d'une importante fédération, "les militants veulent gagner, le vote Bertrand c'est le vote utile", dixit une autre. Il "est celui qui ressemble le plus aux Français", souligne encore le responsable d'une fédération bretonne. D'autres ont du mal à lui pardonner son départ du parti en 2017. "Son attitude arrogante et son manque de respect pour les instances du parti et les militants laissent des traces", juge ce président d'une fédération méditerranéenne.
Cependant, depuis que l'ancien secrétaire général de l'UMP a accepté, après moult hésitations, de participer au congrès de son ancien parti, le vent pourrait tourner. "Sans cette décision, Michel Barnier était sûr de gagner, estime un cadre des Républicains et président de fédération. Maintenant qu'il est rentré dans le jeu, beaucoup de ténors vont le soutenir. Ça va être très serré."
L'entourage de Xavier Bertrand minimise, sans surprise, les résultats de notre recensement et se montre confiant. "On est convaincus qu'on va gagner parce qu'on est convaincus que les militants ont du bon sens", résume un parlementaire proche du candidat. Pour rattraper son retard, l'ancien ministre de la Santé a envoyé, mardi, le même SMS à de nombreux présidents de fédération pour défendre sa démarche et organiser sa campagne : il compte se lancer dès cette semaine dans un vaste tour de France des fédérations LR. Objectif : en visiter une cinquantaine d'ici le congrès, à commencer par l'Ain, dès jeudi soir.
"Le jeu est hyper ouvert"
Troisième dans notre enquête, Valérie Pécresse accuse elle aussi un retard malgré une campagne très active. Parmi les 13 présidents de fédération LR qui la soutiennent, tous saluent sa "compétence" et sa "capacité à incarner la fonction présidentielle". "Et puis une femme président de la République, ça aurait de la gueule, non ?" se projette ce responsable ultramarin. Mais pour le président d'une importante fédération, la candidature Pécresse passerait presque inaperçue. "Chez moi, ils vomissent Bertrand, mais ils ne me parlent même pas de Pécresse !" raconte-t-il. Une autre résume : "Plein de gens soutiennent Valérie par fidélité, mais ils n'y croient pas."
Reste un motif d'espoir pour tous les candidats : un tiers (33 sur 101) de ces cadres du parti sont encore indécis à sept semaines du congrès. "Le jeu est hyper ouvert, tout est possible", estime un responsable encore hésitant. "On attend de voir qui va se déplacer dans notre département, ce sera important", glisse un autre. D'autant que parmi les fédérations encore indécises, certaines comptent le plus d'adhérents LR à jour de cotisation. "On va aller les chercher un par un", lance avec gourmandise un proche d'un candidat. Il leur reste 51 jours pour les convaincre.
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