JO de Paris 2024 : quatre questions sur les demandes d'indemnisation déjà formulées par plus de 135 entreprises

Plusieurs fédérations de commerçants et de restaurateurs ont déploré "une baisse d'activité" liée aux restrictions de circulation, notamment avant les Jeux olympiques en juillet. Une commission d'indemnisation a été mise en place, mais elle n'étudiera ces demandes que début 2025.
Article rédigé par franceinfo
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Un restaurant derrière des barrières, installées pour sécuriser la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques à Paris, le 24 juillet 2024. (MYRIAM TIRLER / HANS LUCAS / AFP)

Les Jeux de Paris 2024 n'ont pas été une parenthèse enchantée pour tout le monde. Alors que la Banque de France anticipe "une hausse significative" du produit intérieur brut (PIB) au troisième trimestre en raison de l'activité économique durant la compétition, de nombreuses fédérations professionnelles ont déploré "une baisse d'activité et de fréquentation inédite", notamment lors de la deuxième quinzaine de juillet, avant la cérémonie d'ouverture des JO, le 26 juillet.

Le Premier ministre, Gabriel Attal, avait d'ailleurs annoncé dès fin juin la création d'une commission d'indemnisation pour les entreprises touchées. Bien que les demandes ne puissent en théorie être déposées que début 2025, un peu plus de 135 entreprises ont déjà plaidé leur cause, a appris franceinfo auprès de la commission, vendredi 23 août. Mais, faute d'avoir respecté les règles, elles devront réitérer leur demande à l'ouverture de la campagne officielle. On fait le point sur la procédure, alors que de nouvelles restrictions de circulation ont été mises en place à l'approche des Jeux paralympiques, qui débutent mercredi dans la capitale.

1 Quelles sont les entreprises qui ont réclamé un dédommagement ?

Plusieurs fédérations représentant les commerçants, exploitants de restaurants, bars et clubs à Paris ont déploré, dans un communiqué publié le 19 juillet, "une baisse d'activité et de fréquentation inédite". "Malgré les prévisions optimistes, l'activité est en berne depuis le mois de juin, de nombreux professionnels constatent une baisse de 30% de leur chiffre d'affaires par rapport aux années précédentes", ont assuré le GHR (Groupement des hôtelleries et restaurations de France) et l'Umih (Union des métiers et des industries de l'hôtellerie), la Confédération des commerçants de France, le Sneg & co et Culture Nuit (lieux festifs). Estimant que "de nombreuses petites entreprises risquent de mettre la clé sous la porte", les organisations des commerçants et restaurateurs avaient alors insisté "sur la nécessité d'un dédommagement juste et rapide".

Depuis l'ouverture de la boîte mail de la commission, fin juin, un peu plus de 135 entreprises ont déjà formulé une demande d'indemnisation, a appris franceinfo auprès de celle-ci. "Il n'est pas tenu de statistiques à ce stade, ni sur la localisation des entreprises, ni sur leur activité économique", explique la commission. Néanmoins, "dans la très grande majorité des cas, elles sont localisées à Paris, et nettement plus rarement en proche banlieue", précise la même source, ajoutant que "le secteur de la restauration apparaît sur-représenté". Il n'y a, pour l'instant, "pas de demandes reçues au titre de la province". 

2 Pourquoi s'estiment-elle lésées ?

"A l'évitement de Paris par les vacanciers à cette période, au bilan touristique marqué par l'inflation et la météo défavorable de ce début de saison, se sont ajoutés un contexte politique anxiogène et les lourds dispositifs de sécurité (périmètre Silt, pass Jeux, barrières...) avec des conséquences désastreuses sur l'économie de nos établissements", décrivaient en juillet, avant le début des Jeux olympiques, les organisations professionnelles.

