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Neutralité politique, données personnelles… Quatre questions sur l’application mobile Elyze, le Tinder de l'élection présidentielle

L'application a été téléchargée plus d'un million de fois mais a suscité des critiques, notamment de la part de Jean-Luc Mélenchon.

Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
Publié Mis à jour
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L'application Elyze, le 11 janvier 2022. (RICCARDO MILANI / HANS LUCAS / AFP)

Vous avez du mal à vous intéresser à la course à l'Elysée ? L'application mobile Elyze vous promet de vous "faire aimer la présidentielle". Disponible depuis le 2 janvier sur smartphone, elle a été téléchargée plus d'un million de fois et s'accroche désormais solidement au podium des applis les plus populaires sur iPhone et Android. Mais des critiques s'élèvent aussi sur les risques concernant la protection des données personnelles des utilisateurs et les biais politiques qu'Elyze pourrait entraîner. Franceinfo répond à quatre questions sur cette application qui agite la campagne.

1Comment fonctionne Elyze ?

Avec Elyze, les amateurs de l'application Tinder ne sont pas dépaysés. A la manière du géant de la rencontre sur téléphone, Elyze fait "matcher" l'utilisateur avec un candidat en fonction des propositions politiques qu'il approuve. "Arrêter la construction d'éoliennes", "instaurer le vote à 16 ans", "ne pas participer aux Jeux olympiques de 2024", "créer 40 000 places de prison supplémentaires"… Pour chacune de ces mesures, vous pouvez approuver, désapprouver ou ne pas répondre en "swipant" (en balayant l'écran).

A partir de vos réponses, l'application calcule votre taux de compatibilité avec le programme des différents candidats à la présidentielle. Ce résultat est affiné au fur et à mesure de vos "swipes".

2Qui est derrière cette application ?

Elyze a été développée par deux amis, Grégoire Cazcarra, 22 ans, président du mouvement citoyen Les Engagés, et François Mari, 19 ans, étudiant à HEC Montréal. Plusieurs bénévoles ont également rejoint l'aventure. "Elyze a été créée en réaction à une de nos amies de fac, Elise, qui avait tourné le dos à la politique, non par désintérêt, mais lassée que la classe politique ne se préoccupe pas des jeunes", explique Gaspard Guermonprez, youtubeur proche de l'équipe, à France 3 Hauts-de-France. "Nous avons voulu créer un outil pédagogique et ludique pour inciter les jeunes à s'intéresser à la présidentielle, et ramener cet électorat vers l'isoloir."

3L'application est-elle vraiment neutre politiquement ?

Les fondateurs l'assurent : "Nous sommes neutres et apolitiques, on a simplement retranscrit, avec le plus grand soin, les programmes des 15 candidats retenus", insiste Gaspard Guermonprez auprès de France 3 Hauts-de-France"L'idée, ce n'est vraiment pas d'être une consigne de vote, mais d'aider chaque utilisateur à mieux comprendre les projets de chaque candidat, sans en favoriser ou en défavoriser un", renchérit Grégoire Cazcarra, interviewé par Brut.

Malgré ces engagements, plusieurs problèmes ont été soulevés par des utilisateurs. Dans une première version de l'application, les quinze candidats sélectionnés à partir des sondages n'avaient pas le même nombre de propositions enregistrées, selon Le Point. Et certaines propositions d'Emmanuel Macron, pourtant pas encore officiellement candidat, étaient issues de son programme de 2017.

Le classement des candidats "les plus compatibles" aux réponses de l'utilisateur a aussi créé des remous. Ainsi, avec un même nombre de réponses favorables pour plusieurs candidats, c'est Emmanuel Macron qui arrivait en tête du podium, comme l'a remarqué Mathis Hammel, expert en cybersécurité. Un problème lié au codage de l'application qui a été résolu, assurent les fondateurs. Un résultat "ex aequo" devrait également être bientôt en ligne, a fait savoir François Mari, interrogé par Libération. "Encore un coup tordu l'appli Elyze… A qui profite ce mauvais coup ? Devinez…" avait réagi, entre-temps, le candidat de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon.

L'ingénieur en informatique Mathis Hammel a également trouvé une faille dans l'application permettant de modifier les propositions des candidats"On a été dépassés par le succès de l'application, je suis le seul à coder dans l'équipe, j'essaye de prendre en compte tous les retours, qui sont normaux, mais la surcharge de travail est énorme", a reconnu François Mari dans Libération.

4Elyze présente-t-elle un risque pour vos données personnelles ?

Lorsque vous téléchargiez l'application Elyze, vous pouviez donner plusieurs informations personnelles : votre âge, votre genre, ainsi que votre code postal. Celles-ci étaient ainsi associées à vos réponses sur la présidentielle et l'application se réservait le droit de les revendre à des tiers de manière "toujours anonymisées". Un traitement des données qui avait créé des inquiétudes, jusqu'à la Cnil, gendarme français des données personnelles, qui avait annoncé qu'elle allait vérifier si Elyze respectait bien la réglementation en la matière.

Face à ces inquiétudes, les co-fondateurs ont décidé de faire machine-arrière. Depuis mercredi 19 janvier, l'application ne conserve désormais plus les données de ses utilisateurs. "Toutes les données" qui ont été collectées "sont automatiquement effacées quand l'utilisateur relance l'appli", a affirmé à l'AFP François Mari, l'étudiant de 19 ans qui est l'un des co-fondateurs de l'application et qui a écrit le code de celle-ci. Par ailleurs, il n'y a plus de collecte des données pour les nouveaux utilisateurs.

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