Européennes : pour les candidats de gauche battus, "il y a eu un vote défouloir"
Avec de très mauvais scores aux élections européennes de dimanche, de nombreux candidats de gauche n'ont pas été élus ou réélus. Comment analysent-ils leur défaite ?
"Nous avons pris collectivement une branlée", a déclaré Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du PS, lundi 26 mai. Au lendemain des élections européennes, de nombreux députés socialistes et écologistes laissent leur siège à des élus Front national. Certains, pourtant placés en tête de liste, n'ont pas été élus. Tous parlent d'une "désespérance" des Français, de la "menace" du vote FN. Les constats (et les éléments de langage) sont souvent partagés et les responsabilités pointées timidement. Ces candidats, battus, ont eu l'impression d'avoir fait "une bonne campagne". Alors, comment expliquent-ils cette débâcle ? Francetv info a recueilli leurs réactions.
Marine Le Pen, superstar de la campagne
"Les thèmes de campagne ont été confisqués par le Front national", affirme Sandrine Bélier, contactée par francetv info, et très affectée par les résultats de la veille. L'eurodéputée d'Europe Ecologie-Les Verts n'a pas été réélue dans l'Est et dans la circonscription, son parti se positionne seulement quatrième avec 8,92% des suffrages. "Au lieu de débattre, il a fallu en permanence démonter les mensonges", poursuit l'ancienne parlementaire européenne. La candidate EELV explique que sa campagne de terrain n'a pas été récompensée. "Je pensais vraiment que les gens auraient voté pour du 'vu sur le terrain' plutôt que pour du 'vu à la télé'", soupire Sandrine Bélier, qui confie avoir reçu "une claque particulièrement violente".
Claude Roiron, candidate PS pour la première fois aux européennes et battue dans la circonscription Nord-Ouest, confirme que le FN a été omniprésent. Les médias sont d'ailleurs montrés du doigt. "Tous les débats ont tourné autour de Marine Le Pen, la campagne s'est faite sur la starification d'une personne", regrette la candidate.
Le contexte national, un handicap pour les candidats
Avec 13,98% des voix, le PS arrive péniblement en troisième place des élections européennes. "On a pris de plein fouet le fait d'être un parti de gouvernement", concède Catherine Trautmann. La députée européenne sortante était en deuxième position sur la liste PS dans l'Est, qui n'a obtenu qu'un siège au Parlement. Le PS avait placé l'ancien syndicaliste Edouard Martin en tête de liste. Lui est élu, pas elle. Si Catherine Trautmann reconnaît qu'il y a eu "un problème de stratégie" dans cette circonscription, pas question pour elle d'attaquer Solférino. Pierre Pribetich, député sortant et troisième sur cette liste, se garde bien de mettre en cause Edouard Martin. Le candidat pense qu'il y a eu "un vote défouloir". Mais pour lui, il ne doit pas y avoir d'inflexion de l'exécutif : "Le gouvernement doit continuer sa politique mais accélérer le pas", déclare-t-il à francetvinfo.
Claude Roiron, candidate dans le Nord-Ouest, ne partage pas complètement cette analyse. "Au PS, on ne parle plus que d'économies", déplore-t-elle, contactée par francetv info. "L'électorat ouvrier et les classes moyennes votent désormais FN. Le PS doit rappeler quelles sont les valeurs de la gauche, celles de solidarité et de redistribution des richesses", assure Claude Roiron. "Les annonces faites sur la baisse de la fiscalité ou envers les fonctionnaires n'ont eu aucun impact sur le vote. La politique ne peut pas se réduire à de la technique et de l'image", conclut-elle amèrement sans vouloir attaquer davantage les choix de François Hollande et Manuel Valls.
L'Europe, grande oubliée des débats
"L'Europe, c'est le quotidien pour les élus locaux notamment pour les projets d'infrastructures, et on ne le dit pas assez", se désole Karine Gloanec-Maurin, deuxième sur la liste PS Massif-Central Centre, contactée par francetv info. Elle était candidate pour la troisième fois aux européennes et pour la première fois dans une position éligible. La vice-présidente de la région Centre regrette que la campagne des européennes n'ait pas été abordée dès les municipales, adressant là un faible reproche à son parti. Même constat pour Sandrine Bélier.
L'eurodéputée EELV sortante de la circonscription Est estime par ailleurs que la "campagne a été relayée très tard". Excepté ces dernières semaines, "on ne parle jamais d'Europe", affirme-t-elle. La faute à qui ? Aux partis, certes, mais surtout aux médias, selon KarineGloanec-Maurin. "En tant qu'élue, je réunis tous les deux mois des intervenants européens. J'invite la presse, mais je ne vois personne", raconte-t-elle.
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