Les personnes portant des noms d'origine africaine sont discriminées dans l'accès au logement, selon une étude
Une équipe de scientifiques du CNRS a envoyé cinq candidatures fictives en réponse à une sélection de 5 000 annonces de location, et étudié les retours de ces 25 000 réponses.
Mieux vaut s'appeler Dupont ou Durand pour trouver un appartement. Les propriétaires privés désireux de louer un logement répondent moins facilement à un candidat portant un nom d'origine africaine, selon une étude publiée vendredi 15 décembre.
Au vu de ces résultats, ils plaident pour une "réflexion approfondie" sur "les différents outils" pouvant être déployés afin de contrer ces discriminations et lutter "contre la précarité sociale", comme "l'accès au logement social" ou "les mécanismes de garanties financières permettant de sécuriser les loueurs du parc privé".
"Sébastien Petit" préféré à "Mohamed Chettouh"
Pour mesurer les discriminations dans l'accès au logement du parc privé dans les 50 plus grandes aires urbaines de France, une équipe de scientifiques du CNRS a, entre juin et décembre 2016, envoyé cinq candidatures fictives en réponse à une sélection de 5 000 annonces de location, et étudié les retours de ces 25 000 réponses. Une opération de "testing" à grande échelle menée avec des noms évoquant des origines diverses (Petit, Rousseau, Chettouh, Mehdaoui ou encore Sambou).
Les résultats (réponses non négatives) font apparaître d'"importantes discriminations selon l'origine" pénalisant les candidats aux noms et prénoms d'origine "africaine", notent les auteurs du rapport. Et ce alors qu'aucune discrimination n'apparaît en revanche en fonction de l'âge ou du lieu de résidence des candidats.
Ainsi par rapport au "candidat de référence présumé d'origine française, Sébastien Petit, le candidat maghrébin Mohamed Chettouh a 26,7% de chances en moins de voir ses démarches d'accès au logement aboutir", soulignent les auteurs.
Des villes petites et moyennes particulièrement concernées
Ces discriminations, "très marquées" pour les offres émanant de particuliers mais qui "le sont aussi" pour celles "diffusées par les agences immobilières", "ne sont que faiblement atténuées lorsque le candidat à la location ajoute un signal de qualité en précisant qu'il est fonctionnaire", ajoutent-ils.
Ces discriminations sont particulièrement "patentes" dans une dizaine de villes dispersées à travers le territoire (Limoges, Orléans, Amiens, Béthune, Caen, Le Havre, Valenciennes, Avignon, Perpignan, Nancy), toutes des préfectures ou sous-préfectures de taille et rayonnement moyen. Les auteurs préconisent des "explorations plus approfondies" pour expliquer pourquoi ces agglomérations sont particulièrement touchées.
Selon une autre étude publiée jeudi par le Défenseur des droits, les personnes discriminées pour l'accès au logement locatif privé en raison de leur handicap, leur couleur de peau ou leur situation familiale renoncent à faire valoir leurs droits et se tournent vers le logement social. Près d'une personne sur deux (46%) y juge les discriminations "fréquentes" ou "très fréquentes" dans l'accès au logement, où les bailleurs privés sont très "sélectifs".
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