Reportage "Je saute des repas pour économiser un peu" : à Marseille, des étudiants racontent leurs difficultés pour manger à leur faim

Sur le campus d'une université à Marseille, plusieurs étudiants, boursiers ou non, témoignent de leurs difficultés à se nourrir convenablement. Une précarité qui impose des sacrifices au quotidien.
Article rédigé par Mathilde Vinceneux
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Des étudiants en train de manger un repas à un euro du Crous, le 24 mars 2021, à Marseille (Bouches-du-Rhône). (VALERIE VREL / MAXPPP)

Près de 20% des étudiants ne mangent pas à leur faim, selon une étude menée par la Fédération des associations générales étudiantes (la Fage), premier syndicat étudiant, et cela concerne les boursiers comme les non-boursiers. L’étude pointe aussi du doigt les difficultés pour accéder à des logements étudiants.

À la sortie du restaurant universitaire d'un campus à Marseille, Baptiste, 24 ans, vient de prendre son repas pour un euro, le tarif pour les boursiers. Cet étudiant en master a un budget très serré pour manger. Les courses, c'est 15 euros par semaine maximum. "Je prends tout ce qu'il y a de moins cher : des pâtes, la sauce pour les pâtes, des patates, décrit-il. Franchement, tous les produits que je consomme en général ont augmenté. Du coup, il y a des fois où je saute des repas pour économiser un peu. Je l'ai fait il y a trois jours, parce que j'ai pas encore reçu la bourse. Ce n’est pas agréable, mais je l'ai fait." C'est donc le ventre vide que Baptiste a révisé ses partiels. 

"Je fume pour couper la faim"

Pas facile de se concentrer dans ces conditions. "En fait, si on ne peut pas manger, on ne peut pas réfléchir", affirme Ona, étudiante étrangère. Dans sa main, un caddie à roulettes. Elle espérait tomber sur une distribution alimentaire sur le campus. "Si je n’ai pas les aides alimentaires, c'est très compliqué, déplore-t-elle. Les fruits et les légumes, je trouve ça hyper cher. Les fromages, c'est hors de question. L'huile d'olive aussi, c'est quelque chose qui est un peu devenu un luxe."

La jeune femme a souvent dû trouver des parades pour sauter des repas par manque de moyens.
"Avant, quand je fumais des cigarettes, je disais : 'Je fume pour couper la faim'."

"Même dans des moments de pause, j'étais obligée de dire à mes potes que j'avais mal aux dents ou un truc comme ça, pour ne pas sortir avec eux, de honte d'être pauvre."

Ona, étudiante étrangère

sur franceinfo

Aujourd'hui, Ona étudie l'art du spectacle après avoir abandonné le droit, car elle devait consacrer du temps à un travail pour se nourrir. Ilona, 26 ans, doit elle aussi jongler entre les cours et un travail, 18 heures par semaine, comme surveillante dans un collège. Elle n'a pas d'autre choix car elle n'a pas de bourse. "Il n'y a pas beaucoup de droits pour les étudiants qui sont non-boursiers", regrette la jeune femme.

"Pour Noël, je mangeais des pommes. Je faisais un repas par jour et je mangeais des pommes."

Ilona, 26 ans

à franceinfo

"Mais je ne mange pas toujours très bien, admet l'étudiante. Il faut que je travaille pour pouvoir vivre correctement un minimum, donc j'espère ne juste pas rater mon année parce que j'ai décidé de travailler. Mais bon, c'est comme ça."

Ilona révise ses cours de médiation culturelle après le travail chez une copine qui l'héberge, car la jeune femme n'a pas le droit au logement en cité universitaire et a du mal à trouver un appartement salubre avec son petit budget. 

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