Une "réforme à coups de massue", un président "affaibli et isolé", "la République bloquée"... Le 49.3 sur les retraites vu par la presse étrangère
"64 ans, c'est non" : l'affichette brandie dans l'hémicycle par les députés insoumis est en première page de nombreux quotidiens étrangers vendredi 17 mars, du New York Times américain à l'espagnol El País en passant par le Daily Telegraph britannique et le quotidien belge Le Soir. Ce dernier titre sur "le coup de force" de l'exécutif en référence à l'utilisation de l'article 49.3 de la Constitution pour faire passer la réforme des retraites sans vote à l'Assemblée nationale.
Outre-manche, le Guardian évoque un "passage en force" tandis que Le Temps de Genève parle, lui, carrément de "bouton nucléaire du 49.3". "Une violence démocratique tolérée sur les textes budgétaires, estime le quotidien suisse, mais pas sur un sujet aussi sensible et important pour les Français que la réforme des retraites." Une "réforme imposée à coups de massue", assène pour sa part le Tageszeitung. Le journal allemand s'étonne qu'en France, "un mot de l’exécutif plutôt qu’un vote en bonne et due forme au Parlement suffise à faire passer, en toute légalité, un projet de loi que la population rejette clairement".
Macron uses special powers to force through plan to raise pension age https://t.co/1RbB4ta7vr
— The Guardian (@guardian) March 17, 2023
La presse étrangère pointe également le risque d'un embrasement. En Italie, La Repubblica publie en Une la photo de manifestants réunis jeudi soir place de la Concorde à Paris avec fumigènes et ambiance crépusculaire. Le quotidien allemand Die Zeit s'inquiète, quant à lui, d'une protestation qui menace de se radicaliser, notant que dans certaines municipalités les employés des centrales électriques ont coupé l’alimentation.
Emmanuel Macron "n'a jamais paru si faible"
Le président français est largement désigné comme LE responsable de cette crise. Pour le Daily Telegraph, il "n’a jamais paru si faible". "Ses opposants, poursuit le journal, l’ont souvent caricaturé en élitiste 'président des riches', or en usant de ce déni de démocratie, il ne fait que leur donner des munitions. Le danger pour lui n’est pas la démission, mais l’impuissance pour le reste de son mandat".
Emmanuel Macron, premier responsable et première victime de la séquence, juge les éditorialistes étrangers. Un président "affaibli et isolé" pour le New York Times, un chef d'Etat "très touché" pour La Vanguardia espagnole. Pendant qu'El País tente la comparaison : "Emmanuel Macron, toujours remis en question pour son caractère hautain et déconnecté de la rue, est entré dans la même phase que ses prédécesseurs Alain Juppé, en 1995, et Nicolas Sarkozy, en 2010, lorsqu’ils ont eux aussi réformé les retraites".
This is the moment members of the French National Assembly broke into the country's national anthem after President Emmanuel Macron moved to push through legislation to raise the retirement age for most workers to 64 from 62 without a vote in the chamber. https://t.co/UuDgbYnX0m pic.twitter.com/4wtURC7IOk
— The New York Times (@nytimes) March 16, 2023
La presse étrangère redoute des conséquences à long terme comme en témoigne le titre choisi par Die Zeit : "La République bloquée". Selon le quotidien allemand, "cette réforme va peser longtemps sur le pays sachant qu'il est des réformes dont un gouvernement ne se relève jamais". L'utilisation du 49.3 "est le symbole d'une crise institutionnelle profonde", abonde El Pais. La Libre Belgique juge "considérable" le "prix à payer de ce stratagème constitutionnel". Emmanuel Macron "n’apaisera aucunement une Assemblée nationale déjà déchaînée et apporte de l’eau au moulin des populistes", prédit le journal espagnol.
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