"Les restaurants et brasseries parisiennes installées sur la place du Trocadéro souffrent par exemple de restrictions d'accès telles que leur fréquentation a chuté de 70%" tandis que pour d'autres, "ce sont les barrières installées dans les rues emblématiques de la capitale qui ont un effet repoussoir chez les consommateurs". Quelque 44 000 barrières avaient en effet été installées pour sécuriser la cérémonie d'ouverture, selon la préfecture de police. "La période est très calme. Normalement, on fait nos meilleurs chiffres en juillet, mais là, ça ressemble à un mois de novembre. On fait environ 40 000 euros en moins par rapport à juillet 2023", confiait par exemple fin juillet à franceinfo le propriétaire d'un restaurant du quartier de Saint-Germain-des-Prés habituellement très prisé.

3 Quelles sont les conditions pour être indemnisé ?

Plusieurs conditions doivent être réunies pour espérer bénéficier d'une indemnisation. Logiquement, seuls les professionnels exerçant dans les zones où des restrictions étaient en place (interdiction ou restriction d'accès, de circulation, de navigation fluviale) peuvent prétendre à un dédommagement, détaille le site du ministère de l'Economie. Par ailleurs, seuls les "préjudices économiques directement liés aux décisions restrictives prises par l'Etat" pourront être indemnisés, ajoute le gouvernement. Par exemple, la baisse de fréquentation due à la fuite de la capitale des habitants et des touristes en raison des JO n'est pas indemnisable. De même, des restrictions prises par la Ville de Paris ou par le Comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) ne donneront pas lieu à une indemnisation de l'Etat.

"Le préjudice doit être certain et ne pas uniquement correspondre à un bénéfice escompté qui ne se réaliserait pas", précise aussi le ministère, qui ajoute qu'un préjudice réel durant la quinzaine pourrait être "compensé (...) dans les semaines ou mois suivants par les retombées économiques des Jeux" et ainsi ne pas ouvrir de droit à une compensation. Afin de s'assurer qu'un préjudice durable existe, les demandes d’indemnisation devront être "déposées en ligne à compter de début 2025 sur la base des comptes 2024 qui feraient apparaître le préjudice à l'aune de l'année complète", détaille le ministère.

Enfin, les préjudices doivent être "suffisamment importants en termes de baisse de chiffre d'affaires notamment", pour entraîner un dédommagement, précise aussi le gouvernement. Aucun montant n'est indiqué, mais Bercy renvoie aux "règles dégagées par la jurisprudence administrative", qui laisse espérer une indemnisation lors d'une baisse d'au moins un tiers du chiffre d'affaires.

Les demandes déjà reçues par la commission ne respectent donc pas les règles fixées. "Seules les demandes qui seront déposées en ligne début 2025, sur la base des comptes 2024 faisant apparaître de manière objective et chiffrée un éventuel préjudice seront traitées par la commission", répète cette dernière. Interrogé, le ministère de l'Economie confirme également que les demandes déjà envoyées devront être "reformulées" début 2025.

4 Qui décide, ou non, d'indemniser ?

Une fois le dossier déposé en ligne, "la présidente de la commission émettra son avis sur chaque dossier individuel après analyse", explique le ministère de l'Economie. Pour prendre sa décision, la conseillère d'Etat Dominique Laurent consultera le représentant du ministère à l'origine des restrictions (ministère de l'Intérieur ou des Transports) et un représentant du secteur professionnel concerné. Si elle considère la demande valable, elle proposera "un montant d'indemnisation aux administrations centrales compétentes". Mais ce sont ces dernières qui prendront la décision d'indemniser ou non, "éclairées par l'avis de la commission".

"Si le professionnel accepte la proposition, un protocole d'accord transactionnel sera signé entre lui et cette administration", précise Bercy. Le chef d'entreprise renoncera en même temps à "tout recours juridictionnel ultérieur". En revanche, si l'administration choisit de ne pas indemniser, ou si le professionnel refuse le montant proposé, il pourra saisir la justice administrative pour tenter d'obtenir réparation. 

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