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Grève à la SNCF : la mobilisation des cheminots est-elle en train de faiblir ?

La direction annonce un taux de grévistes en légère baisse. Plusieurs facteurs expliquent ce fléchissement, selon les syndicats, qui assurent que la détermination des agents reste intacte.

Article rédigé par Fabien Magnenou
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Des cheminots manifestent contre la réforme de la SNCF prévue par le gouvernement, vendredi 13 avril 2018. (ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP)

Avec 22,5% de grévistes en milieu de matinée, le taux de participation des cheminots au mouvement de contestation est en légère baisse, selon les chiffres communiqués par la direction de la SNCF, vendredi 13 avril. Le taux de grévistes chez les personnels indispensables à la circulation des trains est ainsi de 38%, contre 48% lors du premier jour du mouvement. La compagnie ferroviaire a expliqué au magazine Capital ne pas avoir communiqué de chiffres pour le dimanche 8 avril, un jour de repos, car les données "n'étaient pas assez significatives".

La mobilisation reste tout de même extrêmement forte chez les conducteurs (66%) et les contrôleurs (60%), même si le taux de participation des aiguilleurs semble marquer le pas (39%). Conséquence : le trafic devait être un peu moins perturbé pour le début du troisième épisode de la grève en pointillé. Contactée par franceinfo, la SNCF refuse de commenter cette évolution mais lâche tout de même que "les chiffres parlent d'eux-mêmes", suggérant un relatif soulagement.

Pour autant, seul un TGV sur trois, un TER sur trois et deux Transilien sur cinq sont prévus vendredi et samedi. C'est peu. Avec quatre jours de données, il semble prématuré d'évoquer un éventuel essoufflement du conflit. "Nous n'avons pas d'objectif de participation, hormis le 100%", répond Béranger Cernon, secrétaire général CGT-Cheminots à Paris-Gare de Lyon. Interrogé par franceinfo sur cette baisse de la participation, le syndicaliste assure qu'il "faut ajouter 6 ou 7 points" aux taux communiqués par la direction. Il rappelle également que "faire grève n'est pas une partie de plaisir".

Béranger Cernon évoque également des explications conjoncturelles, en cette veille de week-end et de départs en vacances pour la zone C. "Il y a une énorme pression de la direction, avec un dévoiement du droit de grève", estime-t-il. "Si un cheminot veut être en grève vendredi alors qu'il est en repos samedi et dimanche, la direction va lui dire que ces deux jours seront eux aussi comptés comme des jours de grève".

Quand on part sur un conflit long, on a forcément un effet yo-yo, avec des hausses et des baisses. La mobilisation, par exemple, sera beaucoup plus forte le 19 avril prochain, avec la mobilisation nationale.

Béranger Cernon

à franceinfo

Pour les agents, l'argent reste le nerf de la guerre. Lors des grèves reconductibles classiques, les agents commençaient à peiner "au bout de cinq jours", estime l'élu CGT. "Mais pour le moment, ajoute-t-il, il est encore trop tôt et la question financière n'est pas encore mise en avant chez les agents qui souhaitent faire grève." Le syndicaliste souligne au passage "la grande solidarité sur ces grèves", à travers notamment les cagnottes en ligne en faveur des grévistes. "Cela démontre que les gens sont attachés au service public."

>> Comment les grévistes de la SNCF veulent gagner la bataille de l’opinion

Autre composante essentielle : le soutien populaire. Conscients de l'importance d'obtenir le soutien de l'opinion pour enraciner leur mouvement, les syndicats restent attentifs aux sondages. Une majorité de Français interrogés (55%) estime que le mouvement de grève reconductible à la SNCF n'est pas justifié, selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting pour franceinfo, publié vendredi. Lors de la précédente enquête du 5 avril, ils étaient 57%. "La bataille de l'opinion publique est hyper importante, résume Béranger Cernon. Nous regardons de très près les sondages", tout en ajoutant qu'ils ne "veulent parfois pas dire grand chose".

Si le gouvernement appuie sur les sondages et la participation pour justifier que la grève s'essouffle, je pense qu'il s'expose à de graves déconvenues.

Béranger Cernon

à franceinfo

Difficile, enfin, d'évoquer un éventuel essoufflement de la mobilisation, alors que les syndicats n'ont encore rien modifié dans le calendrier des grèves. Après réception d'un courrier de la ministre des Transports, la CFDT dit tout de même avoir noté "quelques avancées", avec la prise en compte "d'amendements portés par les cheminots CFDT", comme la question du volontariat et celle du "droit de retour" des cheminots SNCF, en cas d'éventuelle défaillance d'un opérateur concurrent. L'Unsa, deuxième syndicat à la SNCF, a également reçu un courrier lui promettant de réserver "un avis favorable" à certaines de ses demandes.

Les prochains jours pourraient être déterminants pour la suite du conflit, alors que les députés ont terminé jeudi la première lecture du projet de loi de réforme ferroviaire, qui fera l'objet d'un vote solennel mardi, puis d'un passage au Sénat. En attendant, les syndicats continuent de faire pression sur le gouvernement. Vendredi, plusieurs rassemblements ont été organisés en France. Plusieurs centaines de personnes – cheminots, étudiants ou enseignants – se sont ainsi réunies à Paris, avec des drapeaux SUD-Rail et CGT-Cheminots.

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