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Habillement : l'Alliance du Commerce demande "un plan dédié à la transformation du secteur"

Confrontés à la double concurrence du low-cost et des boutiques de seconde main, les enseignes de milieu de gamme doivent investir pour "se transformer", estime Yohann Petiot. Il appelle à une aide publique comme dans le secteur de l'industrie.
Article rédigé par franceinfo
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Des promotions dans un magasin de vêtements de Montpellier. (GUILLAUME BONNEFONT / MAXPPP)

"Nous appelons aujourd'hui les pouvoirs publics à véritablement mettre en place un plan dédié à la transformation du secteur" de l'habillement demande mardi  7 février  sur franceinfo, Yohann Petiot, directeur général de l'Alliance du Commerce, qui regroupe grands magasins et enseignes de l'habillement et de la chaussure. Il dresse un bilan en demi-teinte des soldes d'hiver.

Nombres de professionnels du prêt-à-porter sont dans une "situation financière extrêmement délicate", analyse-t-il. "Il faut absolument se transformer. Et la clef pour se transformer, c'est l'investissement", martèle Yohann Petiot dont l'organisation fédère 27 000 magasins et près de 170 000 salariés.

franceinfo : Le bilan des soldes est en demi-teinte, avec un secteur de l'habillement en souffrance. Comment analysez-vous ce phénomène ?

Yohann Petiot : On est depuis un an dans un contexte d'inflation extrêmement importante et les Français subissent à la fois la hausse de leurs factures d'énergie et la hausse de leurs dépenses alimentaires. Par conséquent, ils ont parfois des choix à faire dans leur budget de dépenses, et malheureusement, c'est le secteur de l'habillement, c'est-à-dire avec des achats moins essentiels au quotidien, qui en souffre.

Un secteur de l'habillement frappé à la fois par deux phénomènes : la montée du marché de seconde main et celui du lowcost…

Oui, les vêtements de friperies constituent un marché en forte croissance, qui représente plus de 1,2 milliard d'euros aujourd'hui dans notre pays. Cela répond en réalité à une double attente des clients. D'abord, avoir accès à du bas prix parce que les offres de seconde main sont souvent à un prix inférieur au neuf. Ensuite, cela répond à une demande de consommation plus responsable avec moins d'impact sur notre planète. Et de l'autre, on a un consommateur qui, face à un contexte inflationniste avec des contraintes fortes sur le pouvoir d'achat peut à la fois se faire plaisir avec un produit un peu plus premium, à plus forte valeur. Et puis de l'autre côté, on va acheter des produits à bas prix pour compléter son dressing. Ce qu'on voit véritablement aujourd'hui, c'est une bipolarisation de la consommation avec d'un côté des consommateurs qui recherchent toujours le prix le plus bas - on voit d'ailleurs le succès de toutes ces marques lowcost, d'entrée de gamme qui fonctionnent extrêmement bien -, et de l'autre, des consommateurs qui ont un pouvoir d'achat un peu plus élevé, y compris durant la crise, et qui, eux, se dirigent vers des offres plus premium, voire luxe pour ceux qui en ont les moyens.

Comment les indépendants et les enseignent peuvent s'organiser dans les petits centres-villes ?

Tous ces acteurs qui sont sur ce milieu de gamme ne sont pas condamnés à disparaître, mais ils sont amenés à se transformer. Il faut absolument se transformer. Et la clef pour se transformer, c'est l'investissement. On investit dans la marque, on investit dans le produit, il faut investir aussi dans les magasins, surtout aujourd'hui avec toutes les économies d'énergie que nous avons à faire.

Il faut donc rénover tous les magasins, économiser, se transformer sur le digital également. Toutes ces dépenses-là représentent des investissements élevés pour l'ensemble des acteurs dans un moment où la situation financière est extrêmement délicate.

Yohann Petiot

à franceinfo

Pour les entreprises qui sont les plus fragiles, il y a un risque de perte d'emploi ou de restructuration de réseaux à la clé. C'est pour ça que nous appelons aujourd'hui les pouvoirs publics à véritablement mettre en place un plan dédié à la transformation du commerce, comme ils le font aujourd'hui pour le secteur industriel avec cette enveloppe de plus de 50 milliards d'euros prévus dans le plan France Industrie à l'horizon de 2030. Il faut qu'on puisse mettre les mêmes moyens pour transformer le commerce. C'est autant d'emplois qui sont aujourd'hui présents dans nos territoires.

De grandes enseignes sont en difficultés. Camaïeu a été placé en liquidation, Kookaï est en redressement judiciaire, même chose pour Go Sport qui ferme des magasins, C&A fermera à son tour deux magasins à Paris. Comment expliquer ces difficultés pour ces enseignes de prêt-à-porter "iconiques" ?

Beaucoup d'entre-elles ont en effet connu un grand succès il y a 20 ou 30 ans mais aujourd'hui si elles veulent maintenir leur marque dans l'air du temps, elles sont obligées d'investir. Or, pour ces marques qui ont connu des difficultés financières ces dernières années, elles sont en situation de sous-investissement, elles ont pris un retard qu'elles ne peuvent pas rattraper par rapport à la concurrence.

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