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Immobilier : quatre recours si vous pensez être victime de discrimination

Franceinfo passe en revue les possibilités qui s'offrent aux locataires s'estimant victimes de discrimination dans l'attribution d'un logement.

Article rédigé par Catherine Fournier
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Si un propriétaire ou une agence immobilière vous refusent un logement, vous êtes en droit de leur demander de motiver ce refus. (POUZET / SIPA)

"Attention, important pour la sélection des locataires : nationalité française obligatoire, pas de Noir, immeuble avec des policiers uniquement." Ce commentaire figurant sur une annonce immobilière a valu à l'agence Laforêt des Lilas, en Seine-Saint-Denis, une plainte de la part d'une association, une action de groupe introduite par une autre, une enquête du Défenseur des droits et une suspension du contrat de franchise avec le réseau immobilier du même nom.

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Si le locataire s'est retrouvé cette fois-ci avec une preuve flagrante de discrimination entre les mains, il n'en est rien dans la grande majorité des cas. Un dossier écarté sans justification, un coup de fil de l'agence pour dire que le bien a été loué... La plupart du temps, le sentiment d'avoir été discriminé en matière de logement est difficile à prouver. Plusieurs recours sont toutefois possibles.

Aller porter plainte au commissariat

Si un propriétaire ou une agence immobilière vous refusent un logement, vous êtes en droit de leur demander de motiver ce refus. Si vous n'êtes pas satisfait de leur réponse et soupçonnez d'être victime de discrimination, vous pouvez aller porter plainte dans un commissariat de police ou à la gendarmerie, dans un délai de trois ans. Cette plainte sera ensuite transmise au procureur de la République, qui décidera de la classer sans suite ou d'ouvrir une enquête.

La difficulté, dans ce type de dossiers, est d'avoir suffisamment de preuves pour caractériser le délit de "refus" ou de "subordination" d'octroi d'un bien ou d'un service à l'un des 22 critères de discriminations définis dans le Code pénal. Si vous ne disposez pas de trace écrite, comme dans l'affaire Laforêt, mieux vaut vous tourner d'abord vers une association. 

Au pénal, le juge peut prononcer des peines pouvant aller jusqu’à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende pour une personne physique et 225 000 euros pour une personne morale.

Contacter une association

Si vous rencontrez des difficultés à louer un logement en raison, selon vous, de votre patronyme ou de votre origine, vous pouvez contacter une association de lutte contre les discriminations ou de défense des locataires. Celle-ci peut réaliser un testing afin de recueillir des preuves, comme l'autorise la loi sur l'égalité des chances depuis 2006.

La plupart du temps, cette méthode consiste à appeler les agences en se faisant passer pour un locataire, avec différents patronymes, et à enregistrer les conversations. Une fois les éléments de preuve recueillis, l'association peut porter plainte elle-même ou vous accompagner dans vos démarches auprès de la justice.

Saisir le Défenseur des droits

C'est l'autre alternative la plus simple. Vous pouvez saisir le Défenseur des droits (anciennement appelé la Halde) via un formulaire en ligne, par courrier ou en rencontrant un délégué. La procédure est confidentielle et non médiatisée. L'institution, dirigée par Jacques Toubon, dispose de pouvoirs d’enquête et peut elle aussi avoir recours au testing pour étayer le dossier.

Si la discrimination est caractérisée, le Défenseur des droits peut procéder à une médiation, adresser des recommandations à la personne mise en cause ou encore proposer une transaction qui consiste dans le versement d’une amende et dans l’indemnisation du locataire. Si toutes les parties sont d'accord, cette transaction doit être validée par le procureur de la République.

Si l'auteur de la discrimination ne répond pas et refuse de se plier aux recommandations du Défenseur des droits, l'affaire peut être rendue publique. Le Défenseur des droits peut aussi présenter des observations écrites ou orales devant les juridictions.

Saisir un juge au civil

En plus d'être un délit, le refus de louer un logement pour un motif discriminatoire est une faute civile, définie par la loi du 6 juillet 1989. Comme l'explique une juriste spécialisée à franceinfo, la procédure au civil est parfois plus efficace dans les dossiers de discriminations dans lesquels la preuve est difficile à obtenir : "Au civil, il appartient au propriétaire ou à l'agence immobilière de prouver leur bonne foi alors qu'au pénal, la charge de la preuve appartient au parquet et à la victime."

Le locataire qui pense avoir fait l'objet d'une discrimination peut ainsi saisir directement un juge au tribunal d'instance le plus proche. Si sa démarche aboutit, il peut se voir verser des dommages-intérêts.

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